Il semble intéressant de se demander si cette citation du général Patton ne préfigure pas une vision pragmatique, voire plus professionnelle, de la guerre, fondée sur la gestion et la coordination des moyens.
[...] Ainsi, Sun-Tzu, prône-t-il d'abord et avant tout cette vision de l'efficacité de la guerre au détriment des actions certes héroïques et romanesques, mais dont l'utilité tactique est quasi-nulle. Ainsi, ce dernier dans le paragraphe IV, nommé "De la mesure dans la disposition des moyens" de "l'art de la guerre", valorise-t-il avant tout la préparation et une lecture dépassionnée de la stratégie, notamment dans la bonne gestion et dans l'économie des moyens engagés compris les moyens humains): "Tels étaient nos Anciens : rien ne leur était plus aisé que de vaincre ; aussi ne croyaient-ils pas que les vains titres de vaillants, de héros, d'invincibles fussent un tribut d'éloges qu'ils eussent mérité. [...]
[...] Cependant, et par définition, le combattant ne doit pas nécessairement rechercher le risque ou le danger au combat lorque celui-ci est inutile. Ainsi, la valorisation du sacrifice ne peut être efficace que si celui-ci ne saurait être considéré comme vain ou inutile. Plusieurs actions militaires, par ailleurs héroïques, ont brillé au cours des derniers siècles, par leur courage et parallèlement par leur inefficacité. Ainsi, si la charge de la cavalerie polonaise[2] contre les chars allemands en 1939 a laissé une trace quasi mythique dans l'histoire mondiale, son efficacité semble parfaitement limitée sur le plan tactique et stratégique et pourrait s'apparenter à une perte de moyens humains et matérielle inutile. [...]
[...] Ainsi, la première guerre mondiale, notamment du fait du grand nombre de mort qui en résultant, a ainsi dû insister sur la sacralisation et la valorisation symbolique du soldat mort au champ d'honneur. Le très grand nombre de stèles et de monuments aux morts et la place qu'ils occupent dans presque l'intégralité des villes et villages de France est un témoignage fort de l'importance de cette notion à l'époque, qui semble expliquer, presque à elle seule, la force et la capacité de résistance dont pouvaient faire preuve les nations européennes à cette époque, prêtes pour leur défense à sacrifier des générations entières, dans des actions militaires parfois efficaces, mais également parfois vaines. [...]
[...] Cet élément est d'autant plus important dans les armées modernes, particulièrement dans les pays organisés en démocratie dans lesquelles les pertes de vies humaines sont plus durement perçues que dans les régimes autoritaires. Ainsi, la mise en danger inutile ou en violation des règles stratgéiques établies peuvent elles causer de forts dommage non seulement sur les armées mais également sur la perception que peut avoir de la guerre qui est menée la population de citoyens. En effet, et comme décrit par Clausewitz dans son ouvrage De la Guerre, la relation entre guerre et politique est profonde, et le soutien de sa propre population est une condition indispensable au déroulement efficace d'une guerre. [...]
[...] Ainsi, un équilibre, nécessairement variable en fonction des considérations politiques et de la sensibilité du public est nécessaire entre valorisation extrême du sacrifice des combattants, pouvant parfois mener à des actions inutiles et dommageables de moyens humains et, de l'autre, d'un refus trop catégorique de toute forme de risque pour le combattant qui fragilise l'efficacité de l'action militaire. En conclusion, le General Patton, par cette phrase, exprime un point de vue apassionné et réfléchi quant à la gestion des moyens humains à sa disposition. La guerre, si elle nécessite toujours des actes de bravoure et génère des situations de risque, ne saurait être efficacement menée sans une stratége visant à préserver au mieux les moyens humains à disposition du ou des dirigeants civils et / ou militaires. [...]
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