La prostitution est une activité ancienne qui existait comme telle dès le moyen-âge. Elle a tantôt été libre, tantôt régulée. Il existe depuis plus d'un siècle une législation concernant la prostitution et l'évolution du droit montre que la régulation du marché du sexe s'est toujours inscrite dans les mêmes débats : l'activité prostitutionnelle est-elle liée à la sphère privée, dans le sens où elle relève de la gestion individuelle de la sexualité et de la disposition de son propre corps, ou doit-on la traiter comme une affaire publique, puisqu'elle se rapporte aux questions économiques mais aussi aux questions de santé et de sécurité publique ? La France a choisi d'adopter depuis 1949 une position abolitionniste, la prostitution est associée à une forme d'esclavage allant contre la dignité humaine, elle n'est pas illégale mais elle n'est pas reconnue et son activité est entravée (par l'interdiction du racolage passif et actif). Face à cette nouvelle législation et aux idées qui lui sont associées (la prostitution est une forme d'esclavage qui ne résulte pas d'un libre choix et dont il faut limiter la propagation), les prostituées ont créé des associations communautaires qui ont ensuite donné lieu à des mouvements identitaires afin de montrer que l'activité dite « dirty » est un véritable « work ».
Comment l'assimilation, par la loi et la population, de la prostitution à une activité dirty, déviante ou immorale a été à l'origine de nouveaux mouvements identitaires revendiquant le statut de « work » ?
[...] Le livre est clairement pro prostitutionnel, les auteurs réclament la légitimation sociale de la prostitution entendue comme métier dispensant des prestations sexuelles non asservies à la mise en marchandise du corps ; ils luttent contre la prostitution comme stigmate sociale et politique, source de putophobie Conscients des préjugés associés à la prostitution, idées que nous avons évoquées dans les chapitres précédents, les deux auteurs s'empressent de les démentir : Non, nous n'avons pas de proxénètes. Non, nous n'avons pas été violées dans notre enfance, ni par la suite. Non, nous ne sommes pas toxicomanes. Non, nous n'avons jamais été forcées de nous prostituer. Non, nous n'avons pas d'angoisse post-traumatique. Non, nous ne sommes pas malheureuses. Oui, nous avons une vie sentimentale. [...]
[...] Ce sont les prostituées elles-mêmes qui décriront leurs activités puisque celles-ci appartiennent à leur sphère privée. Nous étudierons dans un premier temps l'évolution de l'image de la prostitution véhiculée par la législation et la population jusqu'à la nouvelle Loi sur la Sécurité Intérieure du 18 mars 2003 (LSI). Nous verrons ensuite que les prostituées se sentent stigmatisées, marginalisées et estiment qu'un jugement immoral est porté sur leur activité. Ce sentiment les pousse à montrer que leur activité n'est pas que dirty mais que c'est un véritable work qui demande savoir-faire et compétences. [...]
[...] - [ ] Alors, moi je lui mets le doigt dans le cul avec de la vaseline et puis je sens la prostate qui se durcit, mais un peu bizarrement. Il y avait comme des anneaux. J'ai dit, tiens c'est un peu anatomiquement spécial. Il a le droit d'être un peu spécial [ ] - Il y a eu parfois des handicapés ? Il y a des types carrément qu'on transporte ? - Oui, qu'on porte en haut de l'escalier. Mais ce qu'il y a d'affreux avec ces gens handicapés ou infirmes, c'est qu'ils sont toujours très agressifs. [...]
[...] Ces mouvements sont récents et montrent la volonté des prostituées d'être reconnues par la société, de ne plus se cacher et d'obtenir des droits. En même temps elles dévoilent au grand jour un sujet qui reste tabou. La Pute Pride ne peut pas être assimilée à une simple manifestation de travailleurs pour le pouvoir d'achat ou pour obtenir de nouveaux droits car c'est un mouvement avant tout identitaire (d'où l'emploi du mot pute qui veut associer la prostitution à une image festive (musique et tenue colorée). [...]
[...] Le législateur justifie la position abolitionniste de la France en expliquant les origines de cette activité. Il se fonde sur une enquête menée par le Service insertion jeune de l'A.N.R.S.[20], menée d'avril 1995 à mars 1996 auprès de 80 jeunes âgés de 18 à 25 ans, et qui a eu pour objet de repérer les situations qui préfigurent une évolution vers la prostitution. Dans le compte-rendu de cette étude cité par le législateur on trouve les extraits suivants: La prostitution est toujours le résultat d'une souffrance et prospère systématiquement sur un fond général d'ignorance et d'indifférence. [...]
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