Ayant eut l'opportunité de passer un an de ma vie au Japon, je ne pouvais passer à côté de l'occasion pour trouver un sujet en rapport avec ce pays si différent de la France. Ultradéveloppé malgré la crise actuelle, le Japon est un savant mélange entre racines orientales et influence occidentale. Un mélange parfois explosif, présentant de nombreux dommages collatéraux au sein d'une population entièrement vouée à la sacro sainte Production. Des dommages collatéraux, sous forme de laissés pour compte ou « d'ermites » n'ayant que peu de lien avec la société. Ici, ces derniers ont un nom : on les appelle les otaku. Toute société à ses marginaux. La culture « underground » n'est pas propre au Japon, les subcultures telles que le « tunning » ou la « drogue culture » ne sont pas particulièrement représentés sur l'île. Pendant que leurs homologues européens s'adonnent aux découvertes illicites, les marginaux Japonais s'enterrent chez eux, les yeux rivés sur l'écran de leur PC. Aucun pays au monde ne peut se targuer de compter un nombre aussi élevé « d'enfermés vivants ». L'otakisme n'est pas, comme certains observateurs ont pu le penser au premier abord, un phénomène futile et temporaire. Nous assistons en direct à la naissance d'un phénomène de société, une vague de fond qui pourrait bouleverser dans un futur proche la conception même de groupe, de communication et de socialisation.
Mais qu'est ce qu'un Otaku ? Ce mot, employé pour la première fois en 1983 par l'essayiste Nakamori Akio, est intraduisible dans notre langue. Quelques tentatives ont bien été faites : « l'écho des savanes » le traduisit par « les emmurés » dans un article leur étant consacré au début des années 90. Mais cette traduction ne présente qu'une facette de l'otakisme et n'englobe pas la totalité du terme. Faute de traduction efficace, le mot « otaku » devrait donc apparaître prochainement dans nos dictionnaires. Si ce mot provient du Japon, c'est que ce dernier peut sans contestation possible prétendre au rang de premier « fournisseur mondial d'otaku ». Le développement des technologies de pointes, créneau de l'industrie nationale, n'est pas allé sans conséquences sur la population. Au Japon, le réel et le virtuel se croisent et s'entremêlent, repoussant une frontière de plus en plus perméable. L'imaginaire et l'artificiel dépeignent sur une réalité devenue trop banale pour tous ces marginaux qui préfèrent vouer leur vie à leurs fantasmes, refusant de suivre les plans de carrières de l'employé japonais modèle. Ces « rebelles modernes » refusent le contact avec une société dans laquelle ils ne se reconnaissent pas. A quoi bon sortir dehors et affronter les affres de la socialisation lorsque l'ordinateur vous relie au monde sans le moindre efforts ? Enfermés dans leur chambre, les otaku peuvent alors se consacrer à leur passion : rêver leur vie.
Bien que l'otakisme soit particulièrement présent au Japon, il serait naïf de le considérer comme un épiphénomène se limitant à l'archipel. Aujourd'hui, tout pays développé est sujet à « l'invasion otaku ». En occident, on les confond avec les Nerds, les « nolife » ou les geeks… Autant de mots nouveaux aux racines anglophones qui ne font que mettre en évidence la propension des jeunes à se passionner pour les nouvelles technologies, se cloîtrant dans leur chambre et se socialisant via l'Internet. Cette génération née sous le signe de l'arobase, encore considérée comme marginale de nos jours, peut elle devenir la norme ? Peut-on voir l'otakisme comme l'avant garde des générations à venir ? Ce mouvement peut-il nous fournir quelques indications sur le devenir de l'Homme ? A l'heure du « tout informatique », va t'on assister à l'émergence d'une cyber-génération ?
L'étude des otaku passe par l'étude de la société Japonaise. Pour expliquer le phénomène, il nous faudra visiter des domaines aussi divers que la politique, les mangas, la sexualité ou la psychologie orientale… A travers les otaku c'est aussi toute l'histoire contemporaine du japon qu'il nous faut revisiter, de l'occupation américaine de l'après guerre aux attentats terroristes de la secte Aum en 1995. Tous ses événements, et bien d'autres encore, ont eu leur influence sur le « peuple otaku ». Connectés au monde sans en faire vraiment partie, utilisant à outrance les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC), ils s'isolent et s'aliènent proportionnellement au nombre d'heures passées à regarder le monde défiler sur leurs écrans. Ils sont l'incarnation vivante d'un paradoxe du troisième millénaire « NTIC / destruction de lien social ». C'est une nouvelle population qui a vue le jour, coupée de notre monde, ne le parcourant qu'à des fins personnelles pour entretenir leurs fantasmes par les biens de consommation. Les otaku peuvent ils être considérés comme membre de notre société ?
On pourrait les croire isolés, mais les otaku se « socialisent sélectivement » : le peuple otaku est « intra-connecté » ; leurs liens sociaux sont tissés sur la toile de l'Internet, leurs contacts ne se font pas avec l'extérieur, mais plutôt par l'intérieur. Comme nous le verrons au cours de notre étude, on pourrait parler d'autosuffisance : les otaku ne se sentent compris que par leurs homologues, ces derniers se sont emparés des marchés économiques « vecteur d'otakisme ». Préférant rester dans l'ombre, ils redoutent les médias de masse et l'image que ceux-ci leurs renvoient d'eux même. Soudés virtuellement, unis par le biais des NTIC, les otaku se réinventent une vie sociale sans rapport avec la société. Aux vus des rapports entretenus entre eux et des contacts si ténus qu'ils entretiennent avec le monde extérieur, nous sommes en droit de nous demander si nous n'assistons pas là à la naissance d'une société indépendante, créée grâce aux nouveaux outils de communication.
En d'autre termes ; dans quelle mesure les NTIC peuvent elles être à l'origine d'une société parallèle?
Il serait réducteur de considérer tous les otaku comme une seule et même catégorie sociale. S'il est certain que chaque otaku est un être unique et vit sa passion de manière personnelle, tous n'en partagent pas moins des caractéristiques communes. Au Japon, les causes de ce phénomène sont connues. Mais reconnaître les responsabilités de la société dans l'apparition du mouvement otaku reviendrait à ouvrir la boîte de pandore. Dans ce pays où l'honneur est une valeur fondamentale, l'introspection n'est pas encore à l'ordre du jour. Le phénomène n'est donc pas prêt de s'arrêter et les proportions qu'il risque de prendre restent inconnues. Les premières prévisions annoncent par ailleurs que les répercussions de celui-ci atteindront leur paroxysme en 2025 .
Nous étudierons l'otakisme en trois parties. Tel un adolescent à problème, il nous faudra dresser un constat de la situation actuelle, puis en trouver les causes dans le passé, afin d'élaborer les répercussions et les développements possibles dans le futur.
Nous étudierons tout d'abord la « phase adolescente » de l'otaku, correspondant au temps présent sur une échelle chronologique. L'heure du constat, afin de clarifier la situation actuelle et de préciser les caractéristiques du phénomène : après avoir défini le terme, nous verrons les différences de perceptions entre l'Orient et l'Occident, la vie par procuration rendue possible grâce aux NTIC, la relation entre l'otaku et la société Nipponne pour finir sur la création d'une sous-société par le biais de l'Internet et des communautés virtuelles.
Dans un second temps, nous reviendrons sur la phase de l'enfance de l'otakisme, autrement dit les causes du phénomène, afin de replacer celui-ci dans son contexte. Trois sous parties correspondantes chacune à un thème principal : l'éducation, les médias et la consommation seront développées. Ces trois facteurs cumulés sont responsables de la naissance de l'otakisme. Nous verrons comment les conditions nécessaires à son émergence ont été réunies ainsi que le processus qui a permis la naissance de ce qui peut être vu comme un « cas pathologique ».
Enfin, nous tenterons de nous projeter dans le futur, ou la phase adulte. Nous verrons au cours des différentes sous-parties quelles sont les issues possibles concernant l'individu otaku mais aussi de manière plus générale, la destinée du phénomène en lui-même. Après les différentes projections à l'échelle macro et micro, nous tenterons d'apporter des solutions afin d'éviter les prévisions les plus pessimistes qui seront observées, entre autres, dans cette dernière partie.
[...] La mère d'Ajase l'ayant pardonné alors qu'il tenta de la tuer, son fils se sent redevable et dépendant de sa mère, sans jamais rien pouvoir faire pour se soustraire à cette dépendance. Il en va de même pour les jeunes Japonais, toutes proportions gardées. Le père absent, c'est la mère qui s'occupe de l'éducation. La relation mère- enfant est donc beaucoup plus importante, l'enfant est naturellement attaché à la mère. Cet attachement naturel est donc considéré comme étant le modèle d'une saine relation. [...]
[...] Nous pouvons le constater sur le graphique 12. Depuis 1995, une baisse des signalements a eu lieu dans les écoles primaires et collèges, le nombre de personnes victimes d'ijime passant de en 1995 à en 2004. Les victimes sont de toutes sortes, elles ont cependant une caractéristique commune : elles se distinguent du groupe. Que ce soit par son physique, ses résultats scolaires trop faibles ou, au contraire, trop élevés, par ses idées, ses opinions, son comportement tout peu être à la cause d'une exclusion, car il faut enfoncer le clou qui dépasse. [...]
[...] Au Japon, les causes de ce phénomène sont connues. Mais reconnaître les responsabilités de la société dans l'apparition du mouvement otaku reviendrait à ouvrir la boîte de pandore. Dans ce pays où l'honneur est une valeur fondamentale, l'introspection n'est pas encore à l'ordre du jour. Le phénomène n'est donc pas prêt de s'arrêter et les proportions qu'il risque de prendre restent inconnues. Les premières prévisions annoncent par ailleurs que les répercussions de celui- ci atteindront leur paroxysme en 2025[2]. Nous étudierons l'otakisme en trois parties. [...]
[...] C'est le concept d'amae : le désir de retrouver de nouveau le confort qui caractérise la relation originelle mère-enfant. L'amour sans condition, qui conduit à une indulgence absolue. L' amae invite les gens à se focaliser sur leur enfance, qui est liée au terme permission L'amour sans condition est appelé amour passif Si l'on s'accorde à cette interprétation, il y aurait deux sortes d'amours. L'amour passif et l'amour actif. Le premier caractérise l'amour que reçoivent les enfants de la part de leurs parents. [...]
[...] Ce n'est pas par hasard que le Japon est le pays d'origine du mouvement et son fournisseur numéro un A ce titre, il est surprenant de noter qu'il existe une différence fondamentale dans la façon d'appréhender le phénomène otaku. Des otaku entre le Japon et les autres pays développés. Pour éviter toute mésinterprétation, c'est cette différence qu'il nous faut à présent aborder / différences de perceptions entre l'Orient et l'Occident Nous le verrons, en Orient, et plus spécialement au Japon, otaku reste un qualificatif péjoratif (cf. [...]
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