Au cours de ces dix dernières années, les pays développés ont connu un boom de l'immobilier impressionnant. Selon le magazine "The Economist" (juin 2005) jamais les prix de l'immobilier n'avaient autant augmenté simultanément dans le monde, nous avons assisté à "la plus grosse bulle de l'Histoire". L'éclatement de la bulle en 2008 déstabilise l'économie mondiale, et ébranle de nombreuses villes où les saisies immobilières ou "foreclosures" se multiplient. Cet essai s'intéresse aux conséquences d'une crise commune sur deux mouvements sociaux récents d'habitants, en France et aux États-Unis, qui luttent pour obtenir un toit et contestent les politiques publiques.
"Take Back the Land", la première organisation que nous étudierons, est un mouvement né en 2006 par la construction illégale, sur une parcelle vide de Miami, d'un village auto géré pour sans-abris. L'incendie qui l'a ravagé aurait pu marquer la fin pour le mouvement, mais la crise en a décidé autrement. Vidant des quartiers entiers de Miami, elle est devenue une opportunité pour le mouvement qui loge aujourd'hui des familles dans les maisons vides saisies par les banques.
"Jeudi noir" est un collectif de jeunes Parisiens, issus des mouvements de jeunes précaires, souhaitant obtenir un logement décent à Paris. Après des actions médiatiques au cours de visites groupées de studios, ils se mettent à squatter des immeubles vides dans les beaux quartiers à Paris, logeant étudiants et artistes, et cherchant à sensibiliser l'opinion et les pouvoirs publics.
Bien qu'issus de contextes extrêmement différents et qu'ils soient idéologiquement éloignés, ces deux mouvements ont en commun d'être des « nouveaux mouvements sociaux », liés à un territoire particulier, et adeptes de la désobéissance civile. D'autre part ils sont extrêmement médiatiques, compte tenu de leur faible poids, parvenant à apparaître dans les médias nationaux et internationaux. Ils ont une capacité de mobilisation importante, et une volonté de peser sur le débat public, d'être visibles.
Comment les autorités municipales et les mouvements d'occupation illégale de logements interagissent-ils ? Quelles sont les stratégies mises en place par ces acteurs ? Quel est l'impact des mouvements pour le logement à Paris et Miami ?
[...] Pour ce mouvement l'Etat est directement responsable de la crise de logement, ne jouant pas son rôle de régulateur du marché, mais au contraire favorisant, via la banque fédérale, le boom de l'immobilier. Cette analyse rejoint la vision de Logan et Molotch dans Urban Fortunes, selon qui les municipalités et l'Etat, en souhaitant créer la croissance, favorisent les intérêts des promoteurs. C'est ce que Jeudi Noir condamne à travers les dépenses publiques faites en faveur des propriétaires En France au contraire c'est l'Etat qu'il faut convaincre, et c'est l'Etat qui a le pouvoir de changer les choses. [...]
[...] Reportage de la chaîne de télévision PBS TV, “Homes for the Homeless ? diffusé le 26 juin 2009.http://www.pbs.org/now/shows/526/index.html ou http://takebacktheland.org/ M. Rameau, Gentrification is dead juillet 2008 http://www.thepanafrican.org/images/misc/Gentrification%20is%20Dead.pdf http://www.jeudi-noir.org/ et http://takebacktheland.org/ Le Monde Diplomatique, La crise vue des Etats-Unis ; en Floride, l'éternel espoir du rebond Olivier Cyran, 1er août 2009. The Times “Campaigning squatters fight for right to stay in £18m Parisian mansion; France”, Adam Sage janvier 2010 ; Denis Merklen, Quartiers populaires, quartiers politiques, La Dispute, Paris A. [...]
[...] Tout d'abord, elle est en charge de la planification des nouveaux développements sur son territoire. De façon plus importante, elle dispose d'une agence qui a pour objectif la revitalisation des espaces les plus déshérités, et dont une mission est de faciliter le développement de logements abordables ce qui peut inclure la réalisation directe ou indirecte de logements. La situation est plus complexe à Paris, puisque d'une part l'Etat est directement responsable de la politique de logement, et d'autre part parce que le nombre d'acteurs du logement est sensiblement plus important (le site de la mairie de Paris recense 11 financeurs institutionnels et 6 bailleurs sociaux[9]). [...]
[...] Rameau Max, Take Back the Land; Land, Gentrification and the Umoja Village Shantytown Miami, Nia Press. Ibid. Le Monde Diplomatique, La crise vue des Etats-Unis ; en Floride, l'éternel espoir du rebond Olivier Cyran, 1er août 2009. Collectif Jeudi Noir, Le petit livre noir du logement La découverte, page 154 Collectif Jeudi Noir, Le petit livre noir du logement La découverte, page 155 Rameau Max, Take Back the Land; Land, Gentrification and the Umoja Village Shantytown Miami, Nia Press ; page 45 : agreed that an all-african group must provide political leadership for the solution to the problems in the African (black) community, but that we were free to work with non-balck groups and dividuals, provided they were willing to operate under black leadership”. [...]
[...] S'il est vrai que les mouvements pour le logement n'atteignent pas toujours leurs objectifs affichés, il n'en demeure pas moins qu'ils font partie de l'ensemble d'acteurs qui produit la ville, à Miami comme à Paris. Ils prouvent l'importance de l'informel dans la prise de décision, et le potentiel de petits groupes organisés à influer sur la mise en œuvre de ces décisions. L'action publique répond à différentes rationalités ; comprendre les priorités des acteurs publiques, affichées ou officieuses est donc impératif pour les nouveaux mouvements sociaux qui, représentant efficacement leur communauté et jouant sur la concurrence entre ces différents acteurs qui font la ville, peuvent défendre leurs intérêts. [...]
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