En France, une femme sur dix est régulièrement victime de violences au sein du couple. Or il n'existe pas de donnée disponible sur le pourcentage de femmes qui quittent leur conjoint violent. L'accueil d'urgence est souvent le premier pas, la tentative ultime des femmes victimes pour briser le silence des violences. Les acteurs du premier secours sont ainsi très souvent confrontés à des situations de femmes en errance suite à des violences au sein du couple. Une étude publiée par la FNARS montre que les centres d'accueils doivent s'adapter à la problématique des femmes victimes de violences qui arrivent dans des structures d'urgence pour qui le choix de quitter le domicile conjugal n'est pas encore définitif. Les travailleurs sociaux doivent les accompagner dans ce travail de réflexion, en leur laissant l'opportunité de pouvoir faire des allers retours entre la structure et chez elles. Par expérience, les professionnelles accueillant ce type de public, savent qu'il faut du temps à une femme victime pour refuser ce statut et pour envisager la rupture avec l'auteur des violences, dans un contexte de contraintes multiples (manque de ressources, présence d'enfants...).
En effet, d'après Marie France Hirigoyen, les ruptures se déroulent en plusieurs étapes : les femmes quittent leur conjoint violent une première fois puis retournent à ses côtés. Elles répètent ce processus plusieurs fois avant de rompre définitivement. D'après Emmanuelle Millet une femme a souvent besoin de temps, de départs et de retours, de séparations et de retrouvailles.
Moi-même lors d'un stage de deuxième année en CHRS, j'ai pu échanger avec un travailleur social ayant travaillé pendant plusieurs années dans un centre spécialisé pour femmes victimes de violences conjugales. Au début de sa carrière cette professionnelle vivait très difficilement les allers et retours des femmes victimes de violences conjugales. Elle avait notamment le sentiment que tout le travail d'accompagnement qu'elle avait mis en place avec ces femmes n'avait servi à rien. Mais elle m'expliqua qu'au fil de son expérience, elle s'est rendu compte que ces allers retours étaient souvent un passage obligatoire, pour que la femme consolide sa détermination à quitter définitivement son conjoint violent. Dès lors, selon ce travailleur social, ces multiples allers retours constituaient une nécessité psychologique pour les femmes. Ceci afin qu'elles aillent au bout des tentatives de restauration du couple, avec en arrière plan une conviction qu'elle pouvait le changer ou que le fait de rompre la cohabitation avec son conjoint n'était pas une solution pour ses enfants. Elle m'expliqua en outre, que les femmes qui retournent vers les travailleurs sociaux, se sentent honteuses et culpabilisent. Elles ont le sentiment qu'elles ont mis à mal tous les efforts déployés par les travailleurs sociaux pour faire les démarches de reconstruction (...)
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