Parmi la population de l'enfance en danger, les mineurs isolés étrangers forment une catégorie aux difficultés bien spécifiques. Issus généralement de Chine, d'Afrique, d'Inde, du Pakistan ou encore des pays de l'Est, non francophones pour la plupart, ils ont vécu des situations souvent traumatiques. A leur arrivée en France, ils vivent une perte de repères culturels massive et se retrouvent en proie à d'importantes difficultés d'ordre psychologique et affectif.
Les retards et les obstacles dans l'apprentissage de cette nouvelle langue qu'est le français constituent sans doute autant de révélateurs symboliques et symptomatiques de l'ensemble de ces difficultés. Parce que la langue est, comme le dit l'historien Fernand Braudel, « un marqueur de l'identité », sa forme et son rythme d'acquisition tendent à souligner la personnalité, les problématiques, les regrets et les espoirs de ces jeunes étrangers, et à faire surgir les enjeux de leur prise en charge. La langue, pourtant, est rarement un objet d'étude pour l'éducateur, qui trop souvent ne voit dans son apprentissage qu'un processus mécanique, du ressort exclusif de l'enseignant, et un simple pré requis indispensable à l'intégration.
Ce mémoire d'éducateur spécialisé s'est construit à travers l'observation de situations de vie et les questionnements autour d'une pratique personnelle.
Que représente l'apprentissage de la langue française pour des adolescents étrangers ? Quels obstacles, quelles réticences, quelles capacités, quels besoins, quelles envies entrent en jeu dans cette acquisition ? Quels sont, en somme, les enjeux et les difficultés suscités par un apprentissage linguistique ? Surtout, cet apprentissage de la langue française chez les mineurs isolés étrangers peut-il être favorisé par une prise en charge spécifique ?
[...] Certains jeunes s'investissent alors énormément, en terme de temps et d'ardeur, dans l'apprentissage linguistique, refusant même de communiquer dans leur langue maternelle avec des compatriotes. A l'inverse, pour certains la langue française peut avoir une connotation négative, symboliser une domination, signifier la perte de sa propre culture Il faut sans doute attribuer à cette attitude sociale, même si elle ne suffit évidemment pas à expliquer les succès d'un apprentissage, une importance bien plus grande dans l'acquisition que les éléments purement cognitifs. [...]
[...] A travers l'apprentissage de la langue, c'est à ce cheminement identitaire que doit travailler l'éducateur. Car un des enjeux éducatifs de l'apprentissage de la langue, et non des moindres, c'est justement d'accompagner ce passage entre le deuil du pays d'origine et le désir d'intégration dans le pays d'accueil et désir d'intégration Si ces jeunes ont vécu des expériences très douloureuses dans leur pays et sont souvent arrivés en France dans des conditions rocambolesques, beaucoup d'entre eux ne manquent néanmoins pas de repères et paraissent particulièrement matures et décidés à tout mettre en œuvre pour réussir leur insertion. [...]
[...] Si les situations et les comportements sont tous différents, on peut dire, au terme de cette troisième partie, qu'ils se rejoignent cependant autour de deux caractéristiques communes. En effet, les mineurs isolés étrangers en situation d'apprentissage linguistique se trouvent confrontés en définitive à deux grands enjeux fondamentaux, sources de difficultés plus ou moins intenses. Premièrement, l'apprentissage de la langue engage un remaniement de l'identité culturelle. On l'a vu, à travers l'acquisition du français, ces adolescents en situation migratoire doivent parvenir à évoluer, à changer de système d'identification, de culture. [...]
[...] Les retards et les obstacles dans l'apprentissage de cette nouvelle langue qu'est le français constituent sans doute autant de révélateurs symboliques et symptomatiques de l'ensemble de ces difficultés. Parce que la langue est, comme le dit l'historien Fernand Braudel, un marqueur de l'identité[2] sa forme et son rythme d'acquisition tendent à souligner la personnalité, les problématiques, les regrets et les espoirs de ces jeunes étrangers, et à faire surgir les enjeux de leur prise en charge. La langue, pourtant, est rarement un objet d'étude pour l'éducateur, qui trop souvent ne voit dans son apprentissage qu'un processus mécanique, du ressort exclusif de l'enseignant, et un simple pré requis indispensable à l'intégration. [...]
[...] Ils ont passé la frontière comme ils ont pu : en train, bateau ou avion, comme voyageurs réguliers, ou clandestinement, recroquevillés dans des embarcations de passeurs, accrochés aux châssis de camions, parfois tout simplement à pied. Pour certains d'entre eux, le voyage n'a duré que quelques jours ; d'autres, lorsqu'ils arrivent, sont depuis des mois voire des années sur les routes de l'exil[13] Ces jeunes ont parfois fait leur voyage seul, ou avec un accompagnant dont les intentions sont plus ou moins louables. Ils viennent rejoindre des compatriotes ou bien se retrouvent livrés à eux-mêmes sur le territoire. [...]
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