La relation éducation-salaire continue de susciter de nombreuses controverses
théoriques et les débats visant à la saisir statistiquement ne sont pas des moindres.
L'amélioration du modèle de base de Mincer (1974) dans le cadre de la méthode
d'instrumentation de la variable éducation permet d'apporter davantage d'informations dans
l'estimation des fonctions de gains. L'éducation, à travers l'accumulation du capital humain,
présente un impact positif sur les salaires qui sont croissants avec le niveau d'éducation au
Cameroun. Par ailleurs, la prise en compte des emplois salariés et des emplois indépendants
permet d'obtenir des rendements élevés pour des niveaux d'éducation élevés mais montre un
effet négatif sur la propension à s'établir à son propre compte. Plutôt qu'un choix, s'installer à
propre compte semble être le seul moyen de survie de certains individus, mêmes diplômés.
Les ressources humaines se trouvant au centre de la promotion de l'économie
nationale à travers la formation et le perfectionnement, les discours politiques sur l'éducation
depuis les indépendances ont présenté ce secteur comme indispensable dans les pays en voie
de développement. A cet effet, dans les années 1950-1960, les phénomènes de croissance, singulièrement dans les pays développés, occasionnent des débats tournant autour des
priorités et des interrogations à la base de la théorie du capital humain. Cette dernière est
présentée comme une réponse à deux énigmes majeures, celle de la croissance économique,
d'une part, et celle de la formation et de la distribution des revenus individuels, d'autre part.
Au Cameroun, comme dans la plupart des pays développés et en développement, le
phénomène du chômage et particulièrement celui des jeunes a été attribué à la "malformation"
de la main-d'oeuvre et d'une manière générale à l'inadéquation entre formation et
emploi. Mais nous pouvons noter avec le Professeur Bekolo Ebe (2001) que le drame de
l'Afrique c'est d'abord qu'au fil des années, sa capacité d'investissement du capital humain
est allée se détériorant, faisant un véritable bond en arrière, dont rend compte le
dépérissement des systèmes éducatifs. Dans le cadre des politiques d'ajustement structurel, les
dépenses d'éducation ont rapidement fait les frais du rétablissement des grands équilibres, au
moment même où dans les autres continents, les efforts étaient décuplés et que se mettaient en
place des programmes de soutien et de développement de la formation. Aussi une thérapie
énergique du système de formation aurait donc tôt fait de résoudre les problèmes posés par le
fonctionnement imparfait du marché du travail. Mais au regard des situations de crise que
connaissent certains pays dont le Cameroun, persiste un discours anti-école dans lequel la
formation, quelle qu'elle soit, conduit au chômage et est loin de mériter l'effort qu'elle
nécessite. Il y a donc lieu de s'interroger sur l'appréhension de la relation formation-emploi
qui apparaît souvent dans les discours incantatoires et conséquemment sur la rétribution de
l'investissement inhérent à cette formation.
Alors que la théorie du capital humain semblait trouver une confirmation à
l'explication de ses hypothèses telles que l'influence de l'éducation sur le salaire, ou
l'influence de l'éducation sur la croissance économique, la concomitance de l'accroissement
du chômage et de l'élévation du niveau de formation de la main-d'oeuvre la remet en cause. Il
en ressort qu'une société en crise implique une remise en cause théorique pour laquelle les outils conceptuels et les schémas interprétatifs utilisés en période d'expansion se trouvent
contestés. Face à cette situation de confusion tant sur le plan théorique que sur le plan
empirique, un effort de réorganisation voire de production d'analyses complémentaires
s'impose comme en préalable à l'énoncé des propositions de politiques économiques.
Sur le plan microéconomique l'élévation du pouvoir d'achat des salariés suggère que
la main-d'oeuvre devienne plus productive dans le temps non seulement parce qu'utilisant
des équipements plus performants, mais aussi parce qu'elle est de mieux en mieux formée. La
hiérarchie des salaires se calque ainsi sur les diplômes obtenus et l'expérience accumulée.
Selon la théorie du capital humain, on investit dans les hommes autant voire
d'avantage que dans les machines. L'individu formule plus ou moins explicitement sa
demande d'éducation en tenant compte des perspectives offertes sur le marché du travail,
particulièrement en matière salariale.
L'héritage de la colonisation, la volonté de contrôler la création des richesses afin de
mieux les redistribuer entre les élites au pouvoir et la nécessité de construire une
infrastructure institutionnelle ont conduit la plupart des Etats africains à développer un large
secteur public (productif et non productif) ; ce dernier s'inscrivait dans un contexte favorable
permettant l'absorption d'un nombre croissant de jeunes diplômés. Entre 1980 et 1990 au
Cameroun, le processus de croissance économique a été considérablement ralenti et traduit le
déclin de la production, l'accroissement du chômage, l'inflation et le déséquilibre des
paiements courants. Cette déstabilisation de l'économie camerounaise, aggravée par la
faiblesse administrative et institutionnelle à gérer la crise explique la signature par le
Cameroun des accords du premier Programme d'Ajustement Structurel (PAS) et du
Programme d'Aide à la Gestion Economique (PAGE) en juillet 1989.
Les programmes d'ajustement structurel, soulignons-le, remettent en cause
l'intervention de l'Etat dans les domaines économique et social, par le biais d'une régulation
conjoncturelle et d'une normalisation structurelle et s'efforcent de rechercher un ordre social
par le marché. L'Etat est ainsi conduit au désengagement et les mutations du marché du
travail sont marquées par l'explosion des taux de scolarisation, la croissance du chômage et la
baisse des taux de rémunération.
Cet article a pour objectif de présenter dans sa première partie, les caractéristiques de
la relation formation – emploi au Cameroun à travers des fonctions de gains qui prennent en
compte le caractère endogène de l'éducation pour évaluer les rendements des différents niveaux de formation (I). Dans une deuxième partie, nous envisageons une distinction des
emplois salariés et des emplois indépendants dans le souci d'identifier les phénomènes entrant
dans le processus de formation du capital humain et des salaires et de dépasser les estimations
traditionnelles des rendements du capital humain (II).
[...] Mots clés : Education, Salaire, Instrumentation, Taux de rendement, Emploi Indépendant, Capital Humain. Classification JEL : J6, J24, J31. Les ressources humaines se trouvant au centre de la promotion de l'économie nationale à travers la formation et le perfectionnement, les discours politiques sur l'éducation depuis les indépendances ont présenté ce secteur comme indispensable dans les pays en voie de développement. A cet effet, dans les années 1950-1960, les phénomènes de croissance singulièrement dans les pays développés, occasionnent des débats tournant autour des priorités et des interrogations à la base de la théorie du capital humain. [...]
[...] Il en est de même pour le secteur d'activité, notamment formel qui a une contribution sur le salaire de l'ordre de 3,6%. S'il est évident de constater que l'économie camerounaise permet facilement de dégager une dichotomie formel/informel, nous pouvons aussi distinguer l'emploi salarié de l'emploi à propre compte ou indépendant. Nous allons, dans le cadre du paragraphe suivant, nous intéresser à ce dernier clivage emploi salarié/emploi indépendant. Mais, à la différence de bien d'auteurs (Magnac et Robin, 1990c ; Earle et Sokova ; Dunn et Holtz-Eakin, 2000), nous nous intéresserons non pas aux transitions du salariat vers l'indépendance, mais à la proportion d'individus occupant un emploi à propre compte. [...]
[...] A cet effet, suite aux travaux de Gary-Bobo et al. (2004) en France et sur la base de nos résultats précédents relatifs au test d'endogénéité, nous entendons faire une application de cette nouvelle technique d'estimations des rendements de l'éducation spécifiquement au Cameroun, dans le but de pouvoir corriger ce type de biais. Le principe repose sur deux phases pour corriger le caractère endogène de la variable éducation. D'abord, l'estimation d'une équation logarithmique classique ; ensuite, la spécification d'un modèle dans lequel sont introduites des variables de contrôle. [...]
[...] Les résultats de l'estimation des équations et peuvent nous permettre de calculer les espérances conditionnelles de gains dans l'emploi alternatif. En remplaçant le ˆ ˆ différentiel de gains espérés par sa prédiction (ln Yi EI ln Yi ES ) dans l'équation nous pouvons estimer le modèle structurel à l'aide d'un probit avec correction de l'hétéroscédasticité en utilisant l'expression (20). En effet, comme précédemment avec les rapports inverses de Mills dans les fonctions de gains, l'introduction d'une variable explicative aléatoire dans l'équation d'emploi, en l'occurrence la variable différentiel de gains espérés entre les deux types d'emplois, a pour effet de rendre la matrice de variancecovariance des coefficients de régression hétéroscédastique (Murphy et Topel, 1985). [...]
[...] (1961): "Investment in human capital", American Economic Review, vol.51. Schultz, T. P. (2004), "Evidence of Returns to Schooling in Africa from Household Surveys: Monitoring and Restructuring the Market for Education", Journal of African Economies AERC Supplement pp. ii95-ii148. ANNEXES 33 Tableau 9 : Durée moyenne d'instruction par catégories socioprofessionnelles et par statut de salarié ou non suivant le sexe Variables Catégories socioprofessionnelles Personnel de direction Cadre supérieur Cadre moyen/agent de maîtrise Employé/ouvrier qualifié Employé/ouvrier semi qualifié Manœuvres Apprenti/stagiaire rémunéré Patron Propre compte Apprenti/stagiaire non rémunéré Aide familial Ensemble Situation Salarié Non salarié Ensemble 8,74(4,80) 4,64(4,07) 6,19(4,79) 9,75(4,23) 3,55(3,61) 4,35(4,24) 8,97(4,69) 4,04(3,86) 5,33(4,63) 13,78(4,20) 17,06(3,21) 12,35(3,27) 9,05(3,82) 7,22(3,79) 5,81(3,53) 6,62(14,19) 7,15(5,17) 4,49(4,09) 6,12(2,68) 4,26(3,58) 6,19(4,79) 11,53(5,74) 17,35(3,63) 12,53(2,92) 9,94(2,90) 8,19(3,35) 6,71(3,23) 7,83(4,16) 6,80(4,59) 3,56(3,62) 7,02(2,31) 3,04(3,33) 4,35(4,24) 13,38(4,55) 17,13(3,30) 12,40(3,18) 9,28(3,63) 7,44(3,72) 5,98(3,49) 6,91(4,21) 7,05(5,00) 3,00(3,88) 6,48(2,57) 3,43(3,46) 5,33(4,63) Hommes Femmes Ensemble Nombre Les écarts types figurent entre parenthèses Source : ECAM DSCN12 Tableau 10 : Distribution des revenus individuels par catégorie socioprofessionnelle 12 Deuxième Enquête Camerounaise Auprès des Ménages (ECAM) effectuée par La Direction de la Statistique et de la Comptabilité Nationale (DSCN) en Salariés du secteur moderne Revenus* [...]
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