L’accueil d’autrui en structure petite enfance : de la rencontre à la responsabilité

Résumé du document

Le thème de ce mémoire, présent en moi depuis de nombreuses années, a toujours suscité mon intérêt à travers mes différentes expériences professionnelles. Je vous présente aujourd'hui le fruit du travail d'élaboration qu'il a suscité tout au long de ma formation d'Educateur de Jeunes Enfants.
Parler de l'Accueil en structure petite enfance, c'est parler de l'accueilli et de sa famille, mais c'est aussi parler de l'accueillant, et des effets de cet Accueil sur les uns et les autres. S'il est si souvent usité, ce mot Accueil, que j'écris avec un grand A pour en souligner l'importance, peut être mis à toutes les sauces ; et s'il est si souvent discuté en formation ou en équipe, c'est bien parce que l'intérêt qu'il suscite n'est pas neutre et que la question de l'Accueil des enfants et de leurs parents invite toujours à de nombreuses interrogations. Il ne s'agit pas seulement de le parler mais de le penser, de le réfléchir en équipe.

Tout au long de ce travail, je vais exposer au lecteur mes observations réalisées sur deux crèches ; une crèche hospitalière d'une capacité d'accueil de 40 enfants, et une autre municipale pratiquant le multi accueil, d'une capacité de 70 enfants.
Je vais tenter d'expliquer comment sur deux lieux sensiblement identiques quant à la prise en charge institutionnelle des enfants, les modalités d'accueil divergent et peuvent avoir des incidences différentes sur le comportement des enfants et sur leur développement, ainsi que sur le travail d'une EJE au sein d'une équipe pluridisciplinaire.
A partir de deux façons différentes de penser l'accueil, je propose d'analyser leurs conséquences sur les relations établies entre adultes accueillants et enfants accueillis, et je vais m'interroger sur le rôle, la fonction d'accueillante, et sur les compétences nécessaires pour une éducatrice de jeunes enfants lors de l'Accueil.

Extraits

[...] Cette fonction contenante que D. Mellier qualifie de position éthique à conquérir, liée à la nécessité d'accueillir l'altérité absolue de chaque enfant.[22] L'institution qui pose un cadre assure cette fonction de contenance des anxiétés du bébé, des angoisses parentales et de celles du personnel de la crèche. C'est au nom de ce cadre que travaille l'EJE dans la compréhension des effets de l'accueil sur les enfants et leurs familles accueillis. Dans le cadre de stages effectués pour cette formation et sur d'autres lieux professionnels, j'ai pu percevoir combien ce travail d'accueil est difficile et souvent mal compris par le personnel quant à son importance pour l'enfant et ses parents. [...]

[...] Le mot désigne donc le fait de venir le premier. L'éducatrice de jeunes enfants est au premier rang de cette prévention puisqu'elle est mandatée pour agir dès le plus jeune âge. Il s'agit donc de reconnaître les compétences d'une éducatrice en terme de prévention de tout dysfonctionnement qui pourrait entraver le développement physique, psychoaffectif et intellectuel des enfants accueillis en structure petite enfance. La qualité de l'Accueil proposé au quotidien aux enfants et à leur famille est garante de cette prévention en accueillant l'enfant et ses parents dans la singularité de leur histoire et avec le respect dû à chacun. [...]

[...] Cette dimension de sujet, du latin subjetctum dont le sens premier est chose qui a une nature propre est-ce qu'il m'importe de faire naître ou plutôt de faire advenir dans mon travail d'éducatrice. Accueillir c'est aussi une fonction, une posture, une relation privilégiée que l'on s'autorise avec autrui qu'elle soit positive ou négative dirait D. Mellier. Le paradoxe de la fonction d'accueillante c'est d'assurer à l'enfant une continuité (entre les personnes, les lieux et les moments) dans des temps de discontinuité (temps et disponibilité de l'accueillante), de séparation (enfants parents) et de différence (conceptions éducatives de chacun). [...]

[...] C'est aussi son prénom, la façon dont il sera nommé, connu, re-connu qui permettra à l'enfant,petit à petit, cette construction identitaire, cette place de sujet. C'est son corps qui constitue pour le bébé la base de son identification. Il se découvre lui-même au travers de ses perceptions, de ses actions, mais aussi dans son rapport aux autres et dans le regard des autres. Avant même sa naissance, l'enfant existe dans l'imaginaire et le discours de ses parents, cette première place l'inscrit déjà comme individu, comme sujet qui advient. [...]

[...] Il y a une séparation stricte du dedans et du dehors, pour lutter contre la contamination microbienne. Les parents déposent leur enfant nu par un guichet, sans entrer dans les autres locaux. Ils n'ont de contact qu'avec la directrice, le personnel est en blouse blanche et le travail est routinier. Les enfants sont baignés dès leur arrivée et vêtus d'un uniforme fourni par la crèche. Jusque dans les années 65, certaines crèches fournissent même la soupe du soir aux mères. [...]