Le débat sur l'institution d'un service minimum n'a pas uniquement lieu dans les cercles juridiques, puisqu'il s'agit non seulement d'un thème récurrent de la sphère politique mais aussi d'un projet de réforme très majoritairement soutenu par l'opinion publique française . Cependant, malgré ce soutien fort, le sujet semble rester trop sensible politiquement pour se voir concrétisé. Ainsi, entre 1988 et 2003, 11 propositions de loi ont été déposées sur les bureaux des deux Assemblées, sans résultat. La position française est d'autant plus étonnante que sept Etats de l'Union européenne (Italie, Espagne, Grèce, Portugal, Finlande, Suède, Belgique) dispose d'une législation instaurant un service minimum, et que pour d'autres, le régime du droit de grève des agents publics est soit extrêmement limitatif (Royaume-Uni) soit purement et simplement interdit (Autriche, Allemagne, Danemark).
En étudiant les fondements juridiques de l'obligation de service minimum et les obstacles qui pourraient empêcher la mise en place de ce dernier en France, nous essaierons de comprendre la particularité de la situation française – si elle existe – et de déterminer par quelles procédures et sous quelles formes le respect du principe de continuité du service public serait possible en conformité avec le droit de grève.
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[...] Quel service minimum ? En termes politiques, deux contraintes pèsent sur le législateur : En premier lieu, il ne peut imposer à l'exercice du droit de grève que les restrictions nécessaires au regard des exigences constitutionnelles qui servent de fondement à ces limitations. À cette fin, il doit définir le seuil d'un service optimal que les usagers sont en droit d'attendre, ce qui sera vraisemblablement à nouveau l'objet d'âpres discussions. En second lieu, l'institution d'un régime de service minimum devra prendre en compte l'émergence de la concurrence dans des domaines de plus en plus larges. [...]
[...] Pourtant, l'Italie, qui est très proche de la France en termes de culture sociale (grèves à répétition, pluralisme syndicale, négociations délaissées au profit du conflit, etc.), a réussi à mettre en place un régime de service minimum efficace depuis 1990. D'autre part, parallèlement aux débats sur l'instauration d'un service minimum se développe la thématique du service maximum fondé sur la prévisibilité des conflits sociaux dans les services publics et sur les mécanismes d'alarme sociale tels que celui institué par la RATP par un accord collectif de 2001. Ainsi, la nécessité d'un service minimum se ferait moins sentir, dans la mesure où le travail des non-grévistes serait optimisé. [...]
[...] De ce fait, l'Etat doit pouvoir s'appuyer sur l'obligation d'un service minimum imposé aux fonctionnaires. Pourtant, il n'existe pas en France de législation qui précise et limite de façon générale et complète le contenu et les conditions de l'exercice du droit de grève des agents de l'Etat. Or le débat sur l'institution d'un service minimum n'a pas uniquement lieu dans les cercles juridiques, puisqu'il s'agit non seulement d'un thème récurrent de la sphère politique mais aussi d'un projet de réforme très majoritairement soutenu par l'opinion publique française[2]. [...]
[...] 81% des Français y seraient favorables selon le Rapport de Robert Lecou sur le service minimum dans les services publics européens (Assemblée nationale). Décision Dehaene La jurisprudence administrative contrôle notamment que l'autorité responsable a fixé avec précision la liste des personnes auxquelles le droit de grève est retiré et que la présence de ces agents est bien indispensable pour assurer les éléments du service dont l'interruption porterait atteinte aux besoins essentiels du pays Ces besoins essentiels sont la préservation de la sécurité des personnes ou des locaux, le maintien de l'ordre public, ou la sauvegarde de services essentiels. [...]
[...] Cependant, elle a également encouragé la paresse du législateur en le dissuadant, au final, d'intervenir dans une matière dont il a la compétence exclusive. De plus, en cas d'urgence, il est admis que le Gouvernement puisse lutter contre les effets d'une grève des agents publics par la réquisition (loi du 11 juillet 1938 ; CE 9 décembre 2003, Alliguon), à condition que celle-ci ait fait l'objet d'un décret en Conseil des Ministres, même si celui-ci est postérieur à la réquisition. [...]
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