Aux crises économiques et idéologiques, s'ajoute aujourd'hui une troisième crise de l'État providence, de nature plus philosophique. Cette crise, intrinsèquement liée à une nouvelle donne sociale, ébranle l'État-providence dans ses fondements. Face à la faillite annoncée de la société assurancielle, c'est le contrat social dans son ensemble que Rosanvallon propose de repenser, dans le sens d'une énonciation d'un droit à l'insertion
[...] L'intérêt de cet ouvrage est de donner une dimension économique et sociologique à un phénomène particulièrement préoccupant. Si dans une certaine mesure, Rosanvallon a pressenti avec justesse certaines évolutions, comme la perte de pouvoir des partenaires sociaux dans la gestion des organismes de protection sociale et l'extension des prérogatives du Parlement, ou la mise sous conditions de ressources de certaines prestations (les allocations familiales de façon très éphémère en 1997) c'est la dimension sociologique de son analyse qui semble ici pécher. [...]
[...] L'évolution de la fiscalisation des dépenses sociales est de plus en plus importante et donne raison à l'analyse de Rosanvallon (qui date de 1995). La CSG, avec un taux de pour les revenus de transferts) rapporte aujourd'hui plus que l'impôt sur le revenu, tandis que la CGDS a été créée pour rembourser la dette sociale. Pour ce qui est des prestations, la place prise par la logique de solidarité est particulièrement flagrante pour ce qui est des allocations chômage. Le nombre des chômeurs de longue durée ou des ceux qui ne peuvent pas prétendre à l'indemnisation chômage au titre de leurs cotisations, est aujourd'hui largement pris en charge par l'État. [...]
[...] C'est le sens civique revitalisé et non plus le seul voile d'ignorance qui fonde le système nouveau de solidarité. Cela suppose néanmoins de dramatiser le contrat social, pour que la solidarité devienne le lien social et le nouveau ciment collectif. Le déclin de la société assurancielle impose une redéfinition du rôle social de l'État et un glissement de l'État providence assuranciel à un État solidariste. En substituant la figure du contribuable à celle de l'assuré social, c'est vers un nouveau mode de gestion du social que l'on s'oriente. [...]
[...] La crise du système de protection sociale tient en partie à cette confusion. Pour autant, comme le souligne Rosanvallon, " si l'assurance est plus une technique et la solidarité plus une valeur, elles ne sont nullement antithétiques : l'assurance est aussi un mode de production de la solidarité " ; ce qui signifie qu'il faut clarifier les responsabilités respectives de l'État et des partenaires et les champs de la solidarité et de l'assurance. Sans réduire le champ du social à l'exclusion et sans remettre en cause fondamentalement l'universalité des prestations, Rosanvallon estime qu'une sélectivité modérée des prestations pourrait aider à surmonter la crise financière du système de Protection sociale. [...]
[...] Le droit procédural se confond dans cette mesure avec la pratique de la justice L'enjeu sous- jacent est l'égalité des chances, fondement de la démocratie, qui doit aussi être repensée. La différenciation du social, dans le cadre d'un droit procédural doit pouvoir permettre la réalisation de ce principe d'équité. Le changement social commande une évolution de l'État-providence, c'est là un impératif autant philosophique que social. Commentaire L'essais de Pierre Rosanvallon est un ouvrage dense et complet qui aborde avec pertinence la problématique de la crise de la protection sociale liée à l'apparition du chômage de masse et à une modification des relations du travail. [...]
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