L’école et la rue : fabriques de la délinquance par Benjamin Moignard

Résumé du document

La comparaison de la France et du Brésil est inattendue puisqu'elle montre que le climat de violence est bien moindre dans les écoles brésiliennes comparées à la France.
Si dans le cas brésilien la délinquance semble rester à la porte de l'école, c'est au collège que les jeunes adolescents font leurs premières armes comme délinquants. En termes d'apprentissages (les violences en groupe, vols, racket, consommation de drogues, etc.) mais aussi en termes de constitution de bandes elles-mêmes. Les bandes des quartiers sont le fruit d'une ségrégation des élèves les plus faibles et les plus perturbateurs dans certaines classes au collège.

Ces bandes se construisent aussi sur des critères ethniques. C'est d'abord en se retrouvant dans les mêmes classes que ces jeunes nouent des relations et constituent des bandes délinquantes. Au sein des classes de niveau, on ne retrouve plus que des garçons aux comportements perturbateurs, en échec scolaire lourd, immigrés ou issus de l'immigration. Des collèges de quartiers populaires cernés de l'extérieur ? La violence à l'école en particulier est devenue depuis une bonne quinzaine d'années un thème porteur médiatiquement, propice aux jeux de mise en scène spectaculaire (classement des collèges et lycées par signalisation via le logiciel Signa).

Extraits

[...] L'école et la rue : fabriques de la délinquance par Benjamin Moignard La comparaison de la France et du Brésil est inattendue puisqu'elle montre que le climat de violence est bien moindre dans les écoles brésiliennes comparées à la France. Si dans le cas brésilien la délinquance semble rester à la porte à l'école, c'est au collège que les jeunes adolescents font leurs premières armes comme délinquants. En termes d'apprentissages (les violences en groupe, vols, racket, consommation de drogues, etc.) mais aussi en termes de constitution de bandes elles-mêmes. [...]

[...] Du quartier français à la favela brésilienne : un tour d'horizon De multiples appellations désignent les quartiers de relégation : quartiers sensibles, banlieue, ghetto, bidonville, barrois Autant de qualificatifs qui enferment les populations de ces quartiers dans un discours de sens commun teinté de misérabilisme et stigmatisant. La Roca : une favela carioca L'histoire des favelas à Rio de Janeiro transparait bien à travers celle de la Roca. Les premiers habitants arrivent aux alentours des années 1940 et regroupent des ouvriers. Elle subit des tentatives d'éradication mais les habitants résistent et la pauvreté s'accentue. [...]

[...] La rue devient un espace de socialisation avec ses codes, ses rites et ses langages. Cette sociabilité est structurée autour d'une même référence à la culture de rue revendiquée par les adolescents eux-mêmes. Défendre son honneur, assurer sa réputation, un enjeu central de la sociabilité adolescente Les adolescents français et brésiliens partagent le même attachement à l'honneur, en lien avec les valeurs de virilité, de force et de courage qui font référence dans les quartiers populaires. La violence apparaît pour ces jeunes un moyen de recours légitime qui est constamment réaffirmé au sein du groupe de pairs. [...]

[...] Dans le même temps, la répression est largement encouragée à partir des années 1990. Le nombre de détenus dans les prisons françaises double de 1991 à 2003, de même que celui des mineurs prévenus[3]. Le collège dans le quartier : un exemple français Les conséquences sociales des échecs et des succès scolaires ne cessent de s'alourdir avec la promotion du principe de l'égalité méritocratique des chances et de l'accès de tous aux études[4]. Le quartier populaire est pointé comme le responsable des difficultés rencontrées par l'institution éducative républicaine. [...]

[...] L'école comme fabrique délinquante ? Enseigner en milieu populaire exige pour nombre d'enseignants un exercice de resocialisation professionnelle liée aux décalages avec l'image initiale du métier, et à la confrontation à une réalité d'exercice qui peut être parfois difficile. La question de la surreprésentation de petits groupes d'élèves dans la délinquance et la violence dans les établissements scolaires est majeure et se trouve au cœur des discours des acteurs de terrain. Ces derniers soulignent systématiquement qu'ils rencontrent toujours les mêmes problèmes avec les mêmes élèves R. [...]