Après des études de lettres classiques à la Sorbonne, Roland Barthes (1915-1980), publie ses premiers textes dont le fameux Mythologies en 1957, recueil de 53 textes rédigés entre 1954 et 1956 au gré de l'actualité. Il se définit comme un sémiologue et ses travaux sont marqués notamment par l'influence de Ferdinand de Saussure.
Ferdinand de Saussure se propose d'utiliser la sémiologie, définie comme "la science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale" pour appréhender la langue. Dans son Cours de linguistique générale (1916) il tente de comprendre en quoi consistent les signes et quelles lois les régissent. Il établit que la langue est un ensemble formel de relations dans lequel chaque élément n'existe que par sa relation et son opposition à d'autres éléments. Il en déduit que la langue est en fait un système qui s'impose à ceux qui la manient.
Ferdinand de Saussure a eu une immense postérité puisqu'il est à l'origine d'un courant de pensée majeur, le structuralisme. A l'origine hypothèse linguistique, le structuralisme a servi de paradigme à une façon de penser notamment en anthropologie avec Claude Lévi Strauss, en philosophie avec Louis Althusser, ou encore en sémiologie avec Roland Barthes. Pour les structuralistes, les processus sociaux sont issus de structures fondamentales qui sont le plus souvent inconscientes. Ils mettent ces structures par la compréhension et l'explication de leurs réalisations sensibles, leurs "signes", pourrait-on dire, soit les pratiques et les croyances en vigueur.
Roland Barthes s'inscrit dans ce mouvement du structuralisme et va utiliser la sémiologie dans son analyse de la vie des signes dans la société. Il se concentre notamment sur l'étude des mythes et de leurs significations.
Il analyse également le phénomène même du mythe dans ses Mythologies. Selon lui le "mythe est une parole", en cela qu'il est à la fois un mode de signification et un système de communication. Il est un mode de signification dans le sens qu'il ne se définit pas par l'objet de son message mais par la façon dont il le profère, par sa signification. Le mythe est également un système de communication en cela qu'il est présent dans toutes les représentations qui structurent la société humaine, omniprésentes dans le discours ou dans les médias.
Roland Barthes va s'atteler à montrer que c'est l'idéologie bourgeoise qui a contribué a à façonner ce système de représentations qui contraint les individus dans une structure aliénante. Cette idée de la domination de la société bourgeoise en cela qu'elle maitrise le système mythique est une idée centrale chez Barthes. Il nous a semblé intéressant de l'approfondir.
Nous nous demanderons ainsi en quoi le mythe en tant qu'outil communicationnel est réutilisé par la classe bourgeoise pour contaminer l'ensemble des représentations et asseoir sa domination (...)
[...] Ainsi briser l'aliénation du monde opérée par le mythe c'est nommer les choses selon leur essence propre, c'est d'abolir l'hypocrisie d'une idéologie, c'est de rétablir l'identité politique du monde afin de lui donner sens. Ainsi Barthes dans Le pauvre et le prolétaire montre que la force de Brecht c'est de penser la Révolution comme une lumière, une révélatrice de sens, un éveil de la conscience opprimée. Charlie Chaplin incarne l'Homme seul qui n'a pas conscience de son aliénation, qui est aveuglé par l'idéologie et totalement mystifié. Pour Roland Barthes un art qui détruit le mythe c'est montrer le producteur hors de la révolution. [...]
[...] La naturalisation de la domination de l'idéologie bourgeoise Roland Barthes définit la propension du mythe à naturaliser le concept. Pour se défendre de toute critique et de toute remise en question le mythe se légitimisme en se naturalisant. Il transforme alors l'histoire en nature, devenant à la fois imperfectible et indiscutable. Rien ni personne ne peut rien rétorquer face au mythe, il est là intemporel et monolithique. On croit qu'il à toujours existé, qu'il a toujours été là. Le temps ni le savoir ne lui ajouteront rien, ne lui enlèveront rien, il restera tel qu'il est. [...]
[...] C'est ainsi que Barthes dit que le mythe est une parole excessivement justifiée On se pose pas la question de savoir quel changement, comme il s'opère et pourquoi. La seule chose que l'on affirme, comme une conviction intime, inébranlable, c'est qu'il incarne ce concept de changement. Le signifiant Obama devient alors aux yeux des consommateurs de mythe le souverain du signifié changement Pour dépasser le mythe, selon Roland Barthes il faut donc avant tout le comprendre et le lire. On peut alors dévoiler la réalité dans laquelle les hommes sont plongés : cette fausse Nature crée de toutes pièces et aliénante. [...]
[...] Un autre procédé rhétorique permet également de renforcer la domination des représentations bourgeoises sur la société. Il s'agit de la vaccine, que l'on peut définir comme la propension à parler d'une partie d'un problème mais pas du problème dans son entier, laissant ainsi croire que l'on se préoccupe des sujets sensibles alors qu'il n'en est rien. On parvient à masquer la réalité du problème tout en laissant croire que la différence, la critique et la remise en question sont acceptées au sein de la société. [...]
[...] La pensée moderne a cessé de réduire le mythe à une simple Fable, à une pensée enfantine qui nous renverrait à l'étape pré-scientifique de l'Humanité. Pour les historiens des religions, les anthropologues, le mythe est d'abord un récit fabuleux, une histoire légendaire qui révèle l'imaginaire collectif d'une société. Mais le mythe explique surtout une création, un commencement, la genèse. Le mythe raconte une histoire sacrée, il relate un évènement qui a lieu dans le temps primordial, le temps fabuleux des commencements ( ) c'est donc toujours le récit d'une création Mircea Eliade. [...]
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