Le nouveau mot « flexsécurité » est prononcé par tous ceux qui portent un regard admiratif vers la politique de l'emploi menée par le Danemark durant les dernières années. En effet, grâce à un mélange inédit de flexibilité totale sur le marché du travail et d'indemnités très généreuses de chômage, assorties à des devoirs très stricts de la part du demandeur d'emploi, le Danemark semble avoir tenu le pari de l'activation des politiques de l'emploi, dans un contexte de décentralisation et de dialogue social consensuel assis sur des syndicats puissants et très représentatifs. Cette politique, initiée depuis 1994 et réformée en 2003, aurait permis au petit royaume de 5,4 millions d'habitants de passer d'un taux de chômage de 12% en 1994 à moins de 4,8% en 2005, avec un taux d'emploi extrêmement élevé (75%), en particulier chez les jeunes, les femmes et les séniors.
Pour autant, est-il juste de parler d'un « miracle danois »? N'a-t-il pas des revers et des risques dont ses partisans ne sont pas conscients? Cette embellie extraordinaire est-elle possible en France en adaptant les mêmes recettes, comme a pu l'affirmer une partie de la classe politique française et de nombreux économistes depuis 2004?
I/ Le système danois : une synthèse originale entre une approche libérale et interventionniste des questions d'emploi
II/ Sujet de fascination, le modèle danois est-il pourtant transposable en France?
[...] Autre particularité danoise : les chômeurs assurés et ceux qui relèvent de l'aide sociale (équivalent du RMI) sont soumis aux mêmes obligations. Les résultats de ces politiques d'activation paraissent très flatteurs : chômage inférieur à chômage de longue durée plus d'un an inférieur à 20% du nombre total de chômeurs, alors qu'il est supérieur à 40% en France. Autre effet paradoxal : soumis à ce régime de flexibilité compensé par des filets particuliers en cas de perte de l'emploi, les Danois éprouvent un sentiment d'insécurité face à l'emploi très inférieur à celui des Français. [...]
[...] II/ Sujet de fascination, le modèle danois est-il pourtant transposable en France ? Le modèle danois à ses limites Un grand nombre d'observateurs ont tenu à nuancer la portée du modèle danois en contestant son efficacité et son caractère exportable. - le système mis en place côute très cher du PIB danois est consacré aux politiques de l'emploi) et menacé par le vieillissement de la population, qui obligerait à de nouveaux prélèvements obligatoires dans un pays où ils sont déjà parmi les plus élevés au monde. [...]
[...] Les allocations chômage sont en effet conditionnées à de grands efforts de la part du demandeur d'emploi (recherche intensive de travail et suivi de formations), sans quoi il risque de les perdre totalement ou partiellement et de sombrer dans la pauvreté. En 2002, le gouvernement a présenté un programme de réforme du marché du travail intitulé Flere i Arbejde Plus d'actifs Dans la foulée des objectifs de Lisbonne (que le Danemark dépasse déjà pourtant en termes de taux d'activité), il a pour but de mettre une part encore plus grande des Danois au travail face au vieillissement de la population et à la nécessité de maintenir un système social très protecteur assis sur une base de cotisations assez large. [...]
[...] Le recours aux contrats aidés et la faible introduction d'éléments de flexibilité le montre en premier lieu. Certains éléments comme le durcissement des sanctions pour les chômeurs ne respectant pas leurs obligations ou l'évolution vers une politique de guichet unique se rapprochent toutefois du Danemark. Par ailleurs, l'introduction du CNE et l'échec de celle du CPE tend toutefois à montrer que des éléments de flexibilité sont en train d'être également introduits en France. Le modèle danois n'est certainement pas transposable en l'état en France : son adaptation supposerait des investissements extrêmement coûteux, une véritable révolution des mentalités, un syndicalisme plus pragmatique, et une acceptation de la part des salariés de voir la sécurité de pouvoir trouver facilement et rapidement un emploi en cas de licenciement remplacer celle de la protection de l'emploi acquis. [...]
[...] Le système danois dans ses grandes lignes - Tout d'abord, le Danemark a un des marchés du travail les plus flexibles d'Europe. Il faut laisser l'employeur libre d'embaucher et de licencier disait le ministre danois des Affaires Sociales à la fin des années 90. Dans les faits, cela signifie qu'une entreprise n'a aucune indemnité à verser quand elle licencie un salarié d'une ancienneté inférieure à 12 ans, le préavis pouvant être de quelques semaines selon des accords de branches. La loi ne fixe pas non plus de salaire minimum garanti : la quasi-totalité du droit du travail est issu de conventions collectives, ce qui est possible dans un pays où les syndicats sont puissants et représentatifs (près de 80% des danois sont syndiqués). [...]
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