Les inégalités sociales ont fait l'objet d'un nombre abondant de travaux universitaires. On en connaît aujourd'hui la dimension reproductive et cumulative, la dimension économique, politique et spatiale. Ce travail de mémoire entend interroger le dernier cas. Selon l'observatoire éducation et territoires, les inégalités socio-spatiales renvoient à une distribution des ressources qui contraint certains espaces à des accès limités aux services publics ou à l'emploi, à la différence d'autres territoires comme les métropoles où des phénomènes de concentration sont courants. Si elles ont été une constante dans l'histoire sociale, elles prennent une acuité nouvelle due aux pratiques néolibérales qui accélèrent le creuset entre les espaces3. Les inégalités sont aussi la cible de politiques publiques et de mobilisations pour les réduire.
[...] Cette recherche s'interroge sur les logiques d'action contre les inégalités spatiales. Certaines hypothèses ont été nécessaires pour centrer l'étude : tout d'abord que dans les quartiers les moins dotés en ressources sociales, culturelles et économiques, la mobilisation des habitants précédait l'intervention publique Cette hypothèse est importante car elle montre la « double peine » des espaces délaissés sur laquelle nous reviendrons longuement. Une seconde hypothèse interroge les manières dont l'expérience et le vécu de certains espaces parmi les moins dotés influencent les formes de la mobilisation et des conflits qu'elle implique. [...]
[...] On voit donc bien le fil conducteur de cette enquête : après avoir rendu compte des représentations et des émotions qui permettent la mobilisation pour une justice spatiale, nous étudierons les finalités que les enquêtés assignent et recherchent. Dans un dernier temps, nous reprendrons une démarche normative afin de fournir un panorama des solutions apportées. Il s'agit des mécanismes tels que la Street Law, programme institutionnel qui débuta à Saint-Ouen et à Champigny, et qui permettent une redéfinition de l'accès à la justice. Le programme entend « favoriser une prise de conscience citoyenne à partir de l'inégalité de traitement dans l'accès au droit sur un territoire ». [...]
[...] Modeste contribution à l'univers immense que constitue l'analyse de la justice, cette monographie entend mieux décrire les interactions et articulations locales en milieu populaire. [...]
[...] La première partie s'intéresse donc à l'étude de la littérature sur la justice sociale et spatiale. Elle se divisera en deux morceaux. D'un côté, nous étudierons les théories classiques de la philosophie morale et politique avant de rendre compte des avancés académiques sur l'articulation entre inégalités spatiales et justice sociale. Cet état de l'art nous permettra de saisir la polysémie des termes étudiés mais aussi les difficiles consensus qu'ils engagent de la part des intellectuels. La justice a toujours fait l'objet de nombreux débats philosophiques, au moins depuis les œuvres de Platon. [...]
[...] Les politiques de la ville ont fabriqué de nouvelles manières d'agir sur les espaces urbains les moins dotés en ressources. Certains chercheurs ont fait le lien entre la recherche académique et l'expertise politique, à l'instar de Kipfer et de Kirzsbaum. Ces deux auteurs ont produit plusieurs notes et évaluations tendant à faire évoluer les politiques publiques urbaines. Dans son article, Thierry Paquot revient sur l'émergence de ces politiques. En lien avec le développement de la consommation, les transformations sociales des citoyens et des formes d'emploi ont conduit à l'émergence des grands ensembles puis, rapidement, « les dysfonctionnements et les déceptions » poussent aux départs ceux qui le peuvent. [...]
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