Il semblerait que la population tsigane représente le bouc émissaire idéal : la détérioration des conditions de vie est souvent imputée aux étrangers. Les Tsiganes, qui se situent en bas de l'échelle sociale, sont les premiers que l'on accuse et que l'on vilipende, de par leur grande difficulté d'intégration. S'est créé autour d'eux une pensée collective des plus négatives : incultes, voleurs, violeurs, assassins ... Lorsque l'on s'intéresse d'un peu plus près à ces communautés, on se rend bien vite compte qu'en France, les Tsiganes sont une minorité (400.000, c'est-à-dire environ 0,6% de la population, dont 95% ont la nationalité française, et dont la grande majorité est aujourd'hui sédentarisée) que nous connaissons assez mal.
Comment peut s'établir une relation de confiance avec les Tsiganes ? Quel est notre rôle éducatif ? Peut-on vraiment rencontrer ces communautés peu ouvertes à l'extérieur ?
[...] Je suis Stéphane M., chef de service éducatif à l'association Rues et Cités, un club de prévention spécialisée qui travaille sur Montreuil, Bagnolet et Noisy-le-Sec. Ce club a la particularité depuis 50 ans de mener une action de prévention spécialisée avec les adolescents tsiganes. J'ai bien dit de prévention spécialisée, c'est-à-dire que je ne sépare pas l'action avec les ados tsiganes de l'action générale de l'association et que le type d'approche que nous développons est bien la prévention avec travail de rue, non institutionnalisé de la relation etc. [...]
[...] C'était une des missions que je m'étais fixées. Puis je me suis rendu compte d'abord qu'en dépit des dizaines de tentatives dans le monde y compris dans les pays communistes extrêmement durs à ce sujet, les enfants apprenaient à déchiffrer, mais oubliaient aussi vite, comme si la question de la lecture était totalement détachée de la question du déchiffrage. J'ai compris que lire c'est appartenir à une société de l'écrit, c'est prendre du plaisir à lire (les romans) les poèmes par exemple ou avoir besoin de lire (plan, mode d'emploi, papiers administratifs, etc. [...]
[...] Il n'y a pas d'aide sociale et de mode éducatif qui ne cherchent pas consciemment ou non à coloniser l'esprit des personnes en demandes. On imagine toujours l'intégration par la déculturation. Pourtant, je crois que l'adaptation des personnes de cultures différentes à la norme sociales est possible sans chercher la déculturation qui d'ailleurs ne marche pas. Les Tsiganes sont partis il y a mille ans des Indes s' ils devaient s'être gadjétisés après toutes les épreuves vécues on le saurait. [...]
[...] Renseignements administratifs, message personnel . On peut se demander, dans le sens inverse, c'est-à-dire, des gadjé vers les Tsiganes, quelles sont les formes d'échange ? Les messages spécifiquement adressés à la communauté tsigane, sont en général des lois exceptionnelles ou des contraintes liées à leur mode de vie spécifique. Ce message est ressenti comme pénible, il est symbolique d'une histoire lourde de l'exclusion. La crainte parfois irrationnelle de ce type de message est palpable aujourd'hui encore chez les Tsiganes. De façon plus ou moins perceptible persiste le sentiment qu'un courrier émanant de l'autorité publique, est toujours une menace. [...]
[...] Ces Tsiganes, qui ne sont plus des nomades par choix, sont retournés au nomadisme sous la contrainte. Lorsqu'ils sont expulsés, ils se contentent de s'installer ailleurs, et de s'atteler à nouveau, à la construction d'un nouveau campement. Dans ces campements, les tentes sont fabriquées avec des bâches et des branchages, il n'y a ni toilettes ni électricité, le tout dans des pays qui figurent parmi les plus riches du monde. Le comportement des autorités enfreint les droits de l'homme les plus fondamentaux, or, à quoi mesure-t-on le degré de civilisation d'un pays si ce n'est à la façon dont il traite les plus fragiles? [...]
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