De nos jours, si l'on interroge au hasard plusieurs personnes dans la rue au sujet de ce que représente pour elles leur travail, bien rares seront celles qui, spontanément, en feront l'éloge. Le plus souvent en effet, le travail apparaît aux hommes comme une contrainte, un asservissement faisant d'eux des ‘bêtes de somme'. Plus encore, cette dernière expression illustre de façon particulièrement juste la dimension aliénante, déshumanisante même que revêt fréquemment l'idée de travail aux yeux de la majorité des individus : car les hommes, par le travail, semblent se sentir abrutis au point d'en oublier leur identité, comme si la course à la productivité régissant actuellement le monde du travail finissait par faire des êtres humains de simples outils de production, et ce à l'instar des esclaves des sociétés grecques ou romaines. Rien d'étonnant alors à ce que désormais, l'homme s'auto-définisse à sa façon d'occuper son temps libre…
Mais ce temps libre n'est-il pas acquis – chèrement et durement il est vrai – grâce, précisément, au travail ?Car l'homme, à l'inverse des animaux, produit ses moyens de survie, ou du moins y accède grâce au capital qu'il aura par son travail amassé ; plus encore, il travaille également afin de pourvoir à son envie de confort, et aussi afin de pouvoir faire ce dont il a envie lorsqu'il ne travaille pas…En ceci, le travail semble donc définir l'humain en opposition avec l'animal. Or, avant toute chose, l'homme se veut libre…
Comment expliquer ce rapport schizophrénique, paradoxal, de l'homme au travail ? Le travail est-il asservissant par essence, ou bien la dimension asservissante du travail ne se manifeste elle que lorsque certaines conditions ou modalités de ce travail se trouvent réunies ? Et si, au contraire, le travail offrait leur liberté aux êtres humains ?
Des questions fondamentales dans la mesure où non seulement elles déterminent notre être au monde, mais également notre être à nous-mêmes…
Ainsi, dans quelle mesure peut-on considérer le travail comme étant par essence asservissant ? Comment s'exprime et s'explique, en conséquence, une telle situation ?
Mais, face aux contradictions phénoménologiques de telles affirmations, ne faut-il pas revoir notre jugement, et voir au contraire dans le travail la condition de la liberté de l'homme ?
Dans ces conditions, comment doit se définir un travail non asservissant ?
[...] Pendant quelques instants, je pense à bien des choses. Réveil brusque : combien est-ce que j'en fais ? Ça ne doit pas être assez. Ne pas rêver. Forcer encore. ( )Pointer, s'habiller, sortir de l'usine, le corps vidé de toute énergie vitale, l'esprit vide de pensée, le cœur submergé de dégoût, de rage muette, et par-dessus tout cela d'un sentiment d'impuissance et de soumission. [...]
[...] Ce qui ne le dispense pas, par ailleurs, de devoir fondamentalement respecter l'humanité des travailleurs. [...]
[...] Tout d'abord il convient, afin de répondre à ces interrogations, d'étudier la question suivante, c'est-à-dire : qu'est-ce que l'humain ? Rousseau, dans ses Confessions, a débuté sa rédaction par la phrase suivante : l'homme naît libre. En effet, l'homme se distingue de l'animal avant tout par sa liberté, ou du moins par sa volonté de pouvoir toujours, en toute circonstance, exercer son libre-arbitre. Et justement, l'homme est le seul de tous les animaux à travailler : lui seul produit les choses nécessaires à sa survie ; car quel animal est capable de produire par exemple sa nourriture ? [...]
[...] Comment cela est-il possible ? Tout simplement lorsque le travail se fait si dur, si répétitif, que l'homme bientôt se sent non seulement réduit au rang de simple facteur de production au même titre que n'importe quelle machine, mais également se retrouve au final trop fatigué de sa journée pour pouvoir exercer ce qui le fonde également en tant qu'homme, à savoir sa liberté de pensée. Le slogan bien connu ‘métro/boulot/dodo' est une bonne illustration de la dimension asservissante et déshumanisante que peut contenir le travail. [...]
[...] Des questions fondamentales dans la mesure où non seulement elles déterminent notre être au monde, mais également notre être à nous-mêmes Ainsi, dans quelle mesure peut-on considérer le travail comme étant par essence asservissant ? Comment s'exprime et s'explique, en conséquence, une telle situation ? Mais, face aux contradictions phénoménologiques de telles affirmations, ne faut-il pas revoir notre jugement, et voir au contraire dans le travail la condition de la liberté de l'homme ? Dans ces conditions, comment doit se définir un travail non-asservissant ? [...]
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