Le 20 octobre 2006, un premier salarié de chez Renault se donnait la mort à 39 ans en se jetant du cinquième étage du bâtiment dans lequel il travaillait sur le site de Guyancourt. La longue série de suicides commençait alors. Le 22 janvier, c'était un technicien qui se donnait la mort près du même site ; le 16 février, un salarié de Renault se tuait à son domicile ; le 24 septembre dernier, un technicien de maintenance du site d'Aubevoye se donnait également la mort. Le monde du travail était bouleversé sur l'instant, ces actes désespérés faisant l'effet d'un électrochoc. Puis, plus rien. On cite les suicidés et leur triste sort dans les différents quotidiens, on pointe du doigt les méthodes de management, les directeurs généraux, les trente-cinq heures aussi… mais les consciences se rendorment vite.
Il est important, avant d'analyser le cas particulier du suicide en entreprise, de distinguer trois types de personnes face au suicide tels que les définit Michel Debout dans son livre La France du suicide. Il y a tout d'abord le suicidé : le suicidé est l'individu qui est mort de la suite de son acte accompli. Il n'est pas juste de qualifier ces suicides de suicide réussi dans la mesure où cela supposerait que le suicidé n'a qu'un seul but qui est celui de disparaître : l'idée est choquante car il y a toujours une part d'ambivalence avec la mort, l'individu ne cherchant pas seulement la mort mais aussi le commencement d'une nouvelle vie. Michel Debout présente ensuite le cas des suicidants. Ce sont ceux qui ont réalisé une tentative de suicide et qui « survivent à leur acte ». On se pose souvent la question : s'agit-il d'une véritable tentative de mourir ou d'un appel à une autre vie ? Le suicidant devient suicidaire si on le laisse seul s'enfermer peu à peu. Les suicidaires sont ceux qui pensent au suicide sans jamais passer à l'acte. Certains sont fascinés par la mort, d'autres y pensent suite à un événement douloureux et sont dans un rapport critique avec leur vie. Le sujet dont nous allons traiter recouvre ces trois types de personnes.
[...] Le siège a mis en place un plan de soutien aux personnels de ce site. Mais maintenant on peut se demander : Les constructeurs sachant que les objectifs qu'ils demandent aux cadres sont facteurs de pression et de stress, pourquoi ne pas avoir prévu avec le CHSCT (Comité d'hygiène et de sécurité des conditions de travail) et la Direction RH la mise en place d'un dispositif spécial ? Pourquoi le dialogue social reste-t-il figé sur cette question ? Les entreprises se lavent les mains de tels comportements, jugés comme réflexes malheureux de la vie privée de leurs employés. [...]
[...] La combinaison de ces deux textes devrait tendre vers une reconnaissance aisée du suicide comme accident du travail, ce qui ne semble pourtant pas être le cas On tente alors de chercher la responsabilité de ces actes au travers des Lois Aubry mises en place sous le gouvernement Jospin Article L.411-1 du code de la sécurité sociale et arrêt de la Cour de cassation du 28 février 2002 : La difficile reconnaissance du suicide comme accident du travail L'article L.411-1 du Code de la Sécurité Sociale énonce que : "Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. " Une des difficultés de la reconnaissance du suicide comme accident du travail réside dans ces quelques lignes. [...]
[...] Le couple se fissure ne trouvant de solution que dans la rupture. Le chômeur se trouve alors véritablement seul et est aspiré dans la sphère dépressive allant jusqu'au suicide, car s'il y a une médecine du travail, il n'existe pas une médecine du chômage Mais le monde du travail n'offre pas un meilleur tableau Le travail a changé nous dit Michel Debout dans son livre La France du suicide. Comme nous l'avons vu précédemment, la concurrence a changé, les clients sont devenus de plus en plus exigeants, le monde de l'entreprise plus agressif pour le salarié. [...]
[...] En effet, toute la difficulté se trouve dans le lien entre suicide et travail. Il faut, comme le dit l'article, que l'accident se produise par le fait ou à l'occasion du travail Or la frontière est parfois obscure entre le suicide à cause de problèmes personnels et à cause de problèmes professionnels, d'autant plus si le suicide est réalisé hors de l'entreprise et hors des horaires de travail. Voilà deux exigences auxquelles le suicide peut déroger, notamment lorsque le salarié retourne l'arme contre lui à son domicile. [...]
[...] De plus, avec l'avènement de l'instantanéité, on peut être joignable par elle à tout moment par les portables, les mails, Internet Mais l'envers de ces conditions de travail veut que le salarié soit toujours dans l'urgence, voire même dans le TTU c'est-à-dire le très très urgent Cela augmente la tension. Dans le documentaire de Jean- Michel Carré, un manager nous dit que ses subordonnés ont parfois besoin de ce stress, de travailler dans l'urgence, que cela les motive : c'est du stress positif selon lui. Les spectateurs dans la salle rient jaune Le problème majeur selon C. Dejours, psychanalyste, est que, certes les gens acceptent volontairement cette servitude, mais ils attendent une rétribution morale, une reconnaissance en retour. Or rien ne vient. [...]
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