Dans ce texte tiré de L'école, mode d'emploi paru en 1985, Philippe Meirieu fait une virulente critique du modèle du conditionnement ou behavioriste. Pour lui un tel modèle si on l'applique amènerait à un « enfer pédagogique » et « produirait des allures d'apocalypse ».
Cette critique aboutit à une réflexion sur le fait que les variables de l'apprentissage (c'est-à-dire les processus) ne peuvent être connues et maîtrisées par le pédagogue en totalité, et que le travail de celui-ci consiste au repérage des informations essentielles à transmettre et à l'examen des résultats obtenus afin de stabiliser ce qui est acquis et se débarrasser des incertitudes (...)
[...] La pluralité des méthodes renvoie à la pluralité des cultures et inversement. Quant au principe d'incertitude, d'abord énoncé en physique par Heisenberg, il a été retenu par les analystes de la modernité en sciences humaines, au vu de la multiplicité des facteurs explicatifs (crise des valeurs et du sens, méthodes de prévision économique et démographique . Chaque fois, l'impossibilité de tenir toutes les variables ensemble aboutit à une prévisibilité aléatoire et à l'éclatement des anciens concepts. Se former à la pédagogie différenciée, c'est donc apprendre à affronter l'interculturalité et l'incertitude, à la fois dans leurs dimensions méthodologiques et psychologiques, puisque c'est apprendre à exercer son regard sur la perception fine des différences de caractère et de compétence des élèves avec lesquels il faudra jouer. [...]
[...] L'analyse systémique nous a appris que nous devons faire fonctionner des réalités d'ordre hétérogène, imbriquées les unes dans les autres, en déterminant simplement dans le système qu'elles constituent le trajet que nous voulons parcourir. Pour le pédagogue, il existe donc une masse d'informations disponibles afférentes au savoir qu'il a à transmettre, aux apprenants et à lui-même. Son travail consiste à repérer quelques-unes de ces informations. L'essentiel est qu'il examine ses résultats et repense alors ses choix : il stabilisera ainsi les éléments positifs et se débarrassera progressivement (mais jamais complètement) des incertitudes. [...]
[...] Cette dynamique n'est jamais achevée car les problèmes sont nombreux voire infinis et ainsi se construit la pédagogie différenciée à partir de cette multiplicité selon Meirieu. - Meirieu affirme que dans tout acte d'apprendre, il y a des points d'appui, et que le pédagogue peut en faire des leviers pour une action plus rigoureuse et plus libre à la fois. Cela signifie que l'acte d'apprendre est composé de plusieurs étapes et que leurs acquisitions progressives permet au pédagogue de se fournir des leviers (des étapes déjà acquises) pour progresser dans son apprentissage. [...]
[...] L'auteur vise ici tous les préjugés et les a priori qu'un pédagogue peut avoir à un groupe-classe. Il doit pouvoir aller au-delà de ses représentations tout en prenant en compte les réelles différences existant dans le groupe. C'est un travail donc de reconstruction de la représentation qu'il peut avoir à effectuer. [...]
[...] On peut entrer partout à condition d'avoir une entrée. Et la pédagogie différenciée, c'est cela : non une systématique, mais une dynamique jamais achevée ; chercher des points d'appui dans le réseau complexe que constitue tout acte d'apprendre, en faire des leviers pour une action, plus rigoureuse et plus libre à la fois. Extraits adaptés de : Philippe MEIRIEU (1985) L'école, mode d'emploi. Paris : ESF Texte 2 On peut examiner le concept de pédagogie en lien avec le mouvement de la société et de la science contemporaine, autour de deux idées clés : l'interculturalité et le principe d'incertitude. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture