En avril 1997, une commission d'enquête parlementaire belge remettait un rapport concernant les activités de groupements sectaires nuisibles. Ce texte constituait une révolution dans notre pays puisqu'il mettait un terme à trois décennies de laxisme qui avaient permis à près de deux cents de ces organismes de se déployer chez nous sans faire l'objet d'aucune surveillance. La publication du rapport suscita de nombreuses réactions et permit d'ouvrir les yeux aux autorités sur une situation préoccupante : les sectes ne sont plus aujourd'hui cantonnées aux pages faits divers des journaux, leur ampleur dépasse les frontières et constitue une menace pour les personnes et la société dans son ensemble.
Les mouvements sectaires, à l'image de la scientologie, ont su s'adapter aux évolutions du monde occidental. Au départ de petites communautés rassemblées autour d'une croyance, elles ont entamé un tournant dans les Etats-Unis des années soixante, où la crise des cultures traditionnelles leur permit de surfer sur la vague du confort de vie et des valeurs post-matérialistes. Les sectes devinrent dès ce moment les pourfendeurs d'un monde capitaliste déshumanisé et s'érigèrent en refuge pour les marginaux éjectés du système. Plus qu'une simple doctrine religieuse, les sectes apportent à leurs adeptes le soutien et la confiance qui leur fait défaut dans leur vie quotidienne. Elles remplissent par là le rôle tenu autrefois par les religions traditionnelles et témoignent du malaise profond qui règne dans notre société.
Parmi ces mouvements, l'Eglise de scientologie suscite un intérêt particulier de par la contradiction qu'il existe entre le soutien inconditionnel que lui livre de nombreuses personnalités aux Etats-Unis, parmi lesquelles des politiciens et hommes d'Eglise, et la haine viscérale dont elle est l'objet dans les médias et auprès des gouvernements européens. Soutenue par des moyens financiers colossaux, elle est considérée comme dangereuse car son projet sociétal va au-delà de l'endoctrinement : la scientologie est un mouvement subversif qui déploie ses moyens et son prosélytisme afin d'infiltrer les rouages des pouvoirs politiques et économiques, en recrutant notamment des cadres d'entreprises et des fonctionnaires de l'Etat.
Face à cette menace, l'Etat belge a-t-il les moyens de réagir ? Telle sera la question posée dans ce travail. Celui-ci nous amènera à nous interroger sur les mesures anti-sectes entreprises à ce jour et qui devraient devenir effectives dans les prochains mois. Nous tenterons de voir si ces mesures permettront de juguler la croissance du nombre d'adeptes et d'éviter à la Belgique de devenir une terre d'asile d'organismes pseudo-religieux de tous poils. L'hypothèse de travail postulera que la Belgique sera bientôt en possession de moyens juridiques et légaux suffisants afin de lutter efficacement contre l'Eglise de Scientologie.
La méthode de travail privilégiée sera l'accompagnement des commissions parlementaires dans leur étude des mouvements sectaires. Au départ d'un point de vue objectif sur les activités de l'Eglise de Scientologie (Partie I), nous traiterons de la lutte contre les sectes dans la Partie II, comme cela a été fait dans les travaux de la commission. Une première sous-partie justifiera la classification de la scientologie comme mouvement sectaire (Sous-partie I). Une deuxième s'inspirera des mesures prises à l'encontre des sectes dans d'autres états (Sous-partie II). Il s'en suivra une analyse des moyens juridiques de la lutte contre les sectes (Sous-partie III), pour enfin se tourner vers une analyse des compléments à apporter au Code Pénal afin de lutter efficacement contre les sectes (Sous-partie IV). Une conclusion jugera du bien-fondé de ces mesures.
Reste à signaler que ce travail a été réalisé dans un souci d'objectivité et qu'il ne comporte pas de jugements de valeur autres que ceux émis par les autorités judiciaires et politiques de l'Etat belge.
[...] Monographie ARES Paul, La scientologie, laboratoire du futur Paris : Editions Golias 463p. CORDES Henri de, L'Etat belge face aux dérives sectaires, Bruxelles : collection courrier hebdomadaire, publié par le CRISP, numéro 39p. FAUBERT Serge, Une secte au cœur de la république, Paris, Calmann-Levy 251p. FENNEC Georges, Main basse sur la justice, Paris : JC Lattès LALLEMAND Alain, Les sectes en Belgique et au Luxembourg, Bruxelles : éditions EPO 250p. Articles scientifiques BEIT-HALLAHMI Benjamin, Scientology : Religion or racket ? Marburg Journal of Religion 2003, vol.VIII, n°1. [...]
[...] Il n'est pas nécessaire de rentrer dans une énumération exhaustive ces critères pour juger de la position de la scientologie dans cette classification. Les témoignages rapportés d'anciens adeptes ainsi que les enquêtes du parquet ont fait état de méthodes de recrutement trompeuses et abusives, d'exigences financières disproportionnées et de manipulation mentale des adeptes. Ces accusations furent suffisantes pour compter l'Eglise scientologique parmi les 189 organismes qualifiés de «potentiellement nuisibles dans le rapport de la Commission et donc susceptibles de faire l'objet d'une surveillance rapprochée de la part des services de renseignement. [...]
[...] Des groupes de développement personnel seront formés autour de l'écrit d'Hubbard et donneront naissance à la Scientologie, la science du savoir Celle-ci prendra en 1954 son appellation définitive d'Eglise de Scientologie, cette conversion s'expliquant par ses avancées technologiques selon son fondateur, par la recherche d'exonération fiscale d'après ses détracteurs.[1] Ron Hubbard, dont on connaissait peu l'intimité, serait décédé en 1986 mais il demeure auprès de ses adeptes un prophète éclairé dont la personnalité est l'objet d'un culte.[2] La doctrine scientologique se base sur la production étoffée de son fondateur. On y découvre les visions du prophète Hubbard, témoin de la naissance de l'homme il y a des billions d'années. [...]
[...] Au départ d'un point de vue objectif sur les activités de l'Eglise de Scientologie (Partie nous traiterons de la lutte contre les sectes dans la Partie II, comme cela a été fait dans les travaux de la commission. Une première sous-partie justifiera la classification de la scientologie comme mouvement sectaire (Sous-partie I). Une deuxième s'inspirera des mesures prises à l'encontre des sectes dans d'autres états (Sous-partie II). Il s'en suivra une analyse des moyens juridiques de la lutte contre les sectes (Sous-partie III), pour enfin se tourner vers une analyse des compléments à apporter au Code Pénal afin de lutter efficacement contre les sectes (Sous- partie IV). Une conclusion jugera du bien-fondé de ces mesures. [...]
[...] Les nombreux moyens de dissuasion mis en place constituent autant de frein à la progression des mouvements et autant d'incitations à aller trouver refuge ailleurs. Il semblerait néanmoins que le cas de la Scientologie soit plus compliqué. Il s'agit en effet d'une entité constituée en réseau international et soutenue par un réseau de lobbying puissant. La lutte antisecte en Belgique ne reçoit aucune assistance de la part des instances européennes et, pire encore, une tentative de dissolution du mouvement risquerait de créer des troubles diplomatiques avec les Etats-Unis. Inutile de préciser les pressions qui accompagnent également le travail des magistrats s'attaquant à la scientologie. [...]
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