En juin 2003, j'ai eu l'occasion d'assister, en tant que partie civile, à une audience dans un tribunal de Grande Instance. J'avais été surprise des interactions entre juristes. Une impression que ces professionnels du droit fonctionnaient en mode clos « comme si » le « public » n'existait pas ou à l'inverse qu'ils étaient en « représentation ».
D'autre part, j'ai fait du théâtre lorsque j'avais 15 ans. J'ai retrouvé des similitudes entre les comportements des juristes et ceux des acteurs de théâtre (...)
[...] Je suis donc partie avec l'idée d'observer les avocats dans leur lieu de représentation (appelée région antérieure par E. Goffman). En fait, en observant tout azimut lors de mon observation exploratoire j'ai pu constater qu'entre le temps qui s'écoule entre la venue des juristes du siège et le moment où le public s'invite, les coulisses (région postérieure) est frappante de changements d'attitudes des juristes du parquet. En effet, les postures, les mots employés, les visages (faces) : tout semble différent ! [...]
[...] En effet, je n'étais jamais allée dans ce lieu, ne connaissait aucun juriste, n'avait que de vagues connaissances de l'Etat Major du Droit (ou autrement appelé Rechtsstab par Max Weber) De plus, le palais de justice est un lieu public, gratuit, sans besoin d'autorisations préalables. Il s'avère donc facile d'accès pour une première expérience d'observation sociologique. Il ne m'a pas été difficile d'allier mes horaires de cours avec ceux des audiences. En effet, tous les jours, il a des appels à comparutions immédiates et j'ai également pu assister à une observation en correctionnelle. [...]
[...] Si l'on s'accorde à dire que la justice met en scène ses interventions et ses décisions, alors quel rôle jouent les avocats ? Mon lieu d'observation se situe au Palais de Justice (Annexe 1). Edifié en 2000 sur l'île de Nantes face à la ville, par Jean Novel, célèbre architecte, le palais est accessible du centre ville par la passerelle Victor Schoelcher. Il est composé de huit salles d'audience. J'ai fait mes observations dans deux d'entres elles. Observation Masquée Exploratoire Première audience -14h00 En présence : 4 policiers 2 avocats 8 personnes dont moi dans le public Placée au 3ème rangs je ne voulais pas être trop près des juristes pour pouvoir, le cas échéant, prendre des notes sans être vue (bien que rien ne m'ait montré qu'ils prêtaient attention à ma présence), ni trop loin pour pouvoir entendre et observer les regards. [...]
[...] En partant sur un entretien semi-directif, j'avais toute liberté, en fonction de ses réponses, d'orienter mes questions pour savoir si leur statut d'avocat et le rôle qui en découle déterminent leur conduite selon les acteurs en présence. Si leur comportement était facilité par leurs obligations liées à leur profession. J'avais pris soin d'avoir un matériel en fonction (mon téléphone portable). Avant l'enregistrement, nous avons échangé sur les personnes que j'avais pu observer. Elle m'a posé des questions sur leur physique, leur comportement. Comme si elle cherchait à savoir si j'avais pu rencontrer ses collègues. [...]
[...] Les plus jeunes peuvent avoir des sacs en bandoulière de couleurs (type sacs à dos), les plus anciens des serviettes en cuir. Les plus jeunes n'hésitent pas à utiliser leur téléphone portable. Ces différences d'apparences en lien avec les interactions choisies seront confirmées lors de mon entretien. Deux avocats sont assis sur le dossier du banc du public et s'entretiennent avec un de leur collègue qui lui est debout. Cette position du corps nonchalante confirmera en observant les avocats lors de l'audience, qu'il ne serait pas admis (règles de politesse) dans une région antérieure d'adopter une telle position corporelle. [...]
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