La folie, ainsi que les tentatives pour la gérer ou à défaut la réguler ne sont pas une invention du second XIXe siècle. On peut dater l'essor de la psychiatrie à la fin du XVIIIe siècle, avec notamment le médecin Philippe Pinel, médecin-chef de la Salpêtrière. Avec ses successeurs Jean-Étienne
Esquirol et Jean-Martin Charcot, c'est de cet hôpital que viendra l'élan de modernisation de la psychiatrie française.
Si aujourd'hui le terme "folie" désigne un état psychique bien déterminé résultant d'un dysfonctionnement cérébral avéré, les médecins n'avaient alors pas les outils pour faire la distinction faite aujourd'hui entre psychiatrie et psychologie, entre psychose et névrose. Était donc considéré comme fou au XIXe siècle tout homme dont les actes allaient à l'encontre de la raison (et notamment dans le domaine sexuel – domaine dans lequel les verrous de la raison sont justement particulièrement forts).
On peut dire que la fin du XIXe siècle est la période où l'on passe de la définition commune de la folie à sa définition médicale, avec tous les changements que cela implique dans sa gestion. Comment qualifier, donc, la psychiatrie et ses patients dans cette période de transition ?
[...] On ressent en fait l'infuence du darwinisme et du positivisme sur un domaine particulièrement méconnu du corps humain. Pour beaucoup de médecins-psychiatres, les explications de Morel ou de Lumbroso ne suffsent pas (ou plus). Si elles ont l'avantage d'être plus proches de l'opinion commune, elles sont diffcilement prouvées. C'est ainsi que vous se multiplier les recherches en psychiatrie et avec elles des découvertes. C'est en effet à cette période que sont délimités les concepts d'hébéphrénie (une sorte de schizophrénie), d'hystérie, de catatonie (la forme d'expression de la schizophrénie), de psychose hallucinatoire chronique, de psychose maniaco-dépressive, d'autisme ou de délire d'interprétation (paranoïa). [...]
[...] Dans les deux cas on constate que les croyances ancestrales perdurent et trouvent même du crédit en exploitant la théorie de l'évolution. Le Fou est toujours un monstre, la seule évolution réside dans la nature de la monstruosité qui l'habite: elle n'est plus d'ordre religieux mais d'ordre génétique Se protéger plus que soigner Par conséquent, puisque le Fou est un monstre plus qu'un malade, il faut en protéger la société. C'est encore à cela que servent la plupart des hôpitaux psychiatriques français à la fn du XIXe siècle. [...]
[...] Enfn l'organisation elle-même des hôpitaux psychiatriques est pensée comme celle d'une prison servant à protéger la société des individus qu'elle contient. Héritage de ce que Michel Foucault appelait le grand renfermement en 1656, les hôpitaux psychiatriques sont de grands complexes vivant en autarcie, où malades, personnel et médecins vivent ensemble à l'intérieur des murs selon un rythme immuable mais qui devient de plus en plus un malade qu'il faut aider 1. Élaboration des bases de la psychiatrie actuelle Mais à coté de ces survivances médicales héritées de croyances ancestrales apparaît une psychiatrie plus moderne, plus proche de celle que l'on connait actuellement. [...]
[...] La psychanalyse, discipline nouvelle, subit évidemment de vives critiques de la part des psychiatres comme des psychologues (critiques qui persistent actuellement). La psychiatrie pratiquée au moment où le XIXe siècle se termine est donc radicalement différente de celle pratiquée à peine 30 ans auparavant: des catégories parfois très artifcielles dans lesquelles les médecins rangaient les comportements socialement transgressifs ou inexpliqués elle est passée à sa défnition moderne. Le terme psychiatrie avait été inventé en 1808 par Johann Christian Reil du grec psyche, l'âme, et iatros, le médecin), mais elle n'a défni branche de la médecine qui cherche à guérir ce que l'on considère être des malades mentaux (et non plus des âmes perdues ou des créatures diaboliques) que bien plus tard. [...]
[...] La fn du XIXe siècle est donc bien une période-clé pour le domaine de la santé mentale: une période où elle est infuencée autant positivement que négativement, mais bien celle où elle progresse le plus et s'affrme comme une réelle discipline médicale. [...]
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