En 1997, Renault annonce la fermeture de son usine de Vilvoorde en Belgique. La réaction est très vive car le sentiment qui domine est que Renault fait supporter à son usine belge la charge de la réduction du volume de l'emploi qui pourrait être obtenue par une réduction du temps de travail dans l'ensemble des usines du groupe en Europe. Cet événement conduira la Commission européenne à publier une directive sur l'information et la consultation des salariés. Logique du marché qui pousse à la recherche de la rentabilité (y compris au détriment de l'emploi) et/ou régulation sociale ? Telle est la question posée par cet épisode de l'histoire de l'Europe. Europe libérale contre Europe sociale ! Le débat sur le projet de constitution européenne relance le même débat. La Communauté Européenne s'est construite sur une logique économique et sur la base d'une intégration par le marché. Il s'est agi d'abord de mettre en place une Union douanière, puis un marché commun (libre circulation des facteurs), enfin une union économique et monétaire. Dans cette logique, la place du social était réduite. Pourtant, l'intégration économique elle-même pousse à poser la question d'un volet social de la construction européenne. Pour assurer la libre circulation des travailleurs, pour éviter les distorsions de concurrence, pour renforcer la cohésion sociale, pour entraîner l'adhésion populaire à la construction européenne, il semble nécessaire de construire une Europe sociale. Encore faut-il dire laquelle et préciser la manière dont elle s'articule avec les politiques des Etats-membres et ainsi que la place des partenaires sociaux dans ce processus. En fait, si l'idée d'une Europe sociale n'est guère contestée, c'est le type d'Europe sociale à construire qui fait débat.
[...] Sans négliger ce qui a déjà été réalisé par les Etats comme par les partenaires sociaux, il s'agit donc de construire une Europe sociale plus ambitieuse que celle qui été construite jusqu'ici. Mais on est ici confronté à un choix politique entre divers modèles possibles de prise en compte du social dans l'intégration européenne. En s'inspirant des analyses de Bruno Théret, on peut dégager quatre modèles possibles pour la construction sociale et politique de l'Europe qui renvoient à des situations très différentes du point de vue de l'Europe sociale. [...]
[...] L'élément le plus avancé en ce qui concerne l'Europe sociale est la politique de l'emploi. Elle repose sur la logique institutionnelle suivante. En premier lieu la Commission et le Conseil déterminent les Grandes Orientations de Politique Economique Dans ce cadre des Lignes directrices pour l'emploi sont fixées en fonction desquelles les Etats membres élaborent des Plan nationaux pour l'emploi Chaque année, les Etats transmettent un rapport à la Commission sur la mise en œuvre de leur politique. La Commission élabore un rapport de synthèse qui fait l'objet d'un débat public et peut conduire à formuler des recommandations à tel ou tel Etat membre. [...]
[...] Le Traité prévoit aussi que, statuant à l'unanimité, le Conseil peut prendre des mesures de coordination pour la sécurité sociale des travailleurs migrants. Dans sa troisième partie, consacrée aux politiques de la Communauté, le Traité de Rome prévoit aussi des mesures concernant les conditions de travail, le droit du travail, la formation, la sécurité sociale, les négociations collectives, l'égalité des rémunérations entre hommes et femmes. On le voit, c'est pour favoriser l'intégration économique par le marché (allocation du facteur travail en fonction des signaux véhiculés par les taux de salaire) que des mesures sociales sont envisagées. [...]
[...] Dans l'approche de Marshall, il existe une dynamique de la citoyenneté. La reconnaissance des droits civils implique la reconnaissance des droits politiques, car il n'existe pas de liberté personnelle sans droit de participer à la désignation et au contrôle des dirigeants politiques. De même, la reconnaissance des droits civils et politiques implique la reconnaissance des droits économiques et sociaux car les droits civils et politiques risquent de rester formels sans l'existence de droits en matière d'éducation, d'emploi, de logement etc. [...]
[...] Pour les pays scandinaves, il s'agit de préserver leur Etat-providence de type social-démocrate. Ils craignent que l'harmonisation européenne ne remette en cause leur système économique et social fondé sur un niveau élevé de protection sociale et de qualification de la main d'œuvre qui leur permet de jouer la carte de compétitivité hors-prix. La Grande Bretagne, au contraire, entend maintenir son Etat providence résiduel, elle craint que l'harmonisation européenne, ne conduise à une intervention de l'Etat qu'elle juge excessive. Ce modèle confédéral met l'accent sur la diversité des situations sociales et des traditions syndicales dans les pays membres et met en avant le principe de subsidiarité. [...]
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