Ishmael Beach, un jeune Sierra Léonais de 26 ans, ancien enfant soldat enrôlé depuis l'âge de 12 ans, venu témoigner à Paris de son expérience, affirma que : « Il fut un temps où prendre un fusil et tirer sur quelqu'un était devenu quelque chose d'aussi facile que de boire un verre d'eau. » et il ajoutait « C'est facile de devenir un enfant soldat, mais il est bien plus difficile de retrouver votre humanité perdue. C'est ce qu'il y a de plus difficile. La réhabilitation est un processus continu. J'ai encore des images qui me reviennent en mémoire. ». On estime à 250 000 le nombre d'enfants soldats mêlés à des conflits armés dans le monde. Ces enfants soldats, une fois libérés de leurs « recruteurs », devront entamer un long travail sur eux-mêmes pour tout simplement réapprendre à vivre, à aimer, à évoluer loin de la violence quotidienne. Cependant, ils seront marqués à vie. Arrachés au monde de l'enfance bien trop tôt, ils porteront pour toujours les stigmates de leur passé. S'intéresser aux enfants soldats conduit inévitablement à s'intéresser à la genèse de l'expression « enfant soldat ». L'expression est née d'un constat : celui que des enfants combattent aux côtés des adultes et/ou les accompagnent dans les guerres, tant civiles qu'inter étatiques, qui déchirent un certain nombre de pays dans le monde. La communauté internationale se fait donc le témoin journalier et impuissant de ses conflits où des enfants sont enrôlés pour se battre au même titre que les adultes. Cependant, la notion d'enfant soldat revêt un sens beaucoup plus large que celui qui apparaît de prime abord. En effet, la notion n'inclut pas seulement les enfants mineurs, c'est à dire âgés de moins de 18 ans, qui combattent. Selon la définition du terme « enfant-soldat » donnée par l'UNICEF. La notion ne s'applique pas aux seuls porteurs d'armes. Elle concerne également les enfants, membres d'un groupe armé quel qu'il soit, qui occupent les fonctions de combattants, mineurs ou démineurs, éclaireurs, espions, porteurs, coursiers, gardes, sentinelles, cuisiniers, esclaves sexuels, esclaves domestiques, etc…, qu'ils aient été recrutés de leur plein gré ou par la force. Ces enfants, quant ils ne se font pas tués sur le front, sont souvent maltraités, humiliés par leurs recruteurs. Le phénomène des enfants soldats semble avoir pu être mis en lumière par l'essor des médias et plus particulièrement par le développement du journalisme à l'échelle internationale. En effet, la communauté internationale, par le biais des médias, a pris conscience du phénomène dans les années 80, et notamment en 1986 lorsque sont diffusées des images qui montrent l'armée nationale de résistance ougandaise arriver à Kampala, la capitale ougandaise, avec des enfants âgés de quatre ans dans ses rangs. La présence d'enfants dans des groupements armés et l'utilisation de ces derniers à des fins militaires put également être observée par la suite au Cambodge, au Liberia, ainsi qu'au Mozambique pour devenir un phénomène que l'on sait désormais planétaire. Cependant, le phénomène n'est pas nouveau. L'utilisation d'enfants à des fins militaires a toujours existé. Cette pratique est aussi vieille que l'est la guerre. Les historiens ont en effet pu parler de l'utilisation d'enfants dans les combats armés de l'Antiquité (notamment à Sparte au IVème avant J-C). La pratique a ensuite perduré à travers les siècles.
[...] En effet, les armes légères sont plus maniables pour les enfants. Elles leur permettent de se battre au même titre que les adultes dans les conflits armés. Encore une fois le profil économique des pays où l'on utilise les enfants dans les conflits armés est responsable de la banalisation et de l'accroissement de cette pratique. Le faible niveau de contrôle étatique de la sphère économique explique la prolifération des armes et notamment des armes légères qui permettent l'enrôlement des enfants. [...]
[...] Ils nous ont emmenées au front. Nous avons dû faire la cuisine et porter les munitions dans la brousse. Ils nous maltraitaient : si je n'allais pas avec eux, ils allaient me tuer Ils m'ont emmenée à Monrovia et m'ont laissée là. Je veux aller à l'école. Je veux retourner à Nimba, chez ma famille.» Le terme d' enfants soldats me paraît inadéquat dans ce cas précis. Je préfère parler d'« enfants esclaves car les intégrer dans la notion d'enfant soldat ne rend pas compte de la réalité et tend à réduire la gravité du phénomène, lié purement et simplement à la notion d'esclavagisme. [...]
[...] Grâce à la résolution 1612 du Conseil de sécurité des Nations-Unies prise le 26 juillet 2005, la collecte d'informations sur les enfants soldats et sur leurs recruteurs a été facilitée. Ainsi le travail des différentes organisations internationales qui tend à la démobilisation des enfants soldats a été simplifié. Disposant de plus d'informations en la matière, elles sont plus efficaces et plus réactives. Les principales organisations internationales agissant en la matière sont l'UNICEF et Amnesty International mais il en existe d'autres (telles COOPI, une ONG italienne). [...]
[...] Ces questions, on l'a vu sont liées. Elles sont en effet inconciliables si l'on veut traiter chacune d'entre elles. La compréhension du phénomène est en effet déterminante si l'on veut envisager une stratégie efficace dans la lutte contre l'emploi d'enfants soldats. En effet, on ne peut pas étudier les moyens apportés pour lutter contre le phénomène si on ne connaît pas les rouages de ce même phénomène. Les chemins de l'enrôlement, les facteurs qui permettent d'expliquer le phénomène sont multiples et le fait pour un enfant d'avoir été un enfant soldat est toujours une expérience traumatisante qui mérite d'être prise en charge par des professionnels et des organismes spécifiques à la reconstruction, à la réinsertion de l'enfant Face à ce phénomène, la communauté internationale, sensibilisée au problème, se mobilise et a à sa disposition un certain nombre de moyens, tant juridiques qu'organisationnels, pour enrayer l'utilisation d'enfants dans les conflits armés I. [...]
[...] Cependant la condescendance n'est pas une attitude constructive. Elle n'aide pas à comprendre pourquoi ces régions du monde sont davantage touchées par le phénomène enfants soldat et par là même elle n'aide pas à participer à son enrayement. C'est une attitude beaucoup plus humble qu'il faut adopter si l'on veut comprendre le problème et tenter d'y remédier. Cette volonté de pallier au fait que des enfants soient utilisés et abusés par des groupements armés dans des conflits intra-étatiques ou inter-étatiques se fait de plus en plus grande au sein de la communauté internationale. [...]
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