Le 27 octobre 2005, en Seine-Saint-Denis, deux jeunes garçons trouvent la morte électrocutés et un troisième reste grièvement brûlé dans un transformateur EDF, où ils s'étaient réfugiés, croyant être poursuivis par la police. La nouvelle se répand très vite enclenchant un cycle d'émeutes d'une ampleur exceptionnelle sur une durée de trois semaines. On peut distinguer deux phases d'affrontements. Dans la première, qui va du 27 octobre au 5 novembre, les émeutes restent circonscrites à la région parisienne tandis qu'à partir du 6 novembre ils intéressent d'autres régions françaises.
La question des émeutes qui a intéressé la France en 2005 constitue un exemple intéressant de l'importance et de l'enjeu à niveau social et sociétal de l'étude des relations interculturelles en Europe. D'autant plus que le phénomène des émeutes constitue un déjà vu en Angleterre en 1987 et 2001 ou en Belgique en 1991. Et même en France, cette question est loin d'être un éclair dans un ciel serein : les premières expressions des émeutes urbaines remontent au début des années 80 et 90, au point que pour certains chercheurs elle relève plutôt d'une construction spécifique de la société française et de ses contradictions. A ce propos, si l'on devait définir la société française par ses contradictions, la plus frappante parait être « l'impensé du credo républicain, à savoir son incapacité à se percevoir, au-delà des dogmes, comme une société ethnicisée où la racialisation des groupes minorisés est profondément à l'œuvre et où le racisme au quotidien ne se construit pas que dans les interactions quotidiennes mais est inscrit au sein des institutions et des représentations sociales » . En témoignerait le fait que les sociologues français tendent à privilégier les déterminants sociaux comme clef d'explication des émeutes tandis que leurs collègues anglais et américains prennent en considération davantage la dimension spécifiquement ethnique de ces révoltes.
[...] Les émeutes de 2005 : produit de la racialisation (cachée) de la société française ? Introduction Le 27 octobre 2005, en Seine-Saint-Denis, deux jeunes garçons trouvent la mort électrocutés et un troisième reste grièvement brûlé dans un transformateur EDF, où ils s'étaient réfugiés, croyant être poursuivis par la police. La nouvelle se répand très vite enclenchant un cycle d'émeutes d'une ampleur exceptionnelle sur une durée de trois semaines. On peut distinguer deux phases d'affrontements. Dans la première, qui va du 27 octobre au 5 novembre, les émeutes restent circonscrites à la région parisienne tandis qu'à partir du 6 novembre ils intéressent d'autres régions françaises. [...]
[...] En témoigne de manière emblématique le vocabulaire d'un tel Nicolas Sarkozy, à l'époque ministre de l'Intérieur qui non plus tard du 25 octobre 2005 à Argenteuil, utilisait le terme bande de racaille pour se référer aux jeunes de banlieue. Or, puisque l'identité se construit aussi par l'image que les autres ont de les nous ce type de discours affecte principalement les jeunes qui sont en plain construction de leur identité dans tous les domaines de leur existence et construction relationnelle. Ce petit aperçu de la condition des jeunes dans les banlieues[16] confirme certaines explications ou interprétations des émeutes. [...]
[...] Paris, Payot pp. 32-5. Loïc WACQUANT, Op. cit., pp. 149-50. Ibid., p Hugues LAGRANGE, Autopsie d'une vague d'émeutes in Hugues LAGRANGE, Marco OBERTI (sous la dir. Émeutes urbaines et protestations : une singularité française, Paris, Presse de Science Po p et Robert CASTEL, Op. cit., note p Michel KOKOREFF, Op. cit., p Loïc WACQUANT, Op. [...]
[...] Or, si la société française est ethnicisée et raciale, cela implique des dilemmes redoutables qui remettent en question de manière radicale les modes traditionnels de l'action étatique. Primo, la fin de la conception républicaine de la nation. C'est la condition préalable pour éviter l'inefficacité des politiques d'intégration séparées d'une logique multiculturelle. Secundo, la mise en place des mesures de discrimination positive dans l'accès au monde du travail pour les jeunes d'origine maghrébine. Tertio, la création d'un espace politique dans lequel formuler et filtrer des revendications collectives. [...]
[...] Ce sentiment conduisant à une neutralisation des normes morales, voler et casser ce sont des formes de vengeance[34]. Ce réglage des comptes avec une société accusée d'avoir failli ses promesses charge l'action d'une signification politique. Cette interprétation serait confirmée par le fait que les émeutiers comptent également des jeunes disposants des ressources et des jeunes diplômés. In fine, si on considère la structure des opportunités politiques, on peut inscrire les actions collectives dans des restructurations des rapports de pouvoir. En ce sens, les mouvements sociaux, comme les émeutes, ne prennent pas forme par leur propre dynamique en tant que processus sui generis. [...]
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