L'Europe est aujourd'hui au cœur de toutes les préoccupations et le centre de nombreux débats et analyses. Cependant, pour appréhender la question européenne dans toute sa spécificité et sa complexité, il est indispensable de considérer l'Europe en terme de civilisation et d'en repérer les traits saillants, souvent hérités des cultures nationales des pays qui la composent. Il convient, pour cela, de s'interroger sur la définition même des termes de civilisation et de culture. En effet, ces deux notions ont fait l'objet de multiples tentatives de définition à travers l'histoire sans qu'aucun consensus n'ait pu être atteint à leur sujet.
Il est, ainsi, nécessaire de s'accorder sur le sens à donner à ces concepts dans le cadre de cet essai. La civilisation peut être définie comme « l'ensemble des caractéristiques que présente la vie collective d'un groupe ou d'une époque » ; elle se réfère donc à la fois à un espace, une société, une économie et une mentalité collective ainsi qu'à une « chronologie bien plus vaste qu'une réalité sociale donnée ». En outre, comme l'établit Braudel, « chaque civilisation exporte, reçoit des biens culturels ». Ces « biens culturels » peuvent provenir aussi bien de civilisations voisines que de la culture d'un pays lié à cette même civilisation. Dans ce contexte, la culture peut être considérée comme un ensemble « d'usages, de représentations et d'œuvres d'une communauté humaine, tels que les a façonnés une tradition particulière ».
Or, l'étude de la civilisation européenne tend à démontrer que chaque culture nationale des différents Etats européens a contribué à la confection de cette civilisation la rendant ainsi originale. Car, comme un organisme vivant, la civilisation a reçu des apports, qu'elle a absorbés et intégrés en réponse à son histoire, sa temporalité et ses besoins propres.
De ce fait, comme toute autre culture nationale, la culture française a contribué sous de nombreux aspects au modelage de la civilisation européenne. Néanmoins, à l'heure du centenaire de la loi de la séparation de l'Etat et des Eglises, il peut être intéressant de considérer un aspect particulier de cet apport, à savoir la question du rapport au religieux au regard du concept de « Laïcité » qui a profondément marqué la culture française.
Quelles sont les principales caractéristiques de ce trait culturel qui se veut uniquement français ? En quoi la Laïcité, symbole de l'exception française, a-t-elle constitué un apport pour la civilisation européenne ?
[...] Elles ont ainsi alimenté les revendications en faveur d'une séparation stricte entre les Eglises à l'époque, essentiellement l'Eglise catholique et l'Etat et ont justifié les lois qui ont ouvert la voie au texte de 1905.[vii] Notons, par ailleurs, que la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat, ainsi mise en place, repose à la fois sur un idéal politique et le dispositif juridique qui le réalise ».[viii] D'une part, en tant qu'idéal, la laïcité s'appuie sur trois principes indissociables ( ) la liberté de conscience, l'égalité de tous ( ) et l'universalité Notons également qu'elle renvoie à l'idée d'autonomie intellectuelle, ce qui explique largement le lien très étroit qui l'unit au concept d'Ecole républicaine.[x] D'autre part, en tant que dispositif juridique, elle est mise en œuvre par une loi qui dessine un cadre au sein duquel elle peut être appliquée : ainsi, sont organisés la neutralité de l'Etat en matière religieuse ainsi que le caractère a-confessionnel de la sphère publique. L'importance d'un tel cadre ne prend tout son sens qu'au regard des références auxquelles étaient attachés les républicains français, inspirés par la philosophie politique des Lumières. [...]
[...] L'apport de la culture française à la civilisation européenne : la laïcité L'Europe est aujourd'hui au cœur de toutes les préoccupations et le centre de nombreux débats et analyses. Cependant, pour appréhender la question européenne dans toute sa spécificité et sa complexité, il est indispensable de considérer l'Europe en terme de civilisation et d'en repérer les traits saillants, souvent hérités des cultures nationales des pays qui la composent. Il convient, pour cela, de s'interroger sur la définition même des termes de civilisation et de culture. [...]
[...] En effet, la Laïcité telle que développée par le modèle républicain repose sur une stricte séparation du privé et du public qui suppose une distinction entre l'individu et le citoyen, évoluant chacun dans une sphère différente. Ainsi, au niveau privé, l'individu peut se différencier par un ensemble de choix qu'il fait, et notamment par ses choix religieux, entendus au sens large (athéisme, agnosticisme, religion) ; en revanche, au niveau public, le citoyen jouit d'une égalité qui se veut la plus large possible, et qui est protégée par l'Etat. [...]
[...] [xiii] Ibid., p [xiv] Ibid., p La France concentrait quelques traits caractéristiques qui peuvent permettre d'expliquer la spécificité de la Laïcité à la française : une confrontation Eglise-Etat particulièrement conflictuelle, fortement idéologisée, l'affirmation de la primauté de l'Etat, et une volonté de privatisation de la religion (Jean-Paul Willaime, cultural turn in the sociology of religion in France', in: Sociology of religion, 65: p.373-389.). [xvi] Convention européenne des droits de l'Homme, disponible sur le site : http://www.echr.coe.int/NR/rdonlyres/086519A8-B57A-40F4-9E22- 3E27564DBE86/0/FrenchFrançais.pdf [xvii] Commission nationale consultative des droits de l'Homme, La laïcité aujourd'hui, rapport d'étape Disponible sur le site : http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/034000728/0000.pdf [xviii] e.g. [...]
[...] [xxi] La pensée européenne ne se conçoit que dans le cadre d'un dialogue avec le christianisme, même quand le dialogue est vif ou violente la discussion e.g. Braudel, op.cit., note p [xxii] Ibid., p [xxiii] Ibid., p [xxiv] Cité par le professeur BronisB aw Geremek, Civilisation européenne http://www.senat.fr/colloques/actes_laicite/actes_laicite6.html#toc22, le [xxv] Marcel Gauchet, La religion dans la démocratie. Parcours de la laïcité, cité par Philippe Portier (Ibid.). [...]
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