Une des façons d'aborder les sociétés latino-américaines est d'étudier les problématiques qui traversent la gestion de l'urbanisation devenue un thème central, notamment depuis la fin des années 1980 avec la « crise urbaine ». Ainsi, les articles suivants traitent tous, à leur façon, ce thème crucial : « Amérique latine : la ville fragmentée » de Marie France Prévost-Schapira (1999), « Barrios de Caracas ou le paradoxe de la métropole » de Virginie Baby-Collin (2000), le rapport de juin 2005 d'Amnesty International intitulé « Brésil, violences urbaines, impasse sécuritaire » et « Lima. Quartiers fermés pour vacances de rêve » de Raul Matta (2007).
L'analyse comparée de ces quatre articles soulève une question majeure : les grandes métropoles latino-américaines sont-elles une solution d'intégration face au problème des inégalités sociales et de la violence en milieu urbain, ou bien sont-elles vectrices de nouveaux facteurs d'exclusion, de différenciation sociale ? Une approche historisante retraçant l'évolution de l'urbanisation en Amérique latine permettra de planter le décor de l'analyse. Puis, nous verrons comment apparaît un phénomène de désintégration sociale en l'absence de réponse gouvernementale face aux attentes des villes pour enfin comprendre comment se créent de nouvelles formes de sociabilité et d'interaction.
[...] Cependant, malgré ce cloisonnement entre classes sociales, Marie France Prevost-Schapira voit dans les mouvements pendulaires une forme d'intégration nouvelle permettant le contact entre différentes classes sociales. En effet, certains magasins ou administrations ne peuvent se trouver que dans la ville formelle, forçant ainsi les populations des barrios à s'y rendre et à ne pas rester enfermés dans ce monde à part qu'est le quartier pauvre. De même dans les résidences privées de plage Asia, les employés sont recrutés dans les quartiers pauvres avoisinants. [...]
[...] Fait encore plus marquant, le plan le plus vendu de Caracas ne fait pas apparaître les quartiers pauvres comme faisant partie intégrante de la ville puisque, à leur place, il y a un blanc, parfois agrémenté d'une explication : zone marginale Cette marginalisation est d'autant plus forte que, comme le note Marie France Prevost-Schapira, dans un contexte de repli sur soi, le monde extérieur est perçu comme menaçant En effet, souvent mal connus, les quartiers pauvres sont considérés par un grand nombre de personnes comme des lieux où règnent violence, non-droit et trafic de drogue. Ainsi, toute personne issue d'un de ces quartiers est immédiatement stigmatisée comme un délinquant en puissance et un danger à éviter. Cependant, malgré le développement autarcique des quartiers urbains latino-américains, de nouvelles formes de sociabilité et d'interaction sont apparues pour suppléer aux carences étatiques. [...]
[...] Les quatre articles analysés dans la présente étude montrent donc une évolution indéniable dans l'architecture et la culture urbaines latino- américaines. D'ailleurs, peut-on encore parler d'une culture urbaine ou bien s'agit-il désormais d'un melting pot de cultures différentes ? De façons différentes, voire opposées d'envisager la vie sociale en milieu urbain ? Si les villes du sous-continent ont, à une certaine époque, été des lieux d'intégration et d'ascension sociale, il est certain que cette période est révolue. Dorénavant, l'intégration se fait au sein d'une même classe sociale, se limitant même de plus en plus à un quartier. [...]
[...] C'est pourquoi on a très longtemps vu les villes latino- américaines comme essentiellement différentes de leurs voisines du Nord. Cependant, les difficultés économiques des années 1980 ont engendré de profonds bouleversements, rapprochant ainsi les villes latino-américaines de leurs cousines étatsuniennes. La ville n'est plus apte à accueillir les milieux de nouveaux arrivants attirés par le mirage de l'ascension sociale entretenu par les politiques clientélistes des années socio-populistes. Des revendications d'une violence extrême se développent alors comme lors des émeutes de la faim à Buenos Aires ou lors du caracazo au Venezuela. [...]
[...] Cette brusque rupture des imaginaires de progrès sociaux a alimenté les discours sécuritaires, eux-mêmes dopés par une montée de la violence urbaine et des protestations sociales plus ou moins violentes. Les conséquences du boom de l'urbanisation En effet, malgré le fait que le phénomène soit aggravé par les médias, la recrudescence de la violence et le développement du secteur informel sont les conséquences les plus frappantes du problème de la pauvreté dans l'urbanisation latino-américaine, créant ainsi de véritables ghettos empoisonnés par la criminalité et le trafic de drogue. [...]
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