Les résultats négatifs des référendums portant sur le Traité établissant une Constitution pour l'Europe (TECE) et le Traité de Lisbonne ont ravivé un débat récurrent sur le « déficit démocratique européen » et le fossé qui sépare les citoyens des institutions de l'Union Européenne (UE). Au centre de ce débat se situe la question de la participation des citoyens à l'élaboration des politiques européennes. En France, dire que ces derniers n'y sont pas assez associés est devenu un véritable poncif, tout comme l'est la dénonciation d'une technocratie européenne emmurée dans sa tour d'ivoire et définitivement sourde aux attentes des « vrais gens ».
Malgré tout, les citoyens ont bel et bien formellement en leur possession différents moyens d'agir sur les institutions européennes, et donc de « participer » à leurs politiques et de façon plus générale à la construction européenne dans son ensemble. Cette participation revêt trois formes principales : la démocratie représentative, la démocratie directe et la démocratie participative. La démocratie représentative est bien évidemment celle qui prime pour donner une légitimité démocratique aux politiques de l'Union. Elle se manifeste à la fois par les élections européennes des députés du Parlement Européen (PE) et par les élections nationales, qui de façon indirecte conduisent les citoyens à désigner les couleurs politiques des membres du Conseil européen et du Conseil de l'Union. La démocratie directe n'a pour sa part pas d'existence légale dans les traités de l'Union, mais elle se manifeste à travers chaque référendum national organisé sur un traité européen. Bien qu'ils n'aient rien de systématique, ces référendums jouent un tel rôle dans la construction institutionnelle de l'UE que nous les considérons comme un moment important de participation des citoyens d'un pays membre au devenir de l'Union. Enfin, la démocratie participative, c'est-à-dire la participation des citoyens aux politiques de l'UE par d'autres moyens que les élections, revêt à l'échelle de l'Union de multiples visages. On peut y inclure les consultations des internautes sur le site http://www.europa.eu, les mouvements sociaux ayant un caractère européen du fait de leur objet de revendication, les sondages menés par dans le cadre des eurobaromètres et chaque opportunité qui est laissée aux différents représentants de la société civile pour qu'ils se fassent entendre.
[...] On peut par exemple considérer que lors du référendum sur le Traité de Lisbonne en Irlande un espace public européen existait : le sujet fut couvert par toute la presse européenne, et des indicateurs ont relayé les opinions sur la question. Seulement ces moments européens restent assez rares, et ne suffisent donc pas à ce que les citoyens prennent part, à l'échelle de l'UE, aux décisions prises à Bruxelles. Les espaces publics existants, ceux où, en profondeur, se solidarisent, se confrontent ou éventuellement s'affrontent des acteurs sociaux, politiques, culturels, religieux, ayant le sentiment commun d'être dans le même bateau sont des espaces nationaux ou infranationaux. [...]
[...] La flexibilisation du marché du travail rend ainsi les citoyens passifs et réduit donc encore les possibilités d'une citoyenneté active. Ainsi, les transformations sociétales récentes ont selon Paul Hirst profondément renforcé l'apathie des citoyens, apathie qui met en danger le bon fonctionnement de la démocratie : Tocqueville avait déjà en son temps mis en avant les dangers que comportait un repli des individus sur la sphère privée, ce dernier entrainant une dépolitisation générale et un risque accru de tyrannie de l'opinion[125]. [...]
[...] Les protestations visaient une entreprise et non une institution, et l'instance publique à laquelle il était demandé d'intervenir n'était pas les institutions européennes mais l'État français. En réalité, l'étude des deux auteurs montre que même lorsque le conflit rentre dans la typologie des europrotestations, par exemple parce qu'il est généré par une politique communautaire, le cadre national reste le cadre de revendication dans une très grande majorité des cas. Des acteurs nationaux [font] pression sur leur gouvernement pour que celui-ci agisse au nom des catégories de citoyens qui s'estiment lésés par l'UE A quelques très rares exceptions près[18], l'existence de mouvements de protestation à l'échelle européenne ne permet donc pas non plus de conclure à l'existence d'une prise de pouvoir du citoyen européen Pas d'espace public européen ? [...]
[...] cit. p.105 [182] ibid. [183] Saurugger, S., L'expertise : un mode de participation des groupes d'intérêt au processus décisionnel communautaire in Revue française de science politique, vol 2002- pp. 375-401 [184] ibid. [185] Radaelli, C., The representation of expertise in the European Union in Saurugger, S., Les modes de représentation dans l'Union Européenne, op. cit., pp. 279-302 [186] Boy, D., L'expert citoyen, le citoyen expert Cahiers français, dossier les nouvelles dimensions de la citoyenneté n°316, septembre- octobre 2003, pp. [...]
[...] Selon la théorie délibérative, ces préférences sont au contraire formées par la délibération dans le processus politique. Le processus de création des décisions publiques fait appel à la capacité de raisonnement des individus, en permettant à tout un chacun de présenter des arguments qui justifient les décisions qui doivent être prises. Ces débats contribuent donc à la formation d'une conception partagée de l'intérêt général. L'un des éléments clés est ici l'égalité et la liberté d'accès à l'argumentation. Les avis des individus sont logiquement susceptibles de changer au cours de la délibération. [...]
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