Le 2 octobre prochain le peuple irlandais est appelé à s'exprimer pour la deuxième fois sur le Traité de Lisbonne, après l'avoir rejeté une première fois en juin 2008 et, de ce fait, avoir interrompu le processus de ratification du Traité. L'enjeu est majeur : même si du point de vue juridique ce n'est qu'un traité modificatif du Traité de Nice, le Traité de Lisbonne (TL) reprend en bonne partie le Traité établissant une constitution pour l'Europe (TECE) qui, si n'avait pas été enterré par le refus référendaire des Français et Hollandais en 2005, aurait finalement doté l'Union européenne d'un cadre institutionnel plus intelligible, en raison de la reconnaissance de la personnalité juridique de l'Union, la disparition du système des piliers et l'effacement complet de la Communauté européenne.
Bien que cela n'a pas été le cas, le titre V de la partie III du TECE portant sur l'action extérieure de l'Union est entièrement repris dans le la Cinquième partie du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) qu' avec le Traité sur l'Union européenne (TUE) constitue le TL. Si, comme les spécialistes et les sondages affirment, le oui l'emporte, l'Union aura un "Président" dès le sommet européen prévu fin octobre et une sorte de ministre des Affaires étrangères.
À la lumière de ces changements majeurs, il semble pertinent de se demander quelles seront les conséquences de facto dans l'ordre juridique européen et international. Pour comprendre les changements majeurs qui vont bientôt intéresser l'Union, nous procédons à travers une analyse comparative entre la situation actuelle et celle qui probablement pourrait être mise en place. Le conditionnel oblige dans la mesure que, comme dans toutes dispositions législatives et institutionnelles, il y aura un décalage entre Law in Books et Law in Act.
Quoi qu'il en soit, il convient d'abord de revenir sur la question de la personnalité juridique qui, même si elle a déjà fait couler beaucoup d'encre, reste une question incontournable de droit (1) pour ensuite se concentrer sur les relations avec les organisations internationales et les pays tiers (2). Conscients de l'ampleur de la matière, dans cette deuxième partie, notre analyse portera surtout sur les changements majeurs introduits par le Traité de Lisbonne, surtout en relation au statut de l'Union dans les organisations internationales et dans la mise en place du Service européen de l'action extérieure (SEAE), à travers le rôle du nouveau Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (HR).
[...] Une conférence intergouvernementale est une succession de réunions rassemblant des représentants des gouvernements nationaux à différents niveaux (fonctionnaires, ministres, chefs d'Etat et de gouvernement. Cf. Jean-Luc SAURON, Comprendre le Traité de Lisbonne, Paris, Gualino Editeur p Guy MILTON, Jacques KELLER-NOËLLET, The Immediate Origins of the European Constitution. From Nice to Laeken, in Giuliano AMATO (et al.), ( sous la dir Genèse et destin de la Constitution européenne, Bruxelles, Bruylant p Jean-Luc SAURON, op.cit., p Ibid., p Dans le cadre de ce papier nous utilisons l'abréviation NTUE pour indique le nouveaux traité sur l'Union européenne de manière à le distinguer de l'actuel TUE et à éviter des éventuelles confusions. [...]
[...] En d'autres termes, la Communauté ne peut devenir membre d'une organisation internationale que si elle est compétente : il faut que l'objet de l'organisation internationale considérée rentre dans les compétences de la Communauté. Puisque, on l'a dit, le TL n'apporte de nouveautés substantielles dans la matière, le même problème va être transposé à l'Union. Vraisemblablement, sera l'action jurisprudentielle de la Cour à résoudre des éventuelles tensions, d'autant plus qu'avec l'entrée en vigueur du TL elle sera compétente pour toutes les matières relevant du III pilier, actuellement soustraites à sa compétence. [...]
[...] Au-delà de la classification juridique, on peut aussi distinguer le degré de force ou faiblesse du mécanisme de coordination de l'Union. Ainsi, par exemple, ce degré de coordination est fort dans l'OMC, moyen dans l'Assemblée générale des Nation unis et dans l'OSCE, très faible dans le Conseil des Nations Unis et dans les institutions de Bretton Woods et inexistant dans le G-8 et dans l'OTAN[54] Dans l'Etat actuel des textes, les relations de la Communauté européenne avec les organisations internationales sont visées par les articles 302 et 304 TCE, dont les dispositions sont pour l'essentiel reprises par l'article 220 TFUE[55]. [...]
[...] Quand les pays membres de l'Union sont unis, ils constituent un groupe de vote assez puissant, capable d'influencer le vote d'autre pays, surtout voisins[51]. La Présidence de l'Union, quant à elle, représente l'Union dans les matières relevant aussi bien du deuxième pilier[52] (PESC/PESD) que du troisième (JAI). Cette ambiguïté découlant des traités actuels a donné lieu à la pratique de la composition bicéphale (Présidence et Commission conjointement) des délégations de la Communauté dans les conférences internationales, de même qu'à la signature conjointe d'accords internationaux, même dans les matières de compétence communautaire. [...]
[...] D'autre part, l'accent mis par le TUE sur les relations entre les Etats membres et la coopération entre eux, notamment aux articles 2 TUE, est considéré comme une manière explicite d'empêcher l'affirmation de la personnalité juridique internationale de l'Union, en ce sens mieux concevable en tant qu'« union fonctionnelle d'Etat à finalité politique - Apports du TL : entre continuité et innovation La question de la personnalité juridique, on l'a dit, reste une question incontournable de droit et bien qu'elle puisse être considérée comme une querelle doctrinale, sa résolution a des conséquences importantes tant sur le plan juridique que politique. Du point de vue juridique, cette situation non bien définie risque de compromettre le principe de sécurité juridique. [...]
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