Didier Bigo est maître de conférences à Sciences Po Paris depuis 1988, professeur à King's College à Londres et chercheur associé au Centre d'Étude et de Recherche internationale de la Fondation Nationale des Sciences Politiques (CERI) depuis 1990. Il est rédacteur en chef de la revue trimestrielle Cultures et Conflits depuis sa création en 1990 et corédacteur en chef de la revue International Political Sociology de l'International studies association. Président du Centre d'études sur les conflits, il est aussi coordinateur scientifique du projet Challenge.
En 1996, Bigo observe une double extension des activités de police et des ministères de la Justice ou de l'Intérieur selon les pays européens (grâce eux textes Schengen, Trévi, Europol) : extension géographique avec la coopération européenne, et extension du rôle et des compétences des diverses agences affectées à la sécurité.
En moins de 30 ans, nous sommes passés d'une conception politique où la police était une activité dépendante de l'État et limitée à son territoire, à la police comme objet de considérations internationales, la police nationale déléguant certaines tâches aux polices étrangères. La nécessaire adaptation des polices à l'européanisation politique, les luttes entre bureaucraties et les agences pour un contrôle des flux transnationaux de population participent de cette européanisation policière.
Cette extension des activités a permis une internationalisation de la Justice et de l'Intérieur. La collaboration policière opérationnelle, qui date des années 1970, est relativement ancienne, mais ce qui est nouveau, c'est qu'on la reconnaît officiellement pour l'utiliser comme argument de lutte contre l'insécurité. Petit à petit, on va intégrer à la collaboration policière les questions du terrorisme, de la drogue, de l'immigration, de l'asile et du sentiment d'insécurité.
[...] Europol constitue-t-elle pour autant la police européenne du futur ? Contrairement à Interpol, elle peut bénéficier d'une grande autonomie d'exécution de par son statut, elle dispose également d'une base de données plus étendue, mais plus discutable. Le problème c'est qu'elle reste à la merci des choix politiques des gouvernants, à cause de son caractère intergouvernemental. En 20 ans, les différents acteurs ont eux-mêmes engendré un champ de la sécurité européen entre États nation et fédéralisme. On est aujourd'hui nous dit Bigo, en présence d'une dialectique entre élargissement au-delà du national et autonomisation des acteurs de la sécurité.» Chapitre la légitimation de la sécurité intérieure Vérité et sécurité Les notions de sécurité et de sûreté sont instables et ne sont reliées que depuis récemment à la question du crime. [...]
[...] (Groupe d'assistance mutuelle.) Chapitre 3 : l'européanisation de la sécurité : cadres et luttes Le processus d'européanisation Les services spécialisés vont préférer travailler avec leurs homologues internationaux plutôt qu'avec des collègues nationaux qui partagent des conceptions différentes. De plus, les politiques vont se sentir de plus en plus impuissants pour régler les problèmes de terrorisme ou de drogue qu'ils vont reléguer à l'échelle européenne. Ce cadre va alors connecter contrôle du crime, maîtrise de l'immigration et gestion de flux de personnes. [...]
[...] Europol : Polices en réseaux À partir des années 90, l'idée d'une structure européenne en matière de sécurité va progressivement faire son chemin. Cette organisation de l'europolice qui s'est faite tout d'abord par une approche bottom-up nécessitait néanmoins l'aval des chefs d'État, frileux de perdre une partie de leur souveraineté en matière sécuritaire. Le chancelier Kohl va néanmoins demander lors du sommet du 29 juin 1991 de Luxembourg la constitution immédiate d'une europolice à partir du modèle fédéral existant déjà en Allemagne. [...]
[...] Va alors se mettre en place une dialectique forte : à savoir d'un côté les polices en réseau, de l'autre la police à distance. Cette nouvelle configuration ouvre sur une ère de plus grande liberté de circulation pour le plus grand nombre des citoyens tout en concentrant la surveillance sur les minorités et les flux transfrontaliers.» Polices en réseaux Elle s'illustre par l'existence des officiers de liaison, les ponts» entre les polices européennes qui fournissent. Il n'y a pas un centre, un réseau, mais des réseaux antagonistes engagés dans des transactions. [...]
[...] Cependant, l'amalgame grandissant entre terroriste et immigré pousse à considérer d'emblée le réfugié comme suspect, et donc le contrôle des frontières va souvent se faire par discrimination ou délit de faciès Les accords Schengen II vont créer deux mesures capitales : à la fois le détachement des fonctionnaires de liaison, mais aussi la création d'un Système d'Information Schengen (SIS) qui regroupe les renseignements venus des pays signataires concernant les objets et personnes impliqués dans la grande criminalité [ . ] et les étrangers devant faire l'objet d'un refus d'admission pour des raisons d'ordre public et de Sécurité. Pour les États membres encore attachés à leur souveraineté, l'ennemi n'est pas la construction européenne, mais bel et bien la Commission, symbole du danger fédéral avec la “procédure majoritaire”. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture