Licencié en droit et en histoire en 1942, Edgar Nahoum, de son vrai nom, entre en Résistance la même année en tant que lieutenant des Forces françaises combattantes. Après deux années dans la Résistance française, desquelles il garde le pseudonyme de Morin, il devient attaché à l'Etat-major de la première armée française en Allemagne en 1945, puis accède au poste de Chef du bureau « Propagande » du gouvernement militaire français en 1946. A la Libération, la publication de son premier ouvrage L'an zéro de l'Allemagne lui vaut d'être repéré par Maurice Thorez qui l'invite à écrire pour la revue Les Lettres françaises. Néanmoins, Edgar Morin choisit dès 1949 de ne pas marcher dans les pas du Parti Communiste français et s'affirme en tant que résistant antistalinien.
Sur les conseils de Maurice Merleau-Ponty et de Vladimir Jankélévitch, Egard Morin entre au CNRS en 1950 au sein duquel il dirigera de nombreuses études ayant trait aux pratiques culturelles des sociétés contemporaines.
[...] Est-ce à dire que Morin n'invente rien ? Evidemment non puisque la finesse de l'analyse de Morin réside dans la perception des nouvelles menaces (la guerre froide et le risque nucléaire), des nouveaux jeux de puissance (l'Europe-province) et des espoirs culturels (la sauvegarde des diversités). Néanmoins, il semble que la qualité de néo-européen de Morin ait pesé sur sa réflexion. En effet, le prologue revenant sur l'itinéraire intellectuel de Morin peut être compris à la fois comme un gage d'authenticité et comme un aveu de faiblesse. [...]
[...] De même, il critique les dérives de la Raison qui a fermé les yeux sur les processus de rationalisation (différents de la rationalité) qui sont des machines à justifier de façon cohérente toute croyance ou idée qui veut échapper à la critique rationnelle (p. 111). L'intention de ce long questionnement est, en définitive, d'appeler à une nouvelle métamorphose de l'identité culturelle européenne reposant sur ses fondements passés mais épurés de leurs dérives. En ce sens, le bouillon de culture européen a été et demeure bouillon (p. 147) et C'est la dialogique qui est au cœur de l'identité culturelle européenne (p. 150) comme gage d'un dialogue des pluralités dans le changement (p. 149). [...]
[...] Mais, Morin prend conscience - et cela est l'apport fondamental de sa pensée sur l'Europe- de l'angoissante difficulté rencontrée par le chercheur qui tente de penser l'Europe : la quête d'une essence européenne se heurte à la multitude, la désunion, le désordre. Penser l'Europe revient en fait à considérer un unitas multiplex : L'Europe est un Complexe dont le propre est d'assembler sans les confondre les plus grandes diversités et d'associer les contraires de façon non séparable (p. 22). Plus que tout, penser l'Europe passe par un paradigme de complexité : Il nous faut concevoir la complexité que recouvre le mot d'Europe. [...]
[...] La re-possession passe alors par le vouloir-vivre face au Néant (p. 209). Sortir de la moiteur gastrique nationale nécessite, selon Morin, un réveil. Ce réveil, qui a pour but la meilleure visibilité du destin commun européen, doit être porté par des éclaireurs Il s'agit de restaurer les intellectuels dans la cause européenne. Des intellectuels capables de concilier la leçon nihiliste qui nous apprend à affronter le Néant avec la problématisation généralisée [qui] nous invite à recommencer l'aventure européenne, mais avec une ouverture nouvelle sur le monde (p. [...]
[...] Morin distingue au sein de l'histoire culturelle européenne ce qu'il nomme un marché commun des idées (p. 84) dans lequel les idées circulent jusqu'à réussir à fonder, à l'époque moderne, une culture qui transcende les nations. Il ne doute donc pas que l'Europe constitue une réalité culturelle polycentrique (p. 85). Au sein de cette réalité culturelle l'auteur opère une distinction souple entre la culture européenne (qu'il synthétise sous la forme d'un socle judéo- christiano-gréco-latin) et la civilisation européenne (conçue comme l'émanation universalisable issue des jeux dialogiques qui traversent la culture européenne. [...]
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