M. Badinter, qui se dit amoureux des Constitutions, a choisi à travers cet ouvrage, qui n'a aucune portée juridique directe, d'apporter une contribution personnelle à ce débat. Face à ces objectifs, qui sont en fait autant de titres à remplir (Fondements, Gouvernement, Parlement, etc.), il existe évidemment un grand nombre de réponses possibles. S'il est essentiel d'étudier le projet Badinter, c'est parce que ce dernier apporte une réponse originale qui ne relève pas d'un parti-pris idéologique entre fédéralistes et souverainistes, ou entre partisans de la méthode communautaire et tenants de la coopération intergouvernementale. Comme nous allons le voir, le projet Badinter représente au contraire une voie médiane qui pourrait bien satisfaire les eurosceptiques comme les intégrationnistes, dans un univers européen, où les maîtres mots sont toujours « conciliation » et « compromis »
[...] Point important, là encore commun aux autres projets de Constitution européenne, le projet Badinter intègre la Charte des droits fondamentaux et la Convention européenne de sauvegarde des DDH, qui acquièrent ainsi une portée juridique. Le préambule et ces deux premiers titres, sous des apparences quelques peu lyriques et idéalistes, sont tout à fait essentiels puisqu'ils légitiment le projet européen et pourraient faciliter l'adhésion des Européens à ce qui pourrait être une véritable Europe des citoyens Un Président à même de répondre au téléphone Le projet européen ne doit pas seulement être compréhensible, il doit aussi être visible. [...]
[...] Montesquieu retrouvé : une séparation nette des pouvoirs Un exécutif quadricéphale : synergie ou synarchie ? Badinter propose de créer un véritable Gouvernement de l'Union européenne avec un exécutif quadricéphale. En effet, il n'existe pas aujourd'hui de Gouvernement de l'UE. La création des piliers a conduit à un éclatement de la fonction exécutive qui est partagée entre la Commission, le Conseil des ministres, le Coreper et les exécutifs nationaux du Conseil européen. Là encore, on s'accorde en général sur la nécessité de créer un Gouvernement européen, mais la question est qui devrait alors l'incarner ? [...]
[...] De cette façon, on reconnaît au PE un vrai pouvoir de faire les lois. Le Parlement européen est saisi des projets de loi organique ou ordinaire (préalablement préparés par la Commission et adoptés par le Conseil des ministres) ; il fixera dans des lois cadres les principes directeurs que la Commission devra mettre en œuvre. Après l'adoption du texte, le Conseil des ministres peut éventuellement demander une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ses articles. En plus de lui reconnaître pleinement sa fonction législative, le projet Badinter investit le Parlement européen d'une véritable fonction de contrôle. [...]
[...] Toute Constitution est aussi l'expression d'une souveraineté. Là encore, un obstacle lié aux cultures nationales se présentait, puisque la souveraineté émane d'un peuple, d'une volonté nationale, or existe-t-il un peuple européen ? Autre difficulté, s'il existe bien une souveraineté européenne, comment la concilier avec les souverainetés nationales ? Autant d'interrogations essentielles auxquelles le projet Badinter apporte là encore une réponse originale fondée sur un mécano institutionnel ingénieux qui fait de l'UE une Fédération d'Etats souverains. II) Un mécano institutionnel ingénieux pour une Fédération d'Etats souverains A. [...]
[...] En outre, les souverainistes prétendent que, à terme, si l'on appliquait le projet Badinter, la légitimité du PE finirait par éliminer celle du Conseil. Ces opposants omettent peut-être un article essentiel dans le projet Badinter, qui, une fois de plus, confirme que l'UE telle que la conçoit Badinter n'est pas une Fédération mais bien une Fédération d'Etats souverains. Titre III, article 16 : l'Union agit dans le cadre des compétences qui lui sont attribuées par les Etats-membres. La compétence de droit commun appartient aux Etats-membres Le problème de la répartition des compétences est un autre de ces débats importants des dernières années. [...]
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