Dès le congrès de La Haye, en 1948, la construction européenne avait suscité des oppositions. Les fédéralistes étaient partisans d'une union transcendant les États-nations et faisant d'eux des entités fédérés, tandis que les « souverainistes » ou « intergouvernementalistes », pensaient que l'Europe devait s'apparenter à une confédération, qui reposerait donc uniquement sur une coopération entre les États. L'Europe s'est alors construite dans une perspective de compromis, essayant de concilier les deux points de vue.
Une fédération est, selon Maurice Duverger, un « super État par rapport aux États membres ». Elle se caractérise donc par la « coexistence d'ordres juridiques propres aux États fédérés et d'un ordre juridique supérieur, celui de l'État fédéral » (Hugues Portelli). Quant à l'État-nation, il s'agit de la concordance entre un État, en tant qu'organisation politique, et une nation, c'est-à-dire des individus qui se considèrent comme liés et comme appartenant à un même groupe.
[...] L'Europe emprunte donc à la fois à la fédération et à la confédération. Nous allons donner quelques exemples qui montrent qu'elle relève à la fois de l'une et de l'autre. Fédération: Applicabilité directe (lois s'appliquent aux individus, non pas aux États, pour assurer l'application des mesures communautaires) et primauté du droit communautaire (avec, entre autres, l'Arrêt Costa contre Enel de 1964). Si l'on prend la définition de Georges Scelle: fédération se caractérise par deux principes: l'autonomie et la participation. En ce qui concerne le principe de participation, le Conseil de l'Union Européenne est une institution qui représente les États fédérés de manière égalitaire (chaque pays est représenté par 1 ministre, ce qui peut faire penser au Sénat américain, où chaque État est représenté par deux sénateurs, quelle que soit sa taille et son nombre d'habitants). [...]
[...] Les procédures intergouvernementales s'amenuisent: dans le traité d'Amsterdam (1997), les règles concernant les visas, l'asile, l'immigration et les autres politiques relatives à la libre circulation des personnes avaient été ainsi communautarisées c'est-à-dire qu'elles ne relevaient plus du 3ème pilier, mais du premier (celui qui applique la méthode communautaire). Le traité de Lisbonne parachève quant à lui ce mouvement en appliquant la procédure de décision communautaire - avec certaines adaptations - à l'ensemble des politiques relatives à l'espace de liberté, de sécurité et de justice. Mais, d'un autre côté, l'État-nation est toujours privilégié. Quelques exemples le prouvent bien. La constitution européenne instaurée par le traité de Lisbonne, n'est qu'un traité. Il ne s'agit pas d'une constitution dans le sens où un texte constitutionnel encadre normalement l'exercice d'une souveraineté. [...]
[...] La question que nous nous poserons dans cet exposé est de savoir si la notion de fédération d'États-nations est appropriée à l'Europe. Pour y répondre, nous expliquerons d'abord en quoi cette expression résume bien l'état actuel de l'Europe avant d'évoquer son caractère profondément antinomique La fédération d'États-nations, une volonté de consensus sur la nature de l'Europe Dans la théorie, l'Europe repose sur trois piliers, qui intègrent soit la méthode communautaire (pilier soit la coopération intergouvernementale (piliers 2 et 3). a. [...]
[...] De plus, le problème de la souveraineté limite ce processus de fédéralisation s'il existe. En effet, aujourd'hui, aucun État membre de l'Union européenne ne serait prêt à renoncer à sa souveraineté. Par ailleurs, que penser de la primauté du droit communautaire sur le droit national, par exemple? N'est-ce pas le signe que l'Europe prend le pas sur les États-nations? Pour compléter cette antinomie entre fédération et État-nation, on peut évoquer le fait que certains États s'opposent au principe même de fédération. b. [...]
[...] Or, une fédération repose justement sur le partage de la souveraineté entre deux autorités distinctes. L'Europe dépasse donc cette conception historique de la souveraineté des États-nations, bien que celle-ci semble aujourd'hui quelque peu désuète. Va-t-on vers la constitution d'une nouvelle entité au niveau européen? L'intégration communautaire apparaît de plus en plus comme la naissance d'un nouvel État qui tend à soumettre les États à une nouvelle autorité supranationale. En effet, le terme même de fédération suppose la création d'un État fédéral. [...]
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