« On ne nait pas européen, on le devient ». Telle pourrait être la devise de l'Europe tant la notion d'identité européenne est mouvante et demande une constante remise en question. Comme l'indique Carole Lager, la notion d'identité est un « construit évolutif qui vient donner du sens et de la valeur à une relation ou à un ensemble de relations ». Dans une autre acception, on peut tout simplement la considérer comme l'ensemble des valeurs que partage une communauté d'êtres humains qui ont un sentiment d'appartenance commun. Une chose est sûre, si cette notion semble difficile à définir précisément, elle revêt une importance capitale puisqu'elle est à la base même de la construction européenne et du droit communautaire. En effet, les nouveaux défis auxquels l'Union européenne doit faire face obligent les décideurs européens à définir clairement leur vision de l'identité européenne, afin de légitimer leur action auprès du peuple européen.
Parmi ces défis, il y a notamment celui des élargissements. On l'a vu, que ce soit en France ou ailleurs, la question de l'adhésion ou non de la Turquie à l'Union Européenne a suscité de vifs débats, en posant notamment le problème de la délimitation des frontières géographiques de l'Europe mais aussi celle de la dimension culturelle et spirituelle de l'Union Européenne. On le sait, l'Europe est traditionnellement imprégnée d'une tradition politique romaine, d'une philosophie grecque et d'une culture essentiellement judéo-chrétienne. Et selon Carole Lager l'identité est un « un ensemble de représentations renvoyant à une histoire avec des racines, une permanence dans le temps, des traditions… ». Or, depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, l'Islam a tendance à inquiéter la civilisation occidentale notamment à cause des mouvements terroristes islamiques. Une réelle opposition culturelle et spirituelle s'est mise en place. Ce « choc des civilisations », comme l'appelait Samuel Huntington, pousse aujourd'hui les euro-nationalistes à s'opposer à la candidature turque, d'autant plus que son adhésion ouvrirait les frontières de l'Union à la poudrière du Proche-Orient.
Cette notion d'identité européenne recouvre également une importance primordiale d'un point de vue purement politique. En effet, c'est à partir d'elle que l'Union européenne va pouvoir définir une légitimité politique aux yeux de ses citoyens. Les rédacteurs du traité établissant une Constitution pour l'Europe avaient d'ailleurs mis cette question au centre des débats. En fait, dès la Charte des droits fondamentaux adoptée le 7 décembre 2000 à Nice, les décideurs européens ont tenté de formaliser l'identité européenne tout en réfléchissant à ses défis.
[...] Cette peur de l'autre est sans nul doute néfaste à la création identité européenne forte qui laisse la part belle à l'ouverture et au métissage culturel. La vision des libéraux et républicains La vision défendue par les libéraux et républicains européens se caractérise par la volonté de fonder l'identité européenne sur une culture politique commune ainsi que sur une identité civique reposant sur des principes universels. Ils distinguent très clairement ce qui relève de la sphère privée et de la sphère publique. [...]
[...] La plupart des pays de l'Union européenne sont majoritairement chrétiens, mais cela suffit-t-il pour avancer l'idée d'une identité européenne chrétienne ? Même si l'Europe est encore aujourd'hui fortement marquée par le christianisme (codes, usages, nombreuses églises elle se caractérise aussi par l'affirmation de la laïcité dans de nombreux pays. Le critère religieux apparait donc très réducteur et critiquable puisqu'il contribue à mettre un frein à l'ouverture et au métissage culturel qui sont des valeurs fortes partagées par l'ensemble des pays européens. [...]
[...] Des critères ont déjà été posés lors du Conseil européen de Copenhague en 1993. Il s'agit entre autres du respect de valeurs universelles telles que les droits de l'homme ou encore la stabilité des institutions ou de l'économie du pays. Mais ces critères apparaissent bien maigres puisqu'ils permettent à presque n'importe quel pays de déposer sa candidature (exemple du Maroc). Or il est bien évident que l'UE ne compte pas s'élargir à l'infini. C'est pourquoi la définition d'une identité européenne précise pourrait permettre de délimiter clairement les conditions d'appartenance à l'Union. [...]
[...] Une question complexe qui dévoile des enjeux importants Il convient tout d'abord de définir ce qu'est l'identité européenne avant de voir les enjeux qui lui sont associés. Qu'est-ce que l'identité européenne ? La notion d'identité européenne est difficile à définir du fait même de la diversité des peuples européens. De plus il s'agit d'un concept dynamique qu'il faut redéfinir constamment. Une notion incertaine ( ) Edgar Morin disait de l'Europe en 1990 qu'elle était une notion incertaine Incertaine de par la difficulté de définir précisément ses frontières. [...]
[...] La vision des constructivistes Les constructivistes quant à eux défendent l'idée selon laquelle l'identité nait avant tout des échanges culturels, politiques ou encore civiques. Cette conception se rapproche de l'idée évoquée précédemment selon laquelle la construction d'une identité européenne doit se faire de manière dynamique, via l'approfondissement des échanges entre les peuples. Mais on peut se demander si cette invitation à la diversité et à l'échange ne peut pas provoquer en quelque sorte une perte d'identité propre des individus, qui se retrouveraient noyés dans un flot de références qu'ils ne maitriseraient pas. [...]
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