"Groupes d'intérêt", "groupes de pression", "lobbies" : plusieurs expressions pour désigner une même réalité, celles de ces groupes associatifs, syndicaux, qui visent à représenter certains intérêts liés à une profession ou une activité, en exerçant une pression directe sur le pouvoir politique. Selon Thierry Lefebure, le lobbying est d'ailleurs synthétiquement "l'art et la manière d'influencer les décideurs"…Cette activité dite d'influence, perçue plutôt négativement en France car méconnue, a néanmoins acquis une place réelle dans le mode de fonctionnement de l'Union Européenne. Ainsi, certaines décisions communautaires -directives, règlements- sont en partie la conséquence de stratégies d'influence de ces groupes, qui interagissent avec le pouvoir européen. Dès lors, il est légitime de s'interroger sur l'action des lobbies : comment parviennent-ils à défendre leurs intérêts au niveau européen ?
En premier lieu, quel est le profil de ces groupes; retrouve-t-on chez eux des caractéristiques communes, leurs stratégies d'action sont-elles semblables ? Quelle est la nature de leurs relations vis-à-vis des institutions européennes : peut-on parler de coopération, voire d'influence mutuelle, ou a contrario de pression unilatérale ? Enfin, si le lobbying participe effectivement au fonctionnement de l'Union sur le mode du pluralisme, ne faudrait-il pas envisager une officialisation ?
[...] Les institutions utilisent donc les groupes comme preuve de leur légitimité, mais elle restent malgré tout seules dépositaires du pouvoir politique communautaire. Vers une officialisation réglementée ? Le débat sur la codification du lobbying reste très actuel, car il existe actuellement un vide juridique concernant l'encadrement de cette activité. Malgré la volonté de la part de la Commission d'encadrer l'échange qu'elle pratique avec les groupes, grâce à un code de conduite qu'elle a mis en place, elle se refuse toujours à une quelconque réglementation. [...]
[...] En fait, les commissaires préconisent plutôt une "autorégulation" des groupes, ce qui se traduit par ce code déontologique avec refus de tout enregistrement. Le Parlement, de son côté, se montre plus restrictif à propos de l'accès de ces groupes aux institutions. Son règlement intérieur prévoit que les personnes susceptibles de fournir régulièrement des informations aux parlementaires -autrement dit, les groupes d'intérêt- doivent respecter un code de conduite et s'inscrire dans un registre tenu par les questeurs (article 9.2 et annexe IX). [...]
[...] Grâce à ces contacts "officieux" - non pas dans le sens qu'ils sont déconseillés mais plutôt qu'ils restent dans l'ombre ils influent de façon directe sur le pouvoir politique. Notons en tant qu'exemple qu'en 2004, la Commission s'est entretenue à 65 reprises avec des responsables de l'UNICE, et il en est de même avec certains grands syndicats et la COPA. Il est toutefois ardu d'évaluer précisément le poids de cette influence directe sur les décisions communautaires, étant donné le flou qui entoure ces rencontres. [...]
[...] Quant aux régions, elles sont de plus en plus présentes individuellement ou collectivement, -tendance parfois dénoncée-, mais il est vrai que le fait régional a pris de l'envergure, du fait des subventions considérables mises en jeu et distribuées à Bruxelles Dans ce domaine, on constate l'avance prise par les Länder ou provinces espagnoles, régions fortement indépendantes du pouvoir central dans leur pays. Notons enfin que les ONG, groupes se réclamant de la "société civile", connaissent une forte expansion; l'apparition du BEUC (bureau européen des unions de consommateurs) en est d'ailleurs un exemple probant. [...]
[...] Par ailleurs, que les lobbies possèdent ou non un grand pouvoir d'influence sur le pouvoir politique - affirmation de certains qui ne se révèle pas toujours juste-, il est toutefois reconnu que la tendance actuelle à la multiplication et à la professionnalisation des groupes indique d'une part, que l'interaction avec les institutions concerne des enjeux de plus en plus larges et diversifiés; d'autre part que les groupes d'intérêt sont associés aux dispositifs d'élaboration des politiques publiques, ce qui garantit le fait que le pouvoir européen se préoccupe des intérêts des citoyens, même s'ils ne sont représentés que partiellement. Bibliographie - Le lobbying à Paris, Washington, Bruxelles, Alan Butt Philip, Les notes de l'IFRI - Groupes de pression en Europe, Bertrand Vayssière, Privat - Comment mener son lobbying à Bruxelles, Emmanuelle Weiss - "Les ficelles du lobbying", in Alternatives économiques, juillet 1993 - Les groupes d'intérêt, S.Saurugger, E. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture