La large victoire du New Labour de Tony Blair aux élections générales de juin 2001 a reposé la question de l'adhésion de la Grande-Bretagne à l'Union économique et monétaire (UEM). Dès le début de son premier mandat, en 1997, le premier ministre s'était en effet engagé à réaliser une évaluation des cinq critères économiques, définis par le chancelier de l'Echiquier Gordon Brown, dans les deux ans suivant la réélection des travaillistes. Pour ne pas s'aliéner des électeurs majoritairement eurosceptiques, Tony Blair a toutefois largement ignoré le sujet de l'euro au cours de la dernière campagne législative ; cette prudence fut confirmée après les élections, avec le remplacement de Robin Cook, très europhile, par Jack Straw au Foreign Office. Ce mois-ci, Gordon Brown devait fournir une évaluation des cinq tests, auxquels une réponse positive doit entraîner l'organisation d'un référendum dans les quatre mois suivants. M. Brown a repoussé l'annonce des résultats au 9 juin, mais sa décision semble prise : il n'y aura pas de référendum sur la monnaie unique dans les semaines qui viennent. Pourquoi une telle réticence des Britanniques vis-à-vis de l'euro, quand la plupart des Européens sont satisfaits de leur monnaie commune ? Leur hostilité n'exprime-t-elle qu'un attachement symbolique à la livre ? L'étude approfondie et prospective de l'économie britannique révèle en réalité que, si l'adhésion paraît avantageuse selon les critères communautaires, les bénéfices sont nettement moins évidents du strict point de vue de la Grande-Bretagne, compte tenu de ses spécificités économiques. L'adhésion à l'euro ne doit cependant pas être considérée comme contraire aux intérêts britanniques : les risques d'entrée dans l'UEM peuvent être largement atténués, et compensés à long terme par une convergence économique accrue et une influence politique renforcée au sein de l'Union européenne (UE).
[...] D'autre part, il convient de préciser que la Grande-Bretagne ne peut pas simplement extrapoler de la politique monétaire actuelle de la zone euro ce que celle-ci serait après son entrée dans l'UEM : l'adhésion britannique influera nécessairement sur l'action de la BCE, qui prendra en considération les besoins de la troisième économie de l'UE. La négociation d'une parité d'entrée judicieuse Surtout, la Grande-Bretagne devra, en cas d'adhésion, négocier avec ses partenaires les modalités d'entrée dans l'UEM, et notamment la parité euro/sterling. [...]
[...] Les avantages doivent être nuancés dans le cas particulier de l'économie britannique La Grande-Bretagne présente cependant une situation particulière par rapport à la zone euro, et notamment par rapport aux grandes économies du continent, comme l'Allemagne et la France. Les cinq critères de Gordon Brown et la singularité britannique C'est précisément pour tenir compte des spécificités de l'économie britannique que, le 27 octobre 1997, le chancelier Gordon Brown a défini cinq critères dont le respect, laissé à l'appréciation du Trésor, conditionnera le passage à l'euro de la Grande-Bretagne. [...]
[...] Comme le Danemark et contrairement à la Suède, la Grande-Bretagne n'est en effet pas tenue juridiquement de rejoindre l'UEM. Surtout, les critères de Gordon Brown ne peuvent faire l'objet d'une réponse indiscutable et objective ; les économistes britanniques sont d'ailleurs en désaccord sur l'opportunité de l'adhésion à l'euro. En effet, si la divergence à court terme entre les cycles européen et britannique et la grande flexibilité de l'économie font l'objet d'un consensus, les autres critères - l'impact de l'euro sur les investissements et la City, et surtout le test de synthèse concernant les effets sur la stabilité de l'économie britannique - appellent des réponses plus contradictoires ou nuancées. [...]
[...] Si l'on considère que l'intégration européenne a globalement profité à la Grande-Bretagne depuis 1973, force est de constater que, pour peser encore dans les grandes orientations de l'UE, la participation à l'euro est indispensable. Il apparaît, en effet, qu'après l'élargissement à l'Est, l'Union s'organisera en trois cercles concentriques plus ou moins nets : la zone euro, les pays avancés extérieurs à l'UEM et les nouveaux entrants ; pour influencer les décisions, il faudra appartenir au premier cercle, la zone euro. [...]
[...] L'adhésion paraît avantageuse selon les critères communautaires La conformité de la Grande-Bretagne aux critères de Maastricht L'adhésion formelle d'un pays de l'UE à l'UEM est conditionnée par le respect de plusieurs critères fixés par le traité de Maastricht : l'indépendance de la banque centrale du pays concerné ; la participation de sa devise au mécanisme de change européen (MCE) au cours des deux années précédant l'examen de sa situation par le Conseil européen, sans connaître de tension grave, doublée d'une stabilité du taux de change ; un taux d'inflation qui ne dépasse pas de plus de celui des trois pays de l'UE ayant le taux le plus faible au cours d'une période d'un an précédant l'examen ; des taux d'intérêt nominaux moyens à long terme n'excédant pas de plus de les taux moyens des trois pays de l'UE qui présentent les meilleurs résultats en termes de stabilité des prix au cours de l'année précédant l'examen ; des finances publiques saines, c'est-à-dire un déficit public ne dépassant pas du PIB et une dette publique n'excédant pas du PIB (le dépassement de ces seuils n'est autorisé qu'à titre exceptionnel et temporaire, et les deux ratios doivent avoir sensiblement diminué dans la période précédant l'examen d'entrée). Le Royaume-Uni respecte globalement ces critères. [...]
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