L'histoire des frontières hongroises et leur gestion actuelle pourraient constituer une exemplification de ces phénomènes. En effet, la question de la frontière a un poids tout particulier dans l'histoire de la construction de son état nation, et cette histoire elle-même marque et divise la conscience collective hongroise encore aujourd'hui. Selon Kende, "les Hongrois ont la conviction que, depuis longtemps, ils sont la victime sinon d'une cabale, au moins de la mauvaise constellation des étoiles". Si on effectue un survol rapide de l'histoire hongroise, il est assez facile de trouver les fondements d'un tel pessimisme. Les Hongrois ne recouvrent en 1918 une indépendance perdue depuis 5 siècles que pour perdre près de deux tiers de leur territoire et la moitié de leur population. Par la suite, la haine et le révisionnisme nés du traité de Trianon ont été les déterminants essentiels de la politique extérieure de la Hongrie durant l'entre-deux guerre, puis durant la deuxième guerre mondiale. Elle se battra en vain pour ses provinces, reperdant celles concédées par Hitler durant la seconde guerre mondiale, et perdant à nouveau progressivement son indépendance à partir de 1945 pour devenir un des satellites de l'Union Soviétique. Toutefois, sitôt le rideau de fer levé, ces mêmes problèmes d'identité et de haines vont réapparaître en Hongrie pour diviser, parfois la population, toujours la classe politique et les structures partisanes.
Il s'agira ici de traiter de la gestion de la notion de frontière à la fois par la conscience collective hongroise, par ses acteurs politiques, et par l'Union Européenne depuis 1989, année qui marque l'année de la chute du mur et, en Hongrie, la rédaction de la nouvelle constitution. De façon générale, la frontière est le résultat de l'émergence de l'Etat qui historiquement commence avec le traité de Westphalie et reste consacrée par la charte des Nations Unies. Étant la limite géographique de l'Etat et de sa souveraineté, elle sépare et divise. Pour la Hongrie, nous l'entendrons comme la limite séparant la Hongrie des pays qui lui sont voisins, c'est-à-dire au sud et sud-ouest la Serbie, la Croatie et la Slovénie, à l'ouest l'Autriche, au nord la Slovaquie, et à l'est la Roumanie et l'Ukraine. Il est important de préciser ici que la Croatie, la Serbie et la Slovénie sont de "nouveaux" voisins pour la Hongrie qui ne deviennent des états nations qu'à la suite de l'éclatement de la Yougoslavie. La Slovaquie est également un nouveau voisin suite à la séparation en deux pays distincts de la Tchécoslovaquie. Ces faits méritent plusieurs remarques: tout d'abord, on recrée, en quelque sorte, le paysage géographique de l'avant 1914 en refondant certains des pays qui, comme la Croatie, ou la Serbie, bien que non indépendants, existaient à l'époque de la double monarchie. Ce fait peut avoir de l'importance en ce qui concerne la gestion commune du passé de ces entités politiques. Deuxièmement, la Hongrie se trouve à nouveau dans une position de relative puissance vis-à-vis de ses voisins, puisqu'elle redevient une puissance moyenne parmi de petits états, ce qui n'était pas le cas lorsque la Yougoslavie et la Tchécoslovaquie existaient encore.
Si la Hongrie héritait d'un bagage historique lourd concernant sa propre frontière et son histoire commune avec ses voisins, l'ouverture des frontières a entraîné avec elle la nécessité de la coopération entre les pays, pour la gestion de leurs ressources et de leurs problèmes communs. Plus encore, l'Union Européenne fait de la coopération transfrontalière un des piliers de sa politique. Cette coopération revêt ainsi dans cette zone un aspect tout à fait particulier, car au-delà de permettre le développement économique de ces régions, elles nécessitent, et permet à la fois, de mettre de côté une histoire qui marque encore la conscience collective et le discours politique. La coopération à la frontière permettra aux Hongrois, à terme, de l'accepter tel qu'elle est de panser les plaies du passé.
Dès lors, on peut se demander, comment le contentieux historique aux frontières hongroises a pu être dépassé pour en faire non plus un lieu de séparation, mais une source de liens et de co-développement entre la Hongrie et les pays qui l'environnent ?
Nous verrons que le poids de l'histoire fait de la frontière un facteur de séparation en 1989 (I), histoire que les pays devront nécessairement dépasser pour faire face aux problèmes posés par l'ouverture des frontières (II) pour voir enfin que la frontière devient outil de liaison et de développement avec l'institutionnalisation des coopérations par l'Union Européenne (III).
[...] Cela crée également des obligations de coopération policière, douanière et judiciaire afin de sécuriser le territoire intérieur de l'Union malgré l'absence de frontières, ainsi que ses frontières extérieures par un effort commun. Si, à première vue, il s'agit de faciliter la circulation des biens et de la main-d'œuvre dans le cadre du marché commun, la disparition physique des frontières est également porteuse d'un poids symbolique et politique très fort. La frontière devient définitivement et juridiquement un trait d'union entre des pays qui se font suffisamment confiance pour ne plus avoir à défendre ces frontières. [...]
[...] Deuxièmement, la Hongrie se trouve à nouveau dans une position de relative puissance vis-à-vis de ses voisins, puisqu'elle redevient une puissance moyenne parmi de petits états, ce qui n'était pas le cas lorsque la Yougoslavie et la Tchécoslovaquie existaient encore. Si la Hongrie héritait d'un bagage historique lourd concernant sa propre frontière et son histoire commune avec ses voisins, l'ouverture des frontières a entraîné avec elle la nécessité de la coopération entre les pays, pour la gestion de leurs ressources et de leurs problèmes communs. Plus encore, l'Union Européenne fait de la coopération transfrontalière un des piliers de sa politique. [...]
[...] Des traités bilatéraux similaires ont été conclus en mars 1995 entre la Hongrie, la Slovaquie et la Roumanie, établissant des relations de bon voisinage et une coopération amicale entre les pays. Si le traité de base entre la Hongrie et la Slovaquie resta lettre morte en ce qui concerne la protection des minorités, notamment à cause de la position intransigeante du gouvernement de M. Vladimir Meciar, le traité roumano-hongrois donna de meilleurs résultats suite à l'alternance intervenue en Roumanie et à l'intégration de Hongrois dans le gouvernement roumain. [...]
[...] La difficile construction de l'état nation hongrois La construction de l'état nation en Hongrie a été particulièrement délicate en ce qu'elle faisait partie d'un empire multiethnique et était elle-même multiethnique. La Hongrie a ainsi été à la fois dominée par d'autres états durant une partie importante de son histoire, et a elle-même dominé d'autres peuples de sa création, au Xème siècle, au traité de Trianon du 4 juin 1920. On peut donc raisonner sur la difficile élaboration de l'état nation hongrois à partir de cette double caractéristique d'être à la fois un état dominé et dominant jusqu'à la fin de la première guerre mondiale. [...]
[...] Étant la limite géographique de l'Etat et de sa souveraineté, elle sépare et divise. Pour la Hongrie, nous l'entendrons comme la limite séparant la Hongrie des pays qui lui sont voisins, c'est-à- dire au sud et sud-ouest la Serbie, la Croatie et la Slovénie, à l'ouest l'Autriche, au nord la Slovaquie, et à l'est la Roumanie et l'Ukraine. Il est important de préciser ici que la Croatie, la Serbie et la Slovénie sont de "nouveaux" voisins pour la Hongrie qui ne deviennent des états nations qu'à la suite de l'éclatement de la Yougoslavie. [...]
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