Dans son ouvrage Une Constitution européenne, Robert Badinter affirme qu'une constitution est «l'expression d'une certaine conception du pouvoir politique qui trouve sa légitimité dans des principes fondateurs.» Ainsi, selon lui une constitution est un texte dans lequel «prend corps» un projet politique qui doit répondre à deux exigences : le respect des principes fondateurs et la satisfaction des besoins de la société qu'elle régit. L'objet de la réflexion de Badinter nous invite donc à nous intéresser à la question d'une constitution pour l'Union Européenne, question qui fait depuis plusieurs décennies l'objet d'un vif débat au sein de la communauté. En effet celle-ci, supposant l'établissement in fine d'une Europe fédérale, se heurte à de nombreux obstacles, aux réticences des Etats membres.
[...] Or c'est dans l'optique d'une telle construction politique que s'inscrit l'établissement d'une constitution pour l'Europe. En effet une constitution symbolise le socle du contrat social : là où il y a de la société, il y a du droit, et la constitution est le droit de ce droit, la Loi Fondamentale qui énonce à la fois les valeurs et principes sur lesquels il doit se construire et les pouvoirs et procédures par lesquels il s'élabore. En ce sens, une constitution est un acte symbolisant d'une part le choix d'un modèle de vie en société, et d'autre part un acte organisateur déterminant un modèle institutionnel d'exercice du pouvoir. [...]
[...] Aussi parait-t-il pertinent de se concentrer sur certains traités en particulier dont le fond et la forme peuvent laisser penser qu'ils soient dotés d'une nature constitutionnelle. Des textes à visée constitutionnelle défaillants La Cour de Justice des Communautés Européennes, par un arrêt du 23 avril 1986, aussi appelé arrêt «les Verts», qualifie les traités fondateurs des communautés européennes de «charte constitutionnelle». Il faut également souligner que la CJCE fait figure d'organe de jurisprudence fédérale. En ce sens, ne peut-on pas considérer que les traités passés entre les Etats membres, s'ils sont confinés en bloc dans ce que la CJCE appelle une «charte constitutionnelle», relèvent d'une constitution ? [...]
[...] Et si la construction communautaire est laborieuse et confrontée aux «humeurs» des gouvernements des Etats membres qui, en fonction de la conjoncture (politique / économique) peuvent décider qu'il est dans leur intérêt d'être eurofédéraliste ou non, celle-ci progresse irrémédiablement, lentement mais sûrement, et ce malgré les échecs de la CED ou du second traité de Rome qui n'ont pas enrayé la machine européenne au point que l'on assiste à une régression du processus d'intégration politique. Je finirais par une réflexion qui m'a paru intéressante : la définition classique de constitution suppose qu'il s'agit d'un acte fondateur. Mais ne peut-on pas penser que, dans le cas très particulier, très complexe de l'Europe, qu'une telle constitution pourrait être, non pas un acte fondateur, mais au contraire, l'acte qui scelle, qui achève la construction politique de l'Europe ? Bibliographie Badinter Rober, Une Constitution Européenne Fayard, Paris, 2002. [...]
[...] Sur le plan strictement juridique, ce texte ne relève pas d'une constitution formelle. Il n'a pas pour vocation affichée de se superposer aux constitutions des Etats membres et ainsi de créer un Etat européen fédéral ou supranational. Et en n'instituant un transfert de souveraineté que très limité dans certains domaines (tels que la monnaie ou le commerce), le Traité de Lisbonne peine à transformer la nature de l'Union Européenne, nature par ailleurs difficile à cerner (confédération, fédération, fédération d'Etats-Nations Ainsi il est difficile de discerner dans le chaos juridique européen un acte précis ayant une nature constitutionnelle. [...]
[...] L'adoption d'une constitution pour l'Union peut en ce sens être une solution au chaos juridique européen en garantissant une clarté de statut incontestable à la communauté. Conclusion Ainsi la question de la nécessité d'une constitution pour l'Europe est extrêmement complexe. Il faut également remarquer que celle-ci ne peut être dissociée d'autres questions : - Qu'en est-il de la délimitation géographique de la communauté ? - L'intégration économique, qui se doit de précéder l'intégration politique, est-elle achevée (question de la monnaie unique) ? - Comment harmoniser les peuples et les cultures de façon à ce qu'ils acceptent l'idée de citoyenneté européenne ? (cf. [...]
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