Pour beaucoup, le terme « soft power » reste un terme obscur et difficile à définir. Son utilisation est souvent proportionnelle à l'absence de précision de sa définition et de son contenu. Le premier théoricien du « soft power » est A.Wolfers, qui distingue l'influence et le pouvoir : la première étant la capacité à modifier le comportement des autres nations, à leur imposer sa propre volonté par la négociation, la diplomatie ou la cooptation, par opposition au second, qui use du recours à la force ou à la menace pour arriver aux mêmes fins. Cette distinction préfigure l'évolution des critères de puissance qui sera mise en évidence plus tard par Joseph Nye.
Cette évolution du concept de puissance nous amène en effet à croire que la diplomatie et la négociation sont des armes bien plus efficaces que les forces militaires. Dans une logique internationale qui a substitué la recherche de la paix, de la stabilité et, par là même, de la prospérité à la quête de l'expansion territoriale et au désir de puissance, il semble normal que les critères qui la définissent aient, eux aussi, évolué. On assiste en effet à une transformation des sources de puissance, notion relative et éminemment évolutive, au profit de ses sources immatérielles. Ces nouveaux critères, qu'il s'agit de prendre en considération, sont le rayonnement culturel et linguistique, le niveau d'éducation de la population ( le fameux facteur « K» pour « knowledge »), la propension à développer et propager une idéologie, le contrôle de l'information et de l'image, le charisme d'un chef d'état, etc…Ainsi la puissance d'un pays ne se mesurerait pas uniquement au nombre de chars disponibles ou à celui des soldats mobilisables mais aussi en fonction des séries télévisées diffusées au niveau international.
[...] Nous allons voir que de nombreux domaines d'influence sont tous simplement laissés de côté et que pour ceux précités, le manque de définition d'une politique commune fiable entrave sérieusement leur développement. Les sources immatérielles du soft power» sont bien plus nombreuses que celles évoquées antérieurement. L'une d'elles est la capacité à développer et propager une idéologie. Cette source de puissance mise en lumière par Joseph Nye est essentiellement intelligible dans un contexte de Guerre Froide. Cependant, encore aujourd'hui, ce facteur est à prendre en compte. Or, il apparaît évident que l'Union européenne n'affiche pas aujourd'hui d'idéologie ni ne maintient d'autres nations sont une logique de pensée qui lui serait propre. [...]
[...] Si des limites ne sont pas fixées, elle va tendre à son but initial, à savoir, la signature à tout prix. Une diplomatie n'accède au plus haut degré de son art et ne possède d'ailleurs d'efficacité réelle que si elle est l'interprète d'une politique. L'Europe en est l'illustration frappante : elle s'est imaginée qu'elle pouvait d'un trait de plume instituer une politique étrangère commune, elle n'a fait que mettre en place les mécanismes diplomatiques. Elle parle beaucoup mais ne dit rien, s'agite mais n'agit pas, tel est le sort d'une diplomatie sans politique ».Cette citation de Gabriel Robin souligne bien l'étendue de l'inefficacité diplomatique au niveau européen. [...]
[...] Par ailleurs, la présidence de l'Union européenne a été dotée à Amsterdam d'une personnalité juridique accrue. Elle peut donc désormais agir en son propre nom, elle est responsable, c'est à dire qu'elle peut entamer des négociations avec un pays extérieur à l'Union sans l'aval préalable des états membres. Il convient de noter aussi que l'instillation de la majorité qualifiée permet une plus grande autonomie de la diplomatie vis à vis des états membres. Le principe de l'abstention constructive permet de limiter les blocages dus aux résistances nationales. [...]
[...] Il serait donc naïf de voir dans l'œuvre de Nye une analyse d'un amoindrissement de la puissance. Elle reste le but premier des états. Sa thèse vise même à contrecarrer les théoriciens du déclin de la puissance américaine. Ce concept que Nye applique et construit pour les Etats Unis est-il transposable à l'Europe ? Nous comprendrons ici le terme comme l'espace géographique restreint de l'Union européenne. En tant qu'instrument de la puissance, le soft power devrait rester l'un des domaines régaliens par excellence, au même titre que la monnaie ou la défense. [...]
[...] Du point de vue interne qui est le mien il est difficile de répondre, mais il semble que la culture européenne soit perçue comme une alternative à la culture américaine, même si nombreux sont ceux qui les regroupent toutes deux sous l'étiquette culture occidentale Malgré des budgets ridicules de l'ordre de du budgets total de l'Union, le programme Culture 2000 mis en place par Bruxelles ne semble pas en mesure de construire une Europe culturelle capable d'une influence mondiale, pourtant celle ci prend de plus en plus de consistance du fait de la longévité du projet européen qui dépasse maintenant le cadre d'une génération et par opposition à la culture dominante. Le droit est l'un des domaines où l'Europe se maintient dans le peloton de tête. [...]
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