États membres de l'Union européenne, valeurs européennes, construction de l'Union européenne, organisation sui generis, principes démocratiques, traité de Maastricht, dignité humaine
Depuis le traité de Maastricht en 1992 qui a consacré à l'Union européenne une tout autre dimension, non plus économique comme à l'origine, mais bien politique, et les approfondissements du traité de Lisbonne, ces valeurs sont progressivement devenues le pilier de l'organisation, régissant aussi bien son fonctionnement interne, dans la mesure où elles possèdent un pouvoir normatif, que ses relations avec les États extérieurs.
Afin de protéger ces fondements, désormais essentiels au fonctionnement de l'organisation, des procédures/des dispositifs ont ainsi été mises en place, leur donnant définitivement une véritable portée juridique, censée être contraignante. Toutefois, alors qu'aujourd'hui l'UE est en proie à une crise de légitimité et semble être en situation de défaut démocratique, on peut constater que certains États membres se permettent d'outrepasser ces principes, mettant en péril le fragile équilibre dans lequel se trouve l'Europe des 27.
[...] Toutefois, cet article ne permet pas de réelle procédure juridictionnelle, les sanctions déterminées dans le texte n'étant que de nature politique ainsi qu'on le constate dans le paragraphe 3 « le Conseil [ . ] peut décider de suspendre certains des droits découlant de l'application des traités à l'État membre en question, y compris les droits de vote du représentant du gouvernement de cet État membre au sein du Conseil ». Afin d'espérer être plus coercitive, la Commission peut également engager des procédures d'infractions et des décisions préjudicielles en vertu de l'article 19 paragraphe 1 du TUE consacrant l'obligation des tribunaux indépendants de mettre en œuvre une protection juridictionnelle effective pour garantir l'état de droit ainsi que l'indépendance de la justice face aux pouvoirs politiques. [...]
[...] Ils peuvent aussi se soustraire à l'application des principes de la Charte des Droits Fondamentaux de 2000 grâce au principe de subsidiarité consacré à l'article 51 que nous avons précédemment évoqué : les Etats, dès lors qu'ils ne mettent pas en œuvre directement le droit de l'Union, sont libres de faire "ce qu'ils veulent" et "La présente Charte n'étant pas le champ d'application du droit de l'Union au-delà des compétences de l'Union" Le non-respect, de la part de certains états membres, de la législation et des principes censés représenter l'UE mettent en lumière le fragile équilibre de cette association d'Etats qui a finalement bien du mal à se prémunir des dérives concernant l'état de droit, alors même que celui-ci est un des principes dont elle revendique l'application pour ceux souhaitant envisager une candidature. En lien avec l'actualité, il semble intéressant de souligner la situation de l'Ukraine, dont la candidature pour devenir candidate à l'UE a été accepté le 23 juin 2022, alors que celle-ci est encore loin de remplir tous les critères nécessaires à une entrée dans l'organisation (respect de certaines libertés, lutte contre la corruption . ) En conséquence, il semble nécessaire, pour l'Europe des 27, de développer des outils pour protéger ces valeurs fondamentales. [...]
[...] En effet, depuis le traité de Lisbonne, d'anciens traités du TUE ont été modifiés afin de combattre efficacement les atteintes aux principes. On peut ici citer le plus fameux de tous : l'article 7. Même si son utilisation est en réalité exceptionnelle, il reconnaît aux différentes institutions de l'Union les compétences pour agir en cas de manquement grave concernant le respect de l'État de droit dans un des États membres. Il a été utilisé à plusieurs reprises contre la Pologne et la Hongrie respectivement en décembre 2017 par la Commission et en septembre 2018 par le Parlement. [...]
[...] Les deux cas dont nous pouvons nous servir pour illustrer notre propos sont bien évidemment la Pologne d'Andrzej Duda et la Hongrie de Viktor Orban qui sont souvent réticent à garantir, dans leur pays, le respect de certaines valeurs tels que l'état de droit dont nous avons ci-dessus explicité l'importance ou encore la liberté d'expression. Condamné pour « recours en manquement », en vertu des principes définis aux articles 258,259 et 260 du TFUE selon lesquels un état peut être condamné pour avoir manqué à ses obligations découlant des traités, par la Cour de Justice de l'Union Européenne, cette législation n'est malheureusement que purement symbolique, non-systématique et contribue donc, in fine, à laisser le champ libre pour ces états qui tentent alors de mettre en place des démocraties illibérales. [...]
[...] sont ainsi tenus de veiller à éviter toute régression, au regard de cette valeur, de leur législation en matière d'organisation de la justice » (Point 63 et 64). L'affirmation du respect des valeurs, notamment de celle de l'état de droit, comme clause essentielle à l'entrée au sein de l'UE, ancre, ad vitam æternam, l'aspect obligatoire de ces principes fondamentaux, désormais institutionnalisé et consacré par la doctrine. Dès lors, si nous venons de montrer que les valeurs de l'UE ont été affirmées au fil du temps comme essentielles au fonctionnement institutionnel de l'organisation et à sa continuité, force est de constater que, dans la réalité, on observe la remise en cause de ces principes, censés avoir un caractère obligatoire, plaçant l'Europe dans l'obligation de réagir afin de lutter contre la mise en péril de son système et renforcer sa légitimité. [...]
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