Le processus de décision politique au niveau communautaire déclenche rarement les passions populaires. Ainsi les travaux du Parlement européen se déroulent la majeure partie du temps dans l'indifférence la plus totale des citoyens européens. Seuls quelques débats enflammés passionnent les peuples pour les travaux de l'organe européen le plus démocratique. Ce fut le cas lors de la proposition de directive relative aux services, émise par le Commissaire chargé des questions relatives au Marché intérieur, à la fiscalité et à l'Union Douanière, le néerlandais Fritz Bolkestein.
Dans le cadre de l'Union européenne, une directive est un « acte juridique communautaire pris par le Conseil de l'UE seul ou avec le Parlement ». Selon l'article 249.3 du traité CE : « La directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens », et ce dans un délai imparti. Tout non-respect de ces directives peut être sujet à sanction par la CJCE. Elle forme en réalité une sorte de nouveau cadre juridique dans lequel les Etats membres ont l'obligation de s'inscrire. Par service, la directive entend « toute activité économique non salariée visée à l'article 50 du traité consistant à fournir une prestation qui fait l'objet d'une contrepartie économique ».
[...] Le compromis adopté est présenté comme la concrétisation d'une volonté européenne : En unissant leurs forces, les syndicats, les associations d'artisans, les municipalités et tous les autres acteurs sont parvenus à se faire entendre Nous sommes à un moment charnière. Nous avons la possibilité d'adopter une loi qui ne nous est imposée ni par le Conseil ni par la Commission. [ ] Avec un tel résultat à notre actif, nous, députés européens, pourrions nous enorgueillir d'avoir défendu les intérêts des 470 millions de citoyens de notre communauté Le parlement prend en effet toute sa dimension puisque la Commission se range finalement à son avis et adopte la grande majorité des amendements, délaissant notamment le principe pourtant annoncé non- négociable du pays d'origine. [...]
[...] Affirmation du parlement et prise de position des organes européens, symboles de la démocratie européenne i. Le rôle majeur du parlement européen, qui s'affirme au détriment du conseil des ministres Selon Alain Lamassoure, député européen, la polémique autour de la directive Bolkestein aura permis l'affirmation du parlement européen comme machine à fabriquer des compromis constructifs le parlement étant parvenu à dépassionner les tensions vives en son sein entre PPE et PSE afin de parvenir à un compromis final et à une série d'amendements à la proposition initiale. [...]
[...] Les divergences se maintiennent, mais une certaine convergence communautaire permet donc de bâtir de solides compromis. Fruit d'une volonté louable de concrétiser l'Europe voulue par le traité de Rome en réalisant pleinement le marché intérieur européen, la directive Bolkestein aura finalement failli à ses objectifs. Il faut voir dans cet échec le refus européen d'une Europe qui s'annonçait trop libérale, voire antisociale en créant d'importants risques de dumping, tant social que juridique, et l'attachement des Européens au fédérateur modèle social européen. [...]
[...] Bolkestein présente quant à lui les opposants à sa proposition comme des xénophobes : Ceux qui contestent mon projet sont des xénophobes, pour ne pas dire pire ii. La position emblématique française et le ralliement à l'avis du parlement européen Le parlement européen émet sa position le 16 février 2006 par le biais d'Évelyne Gebhardt, son rapporteur. Le parlement propose plusieurs amendements, fruits de compromis entre le PSE et le PPP, qui mettent en accusation une tendance trop ultralibérale de la directive, et sa remise en cause du modèle social européen, cependant difficile à définir. [...]
[...] Ferdinando Riccardi, fondateur de l'Agence Europe, organe de presse communautaire, voit ainsi en le débat autour de la directive Bolkestein une victoire de la démocratie victoire qui passe par des négociations difficiles l'engagement de la Commission [ ] en se fondant sur la décision du Parlement le Conseil qui attend le résultat du débat parlementaire et la proposition révisée de la Commission pour délibérer Le tout constitue un exemple de ce qu'il faut entendre, à mon avis, par démocratie européenne La directive Bolkestein exprimerait ainsi le véritable fonctionnement des institutions européennes, et en ce sens donnerait raison à Lamassoure lorsqu'il titre Après la directive Bolkestein, l'Europe progresse b. La directive Bolkestein, à l'origine de la construction d'une conscience transnationale ? [...]
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