Depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, le continent européen a connu deux événements majeurs: l'initiation d'un projet à long terme par des hommes politiques de l'Ouest en vue de protéger la paix, et la chute à l'Est, au début des années 1990, du régime communiste, « ouvrant la voie à un nouvel horizon démocratique » (P. Shmitter). L'Europe est ainsi un continent marqué par une histoire pesante et dramatique, mais disposant d'une volonté de construire, « d‘instituer un Etat de paix » (Kant dans Projet de paix perpétuelle).
L'Union européenne est une forme sui generis, ce n'est ni une fédération, ni une confédération. Or, cela nous révèle les limites politiques de cette entité. Sans statut défini, l'approfondissement de l'Europe semble impossible, de même que l'engagement de constructions communes durables. Peut-on d'ailleurs définir une forme européenne de gouvernement? Les pays inclus dans l'Union européenne doivent faire preuve de l'effectivité de certains principes et valeurs relatifs à la démocratie, ayant pour traits fondamentaux la souveraineté des citoyens, la transparence des processus et la responsabilité des dirigeants devant le peuple qui les a élus pour le représenter.
Peut-on alors parler de démocratie européenne alors qu'aucun texte fondamental ne reconnaît les règles et les droits et devoirs inhérents au peuple européen? La réponse semble à ce jour négative. Comment définir, à une échelle aussi large et floue que l'Europe, une coopération entre nations? Par quels vecteurs instaurer un cadre démocratique post-national ? Quelles sont les limites aux propositions actuellement définies ? Ainsi, comment assurer le développement d'un ordre démocratique européen ?
[...] Toute frontière étant d'ailleurs politique, chacun définira l'Europe selon les critères qu'il souhaite retenir qu'ils soient historiques, culturels, religieux. Ce continent est en tout cas formé d'un ensemble de nations ayant chacune ses fondements et son histoire, il y a donc ici une logique de différences et de particularisme. Et les nationalistes, tournés vers la promotion de ces particularismes, semblent s'opposer à cette volonté de formation d'institutions pacifiques, dont la forme la plus aboutie est l'Union européenne. Mais qu'est-ce que cette Union? Un ensemble d'institutions, de piliers, une monnaie unique, mais sans statut défini. [...]
[...] La Turquie doit encore évoluer pour pouvoir espérer entrer un jour dans l'Union européenne. On observe donc que l'identité postnationale suppose un cadre juridique européen unique, un cadre de valeurs universalistes pour garantir des relations pacifiques. Néanmoins, cette identité implique la conservation d'une pluralité des cultures nationales, c'est pourquoi nous allons à présent étudier l'impossibilité d'une nation européenne. L'idée d'une nation européenne apparaît à ce jour limitée Certains auteurs, particulièrement Jürgen Habermas, défendent l'idée d'une Europe fédérale. Ce dernier pense que le fédéralisme est la seule solution pour assurer le développement de droits économiques et sociaux européens, en transférant ce que faisait l'État-Providence de l'échelle nationale à l'échelle européenne. [...]
[...] Déjà en 1954 le Général de Gaulle déclarait: On ne fera pas l'Europe si on ne la fait pas avec les peuples et en les y associant. Or, la voie que l'on suit est complètement différente. On s'enferme dans des comités. On élabore des techniques. On fabrique des pools. On se réunit dans des Conseils entre augures intéressés. Mais les peuples n'y sont pas. Aujourd'hui encore les intellectuels se plaignent de ne pas être associés aux débats et estiment que la question sur l'Europe est laissée aux technocrates et au champ seulement politique. [...]
[...] Néanmoins, il est peu probable qu'une nation européenne émerge, mais plutôt un patriotisme constitutionnel associé à une identité postnationale qui garantiront la défense des valeurs communes de la démocratie. Sources Quel patriotisme au-delà des nationalismes? J-M FERRY, in Sociologie des nationalismes, PUF Le Grand Turc et la République de Venise, S.GOULARD, Fayard Après l'État nation, J.HABERMAS, Fayard Projet de paix perpétuelle, E.KANT L'Europe à l'épreuve de la démocratie in Échange et Projets, juin 1994 La nation, l'Europe et la démocratie J.HABERMAS, D.SCHNAPPER, A.TOURAINE in Cultures en mouvement, mars 2001, nº35 L'avenir de la démocratie en Europe: État des lieux et propositions de réformes , P. SCHMITTER, Ed. [...]
[...] Pour Sylvie Goulard, dans Le Grand Turc et la République de Venise, les citoyens se sentent dépossédés de l'Europe. Les hommes politiques d'aujourd'hui, contrairement aux Pères fondateurs, adoptent une vision politique à court terme, incluant un horizon exclusivement national et non plus européen. L'Europe est alors aux mains d'institutions manquant de légitimité puisque débattant dans un cadre fermé et manquant de transparence. Dans Après l'État nation, Jürgen Habermas montre que la mobilisation politique et l'autodétermination démocratique des sujets, le passage de peuple à citoyens se fait lorsque ces derniers assument leur destin politique. [...]
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