La construction de la nation en France et en Allemagne

Résumé du document

L'Union européenne, en quête d'unité politique, a souvent souffert de l'antagonisme en matière de gestion de l'immigration du couple franco-allemand. Ces deux pays qui, depuis la fin de la guerre, ont été de ceux qui ont fait le plus appel à la main d'œuvre étrangère ne donnaient cependant pas le même statut à ces immigrés à l'arrivée sur le territoire national. On peut se demander d'où vient cette différence de perception de l'immigration dans des pays pourtant voisins, dotés d'une histoire commune plus que riche.

Cette question peut nous amener à considérer une problématique plus large, celle de la définition que chacun des deux États se fait de la nation. Par quel processus, et sur quelles bases, le concept de « nationalité » a-t-il été construit en France et en Allemagne ? Quelles sont ses évolutions ?

Extraits

[...] Brubaker dans Citoyenneté et nationalité en France et en Allemagne ce désir d'union politique nécessite une unification culturelle et linguistique. Ce travail d'homogénéisation a notamment commencé sous la IIIe République, où les institutions étatiques telles que l'Ecole étaient utilisées pour notamment éradiquer les spécificités régionales. A la fin de la IIIe République, le français avait supplanté les langues régionales, et le nationalisme en était à son paroxysme. Là est le paradoxe dans la conception française : à trop désirer le cosmopolitisme et l'ouverture, on se met à considérer que le combat de la France est un combat pour l'humanité. [...]

[...] Ces considérations font au contraire partie intégrante de la philosophie allemande. Conséquences directes sur la politique des deux pays Ces bases historiques et philosophiques, profondément ancrées dans la pensée politique des deux pays, ont ainsi dirigé leurs choix stratégiques et leur vision du monde à travers l'histoire. La laïcité est en France le résultat de la conception universaliste et unificatrice de la nation : l'Etat ne regarde pas le citoyen dans sa spécificité culturelle, cultuelle, ou politique, ce qui le place dans une situation de neutralité et d'égalité parfaite face aux autres. [...]

[...] La conception traditionnelle de la nation chez les deux voisins alimente des questions à la fois d'ordre pratique et philosophique, sujettes à débat encore aujourd'hui. Naissance du concept de nation Contexte historique Fondements philosophiques Conséquences directes sur la politique des deux pays II) L'Etat, la nation, et le citoyen Modes de transmission de la nationalité : droit du sol et droit du sang Evolutions contemporaines Naissance du concept de nation Contexte historique Lors de la Révolution française de 1789, la société de l'Ancien Régime est ébranlée, et notamment par la création d'un cadre légal mettant sur un pied d'égalité tous les citoyens français : c'est la fin du système complexe des privilèges. [...]

[...] II) L'Etat, la nation, et le citoyen Modes de transmission de la nationalité : droit du sol et droit du sang La question de la transmission de la nationalité est liée à la définition que l'on souhaite donner à la nation. En France, où les raisons ethnoculturelles n'ont jamais été particulièrement mises en avant, la balance penchait plutôt au départ pour le jus soli, autrement dit le droit du sol. On en revient à la conception de l'attachement de l'homme à la terre, qui faisait l'unanimité durant l'Ancien Régime. [...]

[...] Renan ne voit pas la nation comme une entité immuable et pérenne : elle est soumise à la variabilité des sentiments humains, et pourrait ainsi très bien disparaître au profit d'un autre type de système. Une nation peut donc dans sa conception contenir des individus de toutes origines, tant que le principe spirituel qui les lie tient. Renan ajoute donc au concept de contrat social de Rousseau la force des sentiments humains. Ce dernier imaginait la conception d'un contrat entre les individus, qui leur donnerait un cadre de vie en société et permettrait ainsi la réapparition de la générosité et de l'entraide que la société moderne aurait éradiquées. [...]