Henri Brugmans a souligné « l'atmosphère joyeuse, créatrice, presque révolutionnaire du Congrès » (L'Europe en formation, 1968). Le Congrès de La Haye désigne un rassemblement des forces pro-européennes, rassemblant environ 740 congressistes décidés à œuvrer pour la construction d'une Europe unie, sous la présidence d'honneur de Winston Churchill. Préparé par des travaux antérieurs et notamment par le Congrès de Montreux qui avait fixé l'objectif du congrès de La Haye : « L'Europe unie dans un monde uni », La Haye constitue une démonstration spectaculaire de ce rassemblement des différents courants européistes qui se rencontrèrent, pour la plupart, la première fois à Montreux. Le congrès de La Haye est au départ un projet porté par les fédéralistes. L'Union Européenne des Fédéralistes (UEF), créée en décembre 1946, a largement favorisé la réunion tenue à La Haye, du 7 au 10 mai 1948, trois ans après la capitulation de l'Allemagne, l'annonce de la fin des combats par De Gaulle et l'armistice.
[...] Le Congrès de La Haye a donc quelque peu constitué des États généraux si on se réfère aux États généraux français qui réunissaient les trois ordres de la société. Le Congrès de La Haye constitue bien une impulsion pour l'Europe, en témoigne les trois objectifs fixés par le Comité : démontrer d'une manière frappante la puissance et l'ampleur des appuis déjà acquis par l'idée européenne ; fournir un matériel de discussions, de propagande et d'études techniques ; imprimer un nouvel et puissant élan à la propagande européenne clans tous nos pays Le Congrès de La Haye apparaît donc bien comme une convocation exceptionnelle, dans le contexte historique de la fin de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre froide. [...]
[...] Finalement ce qui ressort du congrès et comme l'a très bien analysé Denis de Rougemont c'est que si le fédéralisme a triomphé dans les textes, l'unionisme doctrine de ceux qui espéraient faire l'Europe sans casser des oeufs, resta seul maître d'exploiter les conséquences de l'éclatante manifestation de La Haye Même si Denis de Rougemont est un fédéraliste, on pourra voir dans les deux dernières parties que l'ambition de faire de l'Europe une union politique a été largement déçue pendant et après ce congrès. Des dispositions sont prises et certaines ont été appliquées quelques années plus tard. Il est important de souligner que La Haye marqua une incontestable volonté d'agir en commun. Comme l'a dit Édouard Bonnefous, La Haye a été un formidable forum des idées européennes préparant la naissance du Mouvement européen, créé le 25 octobre 1948 à Bruxelles. [...]
[...] Le congrès de La Haye a bien conduit à des objectifs clairement établis par les trois commissions, représentant les différents pôles de la société. En outre, les participants au congrès adoptent le Message aux Européens conçu par Denis de Rougemont, rapporteur de la commission culturelle. Par ce Message, les congressistes déclarent solennellement leur volonté commune de participer à la construction d'une Europe unie et de s'engager à participer à cette œuvre de salut public C'est véritablement dans le domaine de la culture que les fédéralistes parviendront à montrer que La Haye doit servir de base pour la société civile et non pas une base pour les tractations diplomatiques des États. [...]
[...] La récupération par deux groupes opposés du congrès de La Haye ne va pas dans le sens d'États généraux puisqu'on perd alors l'idée de diversité des congressistes annoncée en deuxième partie. D'autant plus que ce clivage a fortement ralenti les travaux des commissions et le vote des résolutions. Ainsi pour les fédéralistes, La Haye n'a pas constitué des États généraux, car la manifestation a été récupérée par des personnalités politiques servant leurs intérêts propres. Pour Marc, Depuis 20 ans bientôt, je défends mes idées, bonnes ou mauvaises, mais je ne suis pas disposé à me laisser entraîner par un tourbillon d'intrigues, de manœuvres et de combines Ce témoignage de Marc nous informe sur la déception des fédéralistes. [...]
[...] Et si toutefois on peut avancer une progression à La Haye, elle n'est qu'incertaine. Les historiens se sont majoritairement concentrés sur la division doctrinale entre les unionistes et les fédéralistes. Cette opposition est importante quand on la replace dans le contexte dans lequel a émergé le congrès de La Haye. On l'a vu en effet, La Haye était une idée essentiellement fédéraliste. Les fédéralistes se sont sentis lésés par la mainmise de quelques personnalités, qui derrière Churchill, ont conduit La Haye vers toute autre chose que ce qu'ils désiraient. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture