Dès son institution, la Commission européenne n'a eu de cesse d'essuyer les critiques la qualifiant de technocratique. Dès le départ, elle est sujette à des querelles et à des instrumentalisation entre les fédéralistes qui y voient une sorte de gouvernement européen, et les intergouvernementalistes qui souhaitent en faire un simple secrétariat subordonné au Conseil. Dans les traités, la commission est désignée comme "l'exécutif" de l'Union.
Elle est chargée de proposer les textes de loi au Conseil et au Parlement, dont elle a l'initiative, ainsi que de mettre en œuvre les législations décidées au Conseil. Il en va cependant que le rôle de la Commission, souvent mal compris, reste flou, celle-ci étant souvent qualifiée d'institution hybride, étant à la fois "une administration, un organe politique, et même dans certains domaines particuliers, une agence indépendance de régulation".
Dès lors, les commissaires européens ont commencé à faire figure de technocrates, froids et distants, enfermés dans leur tour d'ivoire, n'affichant pas vraiment de considération pour les affaires politiques, tout ceci alimentant le mythe du technocrate. Cependant, on assiste ces derniers temps à un processus de politisation ainsi qu'une volonté affichée, comme le montre le discours de Romano Prodi, de rompre avec ce mythe de l'eurocrate.
[...] La Commission européenne, un aréopage de technocrates ? «Chacun des membres [de la Commission] a une expérience confirmée. La quasi-totalité d'entre eux a été membre de leurs parlements nationaux. Les trois quarts ont été ministres. Plusieurs ont été dirigeants de partis politiques et d'autres ont une grande expérience diplomatique, juridique, économique ou du monde des affaires. C'est par ces mots que Romano Prodi, président de la Commission européenne de 1999 à 2004, commence son discours adressé au Parlement européen le 21 juillet 1999. [...]
[...] En effet, pour faire face à cette hétérogénéité, les commissaires prennent appui sur la figure de technocrate afin de rendre une certaine cohésion au groupe qu'ils forment. Si le mythe perdure, c'est en effet qu'ils se le réapproprient pour une part, voire, qu'ils en sont à l'origine en l'intégrant au travail de définition de soi dans lesquels ils s'engagent. Par conséquent, la figure de technocrate, figure d'expert technique stabilisatrice semble être reprise par les commissaires, qui, sortant d'univers différents au sein de leurs Etats respectifs, n'ont que la figure du technocrate pour se définir en tant que groupe. [...]
[...] Les commissaires européens. Technocrates, diplomates ou politiques ? Paris Presses de Sciences Po Jean Joana, Andy Smith, Qui devient Commissaire ? Les commissaires européens. Technocrates, diplomates ou politiques ? [...]
[...] L'ironie est facile sur les technocrates de Bruxelles ou de Luxembourg. La complexité de nos institutions fait que l'opinion publique comprend mal le rôle des fonctionnaires européens. Il lui est plus facile de supputer leurs privilèges et de présumer leur inutilité. Ainsi, cela contribue de façon assez large à alimenter le mythe de l'eurocrate, personne, les acteurs nationaux en particulier, ce qui se trame au sein de la Commission et les enjeux qu'il y a derrière Les concurrents de l'Union, coresponsable du mythe En s'interrogeant sur l'origine de l'étiquette eurocrate, on s'aperçoit que les adversaires de l'Union européenne ont également contribué à la colporter, craignant une Europe trop fédérale. [...]
[...] Cependant, on assiste ces derniers temps à un processus de politisation ainsi qu'une volonté affichée, comme le montre le discours de Romano Prodi, de rompre avec ce mythe de l'eurocrate. Par conséquent, la critique d'une commission trop technocrate paraît légèrement dépassée. Néanmoins, le phénomène de politisation des commissaires ne va pas sans poser la question de la place de la Commission et sa position par rapport aux Etats et aux enjeux nationaux. En effet, la difficulté qu'éprouvent les commissaires à se définir oscillant entre technocrates et politiques, montre malheureusement la difficulté de la Commission elle-même à s'imposer tant sur la scène européenne que face aux poussées nationalistes des Etats. [...]
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