La forme particulièrement originale et unique que revêt l'Union Européenne (UE) en tant qu'organisation internationale réside dans ses nombreuses spécificités dues à son histoire même : le fait est qu'à la construction économique pour laquelle l'Europe s'était originellement unie s'est progressivement greffée une construction politique, certes plus ou moins laborieuse et encore nullement achevée, mais qui a notamment permis l'émergence d'une citoyenneté européenne commune aux côtés des différentes citoyennetés nationales. Si cette citoyenneté européenne reste bien souvent floue et abstraire dans l'imaginaire des ressortissants de l'Union, elle n'en demeure pas moins une réalité bien ancrée dans les pratiques depuis son introduction via le Traité de Maastricht en 1992.
Dès lors, il paraît légitime de s'interroger : comment se déroule la coexistence entre citoyenneté européenne et citoyenneté nationale ? Plus précisément, leur interaction est-elle une combinaison judicieuse, d'ores et déjà acquise et accomplie, ou au contraire est-elle à parfaire, voire susceptible d'être remise en cause ?
[...] On l'a dit, se sentir pleinement citoyen européen consisterait grosso modo à faire passer les intérêts communautaires avant les intérêts nationaux. D'où la volonté de frein de certains dirigeants qui font clairement apparaître leur nature eurosceptique, craignant qu'un projet de construction européenne trop poussé ne nuise aux intérêts nationaux pour lesquels ils ont été élus et sur lesquels ils exercent leur pouvoir. En outre, le fait que l'ancrage de la citoyenneté nationale parmi les mœurs des ressortissants soit bien plus affirmé que pour la citoyenneté européenne fait surgir une seconde dimension : au contraire du sentiment européen, le sentiment national et en l'occurrence le patriotisme constituent des éléments bien plus prometteurs à des fins électorales, notamment concernant l'électorat traditionnel encore très attaché aux valeurs nationales, qui représente un réservoir de votes non négligeable à l'échelle du continent. [...]
[...] Il n'existe pas de conscience commune sur laquelle elle pourrait se baser explique la journaliste Sophie Gérardin. Bien évidemment, cette absence de conscience commune s'explique largement par le principe même de la construction européenne : avec tant de pays membres, il est difficile de faire émerger une culture ou une histoire proprement européenne. Cela explique pourquoi nombre de ressortissants ont tendance, même inconsciemment, à privilégier leur citoyenneté nationale au détriment de celle européenne : la première est plus ancrée historiquement. [...]
[...] Mais entre-temps, c'est surtout le Traité de Maastricht de 1992 qui va marquer l'étape décisive : l'article 8 déclare qu'il est institué une citoyenneté de l'Union. Est citoyen de l'Union toute personne ayant la nationalité d'un État membre Par la suite, le Traité de Rome est amendé de manière à ce que son article 17 établisse qu'« est citoyen de l'Union, toute personne ayant la nationalité d'un des Etats membres Dès lors, cette décision est extrêmement novatrice dans le sens où elle dispute le monopole de la notion de citoyenneté aux Etats, en la faisant passer à une échelle supra-nationale, celle de l'Union européenne. [...]
[...] Après avoir saisi quelles sont les caractéristiques propres à la citoyenneté nationale, il semble d'autant plus incongru que l'Union européenne se soit saisie de la question afin d'édifier une citoyenneté européenne. Pourtant, grâce à un travail méthodique qu'il nous faut retracer, l'UE est bel et bien parvenue à prouver que la citoyenneté ne pouvait plus, dans le monde moderne, être le seul apanage réservé aux Etats. On le sait parfaitement, la construction européenne a avant tout été motivée par des raisons économiques, la première d'entre elles étant d'assurer la reconstruction de l'économie et de l'industrie du continent, qui avaient été laissées exsangues par la Seconde Guerre Mondiale. [...]
[...] Dès lors, il paraît légitime de s'interroger : comment se déroule la coexistence entre citoyenneté européenne et citoyenneté nationale ? Plus précisément, leur interaction est-elle une combinaison judicieuse, d'ores et déjà acquise et accomplie, ou au contraire est-elle à parfaire, voire susceptible d'être remise en cause ? Il nous faut, pour ce faire, adopter un double point de vue, à la fois historique et s'intéressant aux conséquences effectives dans un premier temps, et dans un second temps plus porté sur la situation présente et l'avenir. [...]
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