À Bruges, le 20 septembre 1988, Margaret Thatcher fit un discours devant plus de huit cents personnes à l'occasion de l'inauguration de l'année académique du Collège de cette même ville. Premier ministre depuis mai 1979, Thatcher, surnommée la « dame de fer » depuis qu'elle fit preuve d'intransigeance face à la longue grève des mineurs anglais en 1984, donna un tour néolibéral à la politique anglaise, main dans la main avec celle menée outre-Atlantique par le président américain Ronald Reagan.
Son discours est, dans le contexte proprement européen, une réponse à Jacques Delors, alors Président de la Commission Européenne, pour qui l'intégration européenne doit s'accélérer en augmentant les compétences et les pouvoirs des institutions (selon le quotidien Libre Belgique de l'époque, Delors aurait envisagé de « transférer 80 % des décisions économiques, sociales et fiscales à l'échelon européen »). Plus largement encore, Thatcher déclare son désaveu à l'évolution politique de l'Europe et de la manière dont sera construit le futur Traité de Maastricht. Mais au-delà du contexte direct, en une synthèse de sa pensée, Margaret Thatcher entend énoncer une nouvelle doctrine pour l'Europe.
[...] Nous pouvons nous poser la question de savoir ce qu'envisage pour l'Europe cette nouvelle doctrine et dans quelle mesure elle vient à l'encontre de l'idée européenne telle qu'elle a été pensée par le mouvement européen (de Schuman à Delors). Nous allons voir ainsi que si Thatcher envisage bien de créer un marché commun d'origine (néo)libérale comme les instigateurs du mouvement elle désapprouve totalement l'idée d'une plus grande intégration communautaire pour proposer une méthode coopérative se basant sur les textes déjà existants (II). [...]
[...] Son discours est, dans le contexte proprement européen, une réponse à Jacques Delors, alors Président de la Commission européenne, pour qui l'intégration européenne doit s'accélérer en augmentant les compétences et les pouvoirs des institutions (selon le quotidien Libre Belgique de l'époque, Delors aurait envisagé de transférer des décisions économiques, sociales et fiscales à l'échelon européen ; source : EuropeanNavigator). Plus largement encore, Thatcher déclare son désaveu à l'évolution politique de l'Europe et de la manière dont sera construit le futur Traité de Maastricht. Mais au-delà du contexte direct, en une synthèse de sa pensée, Margaret Thatcher entend énoncer une nouvelle doctrine pour l'Europe. Nous avons vu, par l'étude de la Déclaration Schuman comment la coopération économique est allée de pair avec l'intégration politique. [...]
[...] Elle envisage donc une Europe des Nations souveraines qui ne seraient pas spoliées de leurs compétences par des institutions bureaucratiques aux membres nommés par les gouvernements. Elle s'en prend ici à une éventuelle monopolisation illégitime - du droit et de l'esprit européen par les institutions, mais aussi à sa tendance à se tourner vers elle-même alors qu'il faudrait s'ouvrir au reste du monde et en priorité à l' alliance atlantique En effet, elle prend l'exemple même si ce n'en est pas un simple d'une Défense européenne. [...]
[...] Pleinement européenne, la Grande-Bretagne a connu en plus lors des dernières décennies une évolution économique dont se félicite Thatcher. Pour elle, la dérèglementation à l'œuvre a amené son pays à s'enrichir et à compter en son sein de grandes villes marchandes, dont la première, Londres, devenue le plus grand pôle économique et financier d'Europe. Cet esprit européen couplé à ce rayonnement économique fait penser à Thatcher qu'elle est en droit de proposer un modèle économique pour l'Europe qui suivra les préceptes de l'économie néolibérale. [...]
[...] Ce texte met ainsi en lumière une vision concurrente de celle qui veut que l'Europe avance vers le fédéralisme (celle de la Déclaration Schuman par exemple), mais ne participe pas moins à cette construction en révélant des problèmes dont la Communauté européenne d'alors et l'UE d'aujourd'hui se posent : jusqu'où aller vers l'intégration ? N'est-ce pas enlever de la substance à ce que sont les Etats ? C'est pour cette raison que cette Europe ne peut se faire qu'à petits pas, d'autant plus aujourd'hui où, à vingt-sept, les probabilités de divergence sont plus grandes. [...]
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