« Pour le meilleur comme pour le pire, nous sommes liés à la patrie. Et nous savons que nous ne ferons pas l'Européen sans elle, que nous devons faire, que nous le voulions ou non, l'Européen sur elle. » Ce propos de l'écrivain et homme politique André Malraux est extrait de son appel lancé aux intellectuels français, conférence tenue le 5 mars 1948 en salle Pleyel, qui deviendra la postface des Conquérants.
L'extrait ici soumis nous amène à nous poser la question suivante : que nous montre-t-il quant à l'avenir européen et la situation de la France de 1948 dans la vision malrucienne ? Ainsi, il sera traité dans un premier temps du patriotisme présent chez les intellectuels et politiques dans ce processus de reconstruction européen, et d'autre part du refus d'une quelconque forme de supranationalité pour guider les nations.
André Malraux avait en réalité un véritable don de visionnaire, ainsi il effectue ici à la fois une mise en garde contre les dangers des dérives nationalistes de son temps et une valorisation du sentiment patriotique.
[...] B-L'association des peuples ou l'universalisme malrucien Si André Malraux a exalté l'universalité de l'homme et de l'expression artistique, il a eu également la prescience de la dimension culturelle, voire spirituelle, de la mondialisation, la conscience du fondement culturel du projet européen. André Malraux, l'écrivain et l'humaniste, prit conscience, avant tant d'autres, des dangers de l'idéalisme communiste, comme des menaces des impérialismes et des hégémonies, distingua l'internationalisme de l'universalité, le libéralisme de la liberté, et le nationalisme de la nation. Cet appel, si moderne, clame, avec des accents prophétiques, l'amour de l'art et de la nation, l'amour de l'homme et de la liberté. [...]
[...] Malraux partage alors l'idée de De Gaulle : toute supranationalité quelle qu'elle soit n'est pas possible. La souveraineté nationale à peine retrouvée doit être protégée contre toute atteinte et c'est précisément là dessus que le futur chef d'État veillera avec ferveur. C'est de cette façon qu'est conçu le projet européen. Suite au discours prononcé par Winston Churchill le 19 septembre 1946, plaidant pour l'édification une sorte d'États unis d'Europe united europe movement voit le jour le 14 mai 1947. Hostile aux organes supranationaux, ce mouvement prône une coopération intergouvernementale. [...]
[...] André Malraux, discours tenu le 5 mars 1948 dans son Appel aux intellectuels» Pour le meilleur comme pour le pire, nous sommes liés à la patrie. Et nous savons que nous ne ferons pas l'Européen sans elle, que nous devons faire, que nous le voulions ou non, l'Européen sur elle. Ce propos de l'écrivain et homme politique André Malraux est extrait de son appel lancé aux intellectuels français, conférence tenue le 5 mars 1948 en salle Pleyel, qui deviendra la postface des Conquérants. [...]
[...] Dans son œuvre et son action politique, André Malraux aura toujours une dimension européenne. Ainsi dès 1927, soit cinq ans après la publication par Valéry de “L'Européen”, Malraux signe un essai intitulé “D'une Jeunesse européenne”, qui a une valeur programmatique : jeunesse européenne est plus touchée par ce que le monde peut être que par ce qu'il est”. Et de fait, l'Europe n'a cessé d'être au cœur des préoccupations de Malraux. De la description critique de l'Europe par Ling dans La Tentation de l'Occident à Vincent Berger rêvant dans le désert d'Afghanistan aux musées européens, de la lutte contre le fascisme dans Le Temps du mépris à la mise en scène des grandes figures politiques et artistiques européennes (Le Miroir des limbes), de L'Espoir où l'on assiste à la révélation de l'importance du fait national (la terre, au sens moral et spirituel) au discours d'hommage à la Grèce, Malraux semble requis par le “vieux continent”. [...]
[...] La France coloniale, la France puissante sur la scène internationale, c'est cette France que Malraux aimerait retrouver à travers la construction européenne à venir. Finalement cette volonté gaullienne est restée attachée à tous les chefs d'État français de la Ve république, y compris pour ceux qui prônaient une politique étrangère de compromis (favorisant une situation de prospérité tranquille intérieure, sans grande ambition extérieure), qui ont en réalité adopté cette politique étrangère de tradition gaulliste dite de projection (projetant ses idées, son mode de vie, proposant des solutions aux problèmes). [...]
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