Assurément, la série d'attentions dont font montre les pouvoirs publics à l'endroit de l'hypothèque, qu'il s'agisse d'ailleurs de traductions législatives concrètes ou de vœux programmatiques, témoigne de ce que la conception française de cette sûreté a fortement évolué. Du « syndrome Monopoly », dont les manifestations ont perduré jusqu'il y a encore peu, au royaume du « tout hypothécaire », le changement est net.
Du point de vue de sa perception, il faut bien en convenir, l'hypothèque n'est plus vraiment ce qu'elle était. Or, ce qu'elle était, c'était une sûreté dotée d' « un effet traumatisant », en ce qu'elle pouvait conduire, en cas de défaillance du débiteur, à la saisie, puis à la vente corrélative de son bien. L'hypothèque faisait peur. L'on y recourait avec un sentiment de crainte, presque à rebours. Parfois considérée comme un acte plus grave que la vente même du bien, la prise d'une telle sûreté était donc importante.
Loin sont aujourd'hui les conceptions balzaciennes, les craintes d'antan. L'hypothèque est revenue en grâce. Son image, indubitablement, a changé.
[...] En effet, à supposer qu'un tel mécanisme puisse avoir un rôle bénéfique pour la croissance, il peut également s'avérer un catalyseur des difficultés. Dans l'éventualité où les prix de l'immobilier chuteraient, nombreux seraient ceux à se retrouver endettés alors même que la valeur de leur immeuble ne pourrait couvrir l'intégralité des emprunts contractés. Et pourrait s'ensuivre une crise des crédits. D'une manière plus générale, sans toutefois se livrer à une analyse économique hasardeuse, la liaison entre patrimoine immobilier et financement aurait ce vice indépassable que le crédit deviendrait tributaire des cycles immobiliers. [...]
[...] Quoi qu'il en soit, construire l'entier système français du financement des consommateurs sur la frêle assise d'une sûreté pouvant s'avérer drastique est sans doute dangereux. Il en va de la protection du marché, mais également de l'emprunteur. Assurément, pour reprendre cette métaphore de Flaubert si parlante, il y aurait tout à craindre d'une résidence principale vermoulue d'hypothèques jusque dans ses pilotis Les soubassements seraient trop lâches. Bibliographie Dagot, Michel ; L'hypothèque rechargeable Ed. LITEC Challamel, Jules ; L'hypothèque judiciaire Ed. [...]
[...] Sans doute cette conception participa de l'efficacité de l'hypothèque. Mais l'on avait là une image somme toute assez négative. Peut-être la crainte s'est-elle au fil du temps muée en une sorte de respect, à tout le moins une attitude assez révérencieuse. Il reste que cette sûreté bénéficiait encore récemment d'une charge psychologique et symbolique puissante. Pour autant, à constater l'actualité toute récente, la trace d'une césure très nette dans ce constat n'a pu manquer d'échapper. Loin sont aujourd'hui les conceptions balzaciennes, les craintes d'antan. [...]
[...] Et ce dernier de poursuivre : Je demande à Christine Lagarde de travailler, avec les acteurs bancaires, sur le développement du crédit hypothécaire qui est pour moi une priorité absolue. Les mesures de simplification du recours à l'hypothèque et de réduction de son coût seront adoptées Une telle proposition, dont la teneur n'étonne plus guère, aurait sans doute pu émaner de celui qui fut ministre des Finances il y a maintenant trois ans. Pourtant, il n'en est rien. Et c'est bien ès qualités de président de la République qu'il s'exprimait ce 11 décembre dernier. [...]
[...] C'est là une situation à éviter. Et si, certes, la vision du président, clairement assumée, permettait d'ouvrir les vannes du financement à une clientèle aux revenus plus irréguliers, le risque est bien celui que ces populations, traditionnellement écartées du crédit, soient les premières touchées en cas de difficultés. La crise américaine des prêts hypothécaires de l'été 2007, aux conséquences que l'on connaît, a pu démontrer qu'un tel constat devait rester présent aux yeux des chantres du tout hypothécaire Les nombreux prêts qu'avaient consentis les banques américaines à ces populations risquées- en termes de solvabilité - se sont révélés bien retors et les défauts de paiement ont donc été légion. [...]
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