"Le temps des retraites" de Xavier Gaullier

Résumé du document

Avec le temps la retraite s'est transformée. Sa durée s'est allongée, les retraités sont en meilleure santé, elle n'est plus synonyme de pauvreté. Le travail cesse avant la liquidation de la pension et la vieillesse est désormais plutôt associée au grand âge qu'au départ à la retraite.
La question de la réforme du système de retraite, les défis que pose l'évolution de ce temps social ne peuvent se réduire à la question de la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein. Le premier défi concerne un nouvel âge, les 50-70 ans, qui sont tout à fait aptes à mener une vie active et qui voient leur carrière se finir. Le second défi porte à plus long terme sur les transformations du parcours de vie à partir du paradoxe de la société « longévitale ».
Le gain d'espérance de vie est à présent tout entier imputé à la retraite. L'augmentation du temps libre dont chacun de nous dispose est ainsi d'abord consacrée à du temps en fin de vie. En sera-t-il de même demain ?
L'hypothèse de cet essai est que l'enjeu réel de nos débats consiste à imaginer un nouveau concept de retraite, adapté à la recomposition des cycles de vie et singulièrement à l'émergence de ce nouvel âge : les 50-70 ans. Il faut essayer de penser une retraite qui sécurise les nouveaux parcours de vie, facilite les transitions et organise de nouveaux équilibres entre choix individuels et garanties collectives.

Extraits

[...] Au fond le défi qui est devant nous consiste à réorganiser les temps de la vie. [...]

[...] L'option est elle seulement entre la durée de la retraite ou la durée de la carrière professionnelle ? Dans le cycle de vie de la société salariale, c'est l'âge chronologique qui prévalait dans lé définition des étapes de l'existence. Que se passe t il quand les âges et les temps sociaux deviennent flexibles et s'individualisent? Il reste de la place pour des scénarios de régulation collective mais ils sont beaucoup plus complexes. Les cycles de vie évoluent du fait du décloisonnement des temps sociaux et de leur interaction. [...]

[...] L'enjeu est de passer d'une crise de l'emploi et des retraites à une dynamisation du marché du travail des seniors et à celle des retraites ou de façon plus précise d'une culture de la préretraite et du troisième âge à la pluriactivité dans une société de services. La pluriactivité consiste dans l'articulation et la combinaison de temps sociaux naguère cloisonnés. Cette perspective implique la fin des frontières étanches entre emploi et non emploi, entre emploi et retraite, entre activité et inactivité. Elle fait disparaître la différence entre le travailleur âgé et le jeune retraité. La pluriactivité permet des départs réversibles. La retraite n'exclut plus du travail. La pluriactivité c'est aussi un nouvel emploi. [...]

[...] Une retraite flexible est elle souhaitable ? L'idée d'une retraite à la carte est devenue une idée force des débats sur la réforme des retraites. Elle marque la possibilité pour l'individu de déterminer le moment de son départ et ses modalités en fonction de ses besoins et de ses arbitrages entres les temps sociaux. Une telle liberté impliquerait que les individus choisissent aussi leur taux de cotisation. La retraite cesserait d'être une question sociale. La durée de cotisation est devenue un point central de toute réforme du financement des retraites, mais elle doit tenir compte de la situation de l'emploi. [...]

[...] L'espérance de vie devrait augmenter de 5,5 ans d'ici 2040. L'augmentation de la productivité n'est pas suffisante pour pallier le déficit creusé. Les mesures à prendre pour assurer l'équilibre des régimes se rapportent toutes au triangle des retraites : repousser l'âge effectif du départ, laisser se dégrader le niveau de vie relatif des retraités, augmenter les taux de cotisations. On ne peut jouer sur une seule variable tant le déficit est grand. La réforme Balladur de 1993 a joué sur les trois tableaux (elle ne touche que le privé). [...]