La montée et la persistance d'un chômage de masse créent un contexte propice aux thèses sur le partage du travail, thème populaire comme en attestent périodiquement les sondages. Le sentiment que les autres politiques de lutte contre le chômage ont été peu efficaces renforce l'attrait d'une solution par la réduction du temps de travail (RTT). Mais alors que la loi Aubry du 13 juin 1998 est entrée en vigueur depuis plus de 8 mois, elle ne démarre que timidement dans les entreprises ; la difficulté des négociations, notamment chez PSA, met en lumière les réticences des salariés et relançant le débat : la RTT est-elle une politique efficace de lutte contre le chômage ?
[...] On peut alors s'interroger sur la pertinence de cette évolution comme solution au chômage. Il est socialement coûteux de laisser se développer la RTT par le développement du temps partiel. La non prise en compte par les agents économiques du bénéfice collectif, la position de faiblesse des salariés en situation de précarité s'opposent à une réduction plus équitable de la durée du travail. L'intervention de l'Etat est donc nécessaire pour impulser une réduction significative de la durée légale du travail, sans recours au temps partiel. [...]
[...] La question de la compensation salariale Toutes choses égales par ailleurs, la RTT avec compensation salariale (maintien du salaire individuel total) implique l'augmentation du coût horaire de la main-d'œuvre. Si les facteurs sont substituables, l'intensité capitalistique augmenterait, la technologie privilégiant le facteur relativement moins coûteux. Si les facteurs sont complémentaires, les entreprises subissent une hausse des coûts et donc une perte de compétitivité ou bien restreignent l'offre, ce qui s'avère à terme également néfaste pour l'emploi. Il est toujours possible d'envisager l'absence de compensation salariale, mais plusieurs réserves s'imposent. [...]
[...] Ensuite, pour limiter le recours aux heures supplémentaires, la loi Aubry abaisse d'une heure (de 42 à 41h) le seuil de déclenchement du repos compensateur. Mais au-delà de ces mesures, la RTT implique de repenser le temps de travail. Ainsi, l'annualisation du temps de travail permettrait une meilleure flexibilité de l'emploi en ajustant l'effectif présent aux fluctuations d'activité . mais qui risque de se traduire en horaires atypiques pour les salariés. Ensuite, la RTT peut théoriquement être le moyen d'une réorganisation permettant l'augmentation de la durée d'utilisation des équipements (propositions de Dominique Taddei), par le développement du travail posté. [...]
[...] Mais surtout, l'effet "de partage du travail" peut ne pas conduire à un recul du chômage, même s'il y a création d'emplois, car il donnera lieu à un effet d'appel sur le marché du travail. Il s'agit du phénomène de "flexion conjoncturelle des taux d'activité": des chômeurs découragés retrouveront espoir et reviendront sur le marché du travail en voyant la situation s'améliorer. En d'autres termes, création d'emplois ne signifiera pas forcément recul du chômage. Malgré tout, les simulations de l'OFCE comptent sur créations d'emplois et une baisse consécutive du chômage de 265 000[1][1]. [...]
[...] Cette réorganisation éviterait une réduction de la production et donc de la rentabilité du capital (augmentation du coût de production par unité produite). Des entreprises ont effectivement créé une équipe supplémentaire, augmenté la durée d'utilisation annuelle du capital. Cette question de l'aménagement paraît difficile à concevoir au niveau macroéconomique, puisque chaque entreprise est un cas particulier. La productivité La RTT doit être suffisamment forte pour ne pas être compensée par une hausse de la productivité du travail. Dans le cas contraire, il y a maintien de la production sans augmentation des effectifs salariés. [...]
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